mercredi 30 avril 2014

Pendant ce temps, où est François ? Que la force soit avec lui !

Le président de la République travaille évidemment. Il se fait plus discret maintenant, puisque le devant de la scène est laissé au premier des ministres qui, avouons-le, est assez fort dans ses envolées lyriques et dans la médiatisation en général. Pas besoin d'être à deux aux commandes. On n'est pas en période de cohabitation comme à l'époque des septennats.

François peut donc se consacrer à des choses plus importantes et le site de l'Elysée nous éclaire là-dessus.

Aujourd'hui un conseil des ministres avec des sujets très techniques, allant des experts-comptables aux notaires en passant par les avocats auprès de la cour de cassation, ou des sujets confidentiels comme la réorganisation de la direction des espions (DGSI) ou l'usage des normes. Rien de bien emballant, mais il faut bien bosser et mettre en pratique ce qui se dit.

Aujourd'hui aussi, déjeuner d'artistes avec les réalisateurs français sélectionnés pour Cannes. On attend les photos, avant qu'elles soient publiées dans les journaux spécialisés évidemment (comme Match, Gala ou Studio). Est-ce que Godard y sera ? Son film s'intitule "adieu au langage". Titre intéressant qui promet de belles discussions à table.

Demain, cérémonie traditionnelle de remise du muguet avec les forts des Halles (de Rungis), pendant que manifesteront les individus normaux. Le muguet a été en avance cette année car l'hiver a été doux.

Devant ce programme harassant, on comprend mieux pourquoi il fallait un premier ministre qui non seulement travaille dur, comme le précédent, mais aussi qui communique à la place de François. On notera à ce propos qu'aujourd'hui 30 avril sont parus dans le JO les décrets officiels d'attribution des secrétaires d'Etat fraîchement nommés, ce qui leur permet de travailler officiellement. Ah oui quand même, hier François a inauguré les chrysanthèmes l'exposition sur le futur musée du Louvre à Abu Dhabi. Majeur. Pour une fois qu'on ne parle pas du Qatar !

Après tous ces efforts, on constatera qu'il n'y a rien à l'agenda de vendredi à dimanche. Quel rythme !
Sur le site de l'Elysée, il y a un onglet "open data". On peut y charger par exemple la chronologie des événements annoncés... depuis le début du quinquennat jusqu'au 6 mai 2014 - gros fichier donc mais intéressant pour les curieux et les historiens (ce n'est pas de la SF, mais le communiqué de presse est déjà prêt et je vous le livre en avant-première, puisqu'il est public) : Le président de la République, François HOLLANDE, accueillera Sa Majesté Elizabeth II, Reine du Royaume-Uni, et le Duc d’Édimbourg pour une visite d’État, en France, du 5 au 7 juin 2014. Le 6 juin, Sa Majesté et Son Altesse royale assisteront, en Normandie, aux célébrations du 70ème anniversaire du Débarquement. Les 6 et 7 juin, ils participeront aux cérémonies organisées dans le cadre de la visite d’État et seront reçus à l’Élysée par le chef de l’État.

A part le fait que c'est une resucée d'un communiqué de février et qu'il est publié un mois avant le grand raout de début juin, c'est important, non ? Repos, formez les faisceaux !


PS si j'ose dire : Ah oui c'est vrai, il y a la Foire de Paris qui commence aujourd'hui. Je suis mauvaise langue.

PPS : La vraie nouvelle est ici et ici. Vous les reconnaissez ? (Indice : Il n'y a pas François)


mardi 29 avril 2014

Oui = ? ; Non = ?

Vote à l'Assemblée aujourd'hui sur le pacte de responsabilité (lire économies) et sur le plan d'économies (lire voeux pieux) du gouvernement, version Valls.
Débats agités (voir un suivi détaillé ici par exemple). Le direct sous toutes ses formes est à suivre sur La chaîne parlementaire qui s'est bien modernisée, ordre du jour ici (pdf) à partir de 16h15.
Les groupes politiques ont des positions pas vraiment homogènes, sauf ceux qui sont petits. Les radicaux de gauche ont par exemple annoncé qu'ils voteraient pour à 15/17. Les écolos ont annoncé n'ont pas annoncé, qu'ils voteraient pour contre s'abstiendraient en partie totalement. L'UMP a annoncé qu'elle voterait en majorité contre... On peut ainsi lire des pré-annonces de ténors qui ont besoin qu'on parle d'eux. La plus rigolote ce matin c'était celle de Fillon qui ne votera pas ce plan. Ah bon ? Il aurait pu le voter ??? Le bureau national du PS a lui approuvé la résolution qui appuie le gouvernement, mais seulement aux deux tiers.

