mercredi 9 janvier 2013

Virgin... ite missa est

Dépôt de bilan de Virgin Stores et donc de ses magasins, dont le vaisseau amiral des Champs Elysées.

On s'achemine vraisemblablement vers un redressement judiciaire, comme le dit la Ministre des biens et services (la) culturels marchands. Le feuilleton n'est donc pas fini et se jouera en direct tous les jours sur le trottoir noble de la plus belle avenue du monde (et la troisième plus chère). Le gouvernement va en parler et produire des rapports pour constater que la concurrence dématérialisée est réelle (ah bon ?). Pourvu qu'ils ne nous produisent pas une loi comme celle sur le prix unique du livre !

L'emplacement de ce magasin est tellement convoité (et cher) que les nouveaux propriétaires qatari (évidemment) augmentent le loyer et que plusieurs groupes internationaux visent cette adresse prestigieuse :
- VolksWagen et ses voitures allemandes qui manquent à côté des autres constructeurs automobiles
- Apple et ses musiques et produits culturels dématérialisés, en fauteur de troubles
- la fringue internationale d'Uniqlo, Forever 21 ou autres enseignes devant lesquelles, par ailleurs, ce matin, premier jour des soldes, des queues monstres se profilaient déjà à 8h30
- Un grand magasin généraliste, genre Harrods ou Marks & Spencer...

Ce qui est sût c'est qu'il faudra une enseigne prestigieuse, riche et acceptable pour le propriétaire qatari. Le PSG ? Un musée qatari ?

La question a effectivement dérivé sur le dilemme "produits culturels ou non ?"... C'est forcément la faute des grandes entreprises américaines comme Amazon, Apple ou Google qui sont méchantes et ne payent pas d'impôts. Voir à ce sujet notre billet de lundi.

Le fonds d'investissement qui est propriétaire actuel de Virgin Stores a racheté cette entreprise à Lagardère qui voulait en faire, sans succès, un élément clé de la stratégie multimédia de son papa. Lagardère avait acheté le groupe à son fondateur qui s'est diversifié aujourd'hui, en entrepreneur averti, vers des domaines plus rentables que la culture. Le fonds d'investissement va négocier la fin du bail des Champs Elysées, loin de tout journaliste et ministre. L'éventuel repreneur de Virgin ne pourra presque certainement pas candidater à un nouveau bail à cet endroit. Depuis la disparition du Virgin du Louvre, emblème culturel et excuse marchande du Carrousel du Louvre, on sent bien que les biens et services n'ont plus de culturel que l'adjectif. Sephora, c'est culturel ?

Il faut faire attention aux amalgames :
- Avoir une boutique énorme sur les Champs est réservé maintenant aux groupes internationaux solides, ce n'est plus le cas de Virgin.
- Harmoniser l'apparence des Champs-Elysée en équilibrant les commerces de tout poil semble difficile dans un contexte de surenchère sur les loyers de la part des propriétaires et des grands groupes.
- La distribution physique de produits culturels est à repenser, en y ajoutant des services que les fournisseurs dématérialisés ne peuvent proposer, ce qui suppose une stratégie et ce qui semble n'être pas le cas des propriétaires actuels, au-delà du "fun" du magasin des Champs.
- La régulation des biens culturels, de leurs tarifs, des taxes et impôts à payer est un sujet urgent, pour lequel il ne peut suffire de n'écouter que quelques lobbies traditionnels en France, sans même parler des sociétés d'auteurs. Si le résultat final est d'obliger à payer plus chers les biens culturels en passant par des canaux sous perfusion, personne n'ira.
Ce sont des questions différentes trop souvent confondues.

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