Résumé du projet soumis au vote de confiance ici. Ce plan inclut quelques concessions à l'aile gauche du PS. C'est la technique habituelle : une annonce d'un plan dur pour marquer la différence et créer un choc, puis des concessions pour montrer qu'on est humains. On apprend ça en première année de "Négociations sociales".

Sinon, et parce qu'il n'y a pas que ça, quelles nouvelles du Front national (qui manifestera aussi le 1er mai ne l'oublions pas, évitez la zone entre rue de Rivoli et Opéra) dans ses nouvelles mairies conquises il y a peu :

- A Fréjus, le drapeau européen a été retiré du fronton de la mairie. Je vous rappelle qu'on est à moins de quatre semaines des élections européennes et que cette petite mesure en dit long. Ailleurs dans le Var, les élus se sont votés une augmentation de leurs indemnités. Il n'y a pas de petit profit, surtout en période de crise.

- A Villers-Cotterêts, ville où est née la langue française sous François Ier (pas notre François ni le pape, un autre, hein ?) et ville où est mort le général Dumas en 1806, père d'Alexandre, lui-même père d'Alexandre et de quatre mousquetaires, le premier général mulâtre de l'armée française, la municipalité n'organisera pas de commémoration de l'abolition de l'esclavage. Lire le roman Georges de son fils, le père de l'autre Alexandre si vous suivez bien, pour vous faire une idée.

- Dans toutes ces villes le porc reviendra au menu des cantines scolaires... euh, en fait il y était déjà, alors, oui il ne sera pas enlevé. Ca c'est de la mesure !

Le résultat du vote sera ajouté en-dessous (après le vote). Avant le vote, je ne connais pas le résultat, c'est l'un des inconvénients de la démocratie.

Discours de Manuel Valls ici (J'assume et non J'accuse)

Oui=265 ; Non=232

lundi 28 avril 2014

Europe moins quatre semaines : un débat ce soir

Elections européennes dans moins de quatre semaines donc, le 25 mai. Un seul tour.

Pour la première fois dans l'histoire de l'Union européenne, le parlement élira le nouveau président de l'Union, avec des pouvoirs accrus. C'est donc un modèle très Europe du Nord (ou IV° République si vous préférez) qui a été choisi. Pas (encore ?) d'élection de ce Président au suffrage universel, genre V° République. Le fait de voter pour une liste ou une autre prend donc une importance toute nouvelle avec ces élections. Tout ceci découle du Traité de Lisbonne en 2009, déjà vieux, mais ce sont les premières élections depuis.

Et ce soir, à 20h en France, premier débat télévisé (et internetisé) entre les quatre principales têtes de listes européennes, donc les quatre candidats les plus probables à la Présidence. Aucun français là-dedans, mais deux allemands, un belge et un luxembourgeois. Un à droite, un plus à droite, un à gauche et un écolo. Trois femmes et un homme Trois hommes et une femme (excusez-moi, je rêvais).


Ce débat ne soulèvera pas les passions en France certainement, pourtant il est important. Il est vraisemblable que seuls les européens convaincus seront à l'écoute, et il y en a de moins en moins. Il faudra chercher pour le voir en direct... France 2 a d'autres choses à faire... Le débat sera donc visible sur Euronews.

On notera que ce premier débat à quatre a lieu dans une université, ce qui est bien (en attendant un débat mi-mai au Parlement européen), à Maastricht, ce qui est bizarre car évoquant pour plein d'opposants un vote couperet oui/non pour l'Europe auquel un certain nombre de dinosaures font encore référence. A noter qu'on peut poser ses questions à l'avance ou en direct en utilisant #EUdebate2014 sur votre réseau social favori (tous américains soit dit en passant). Les militants des partis importants ont tous reçu des messages pour leur demander de participer et d'écouter le débat. Pourquoi pas vous ? Le débat sera en anglais avec traductions simultanées.

dimanche 27 avril 2014

Du temps de cerveau pour... Une nouvelle Trente et Hune

Kwak était un cloturien normal. Il possédait un navire et un bon équipage de glorgs aguerris. Sa réputation était établie et il n'avait peur de personne. Depuis le Renouveau les batailles étaient devenues très rares et Kwak passait l'essentiel de son temps à paresser en haut du mât pendant que les glorgs ramaient. Les mers étaient toujours belles en cette saison et tous les capitaines avaient aménagé une pièce confortable en haut de leur mât pour profiter du vent. Kwak avait du goût et son repaire était très confortable.

Kwak avait une passion. Il adorait la magie et s'entraînait dès qu'il le pouvait. Sa sacoche remplie de livres de magie et d'accessoires utiles à tout magicien ne le quittait jamais. Il était particulièrement fier de son petit flacon magique. Ce n'était qu'un tout petit flacon mais il contenait des milliers de litres de saumure qui avaient acquis des propriétés extraordinaires depuis des milliers d'années, grâce au champignon qu'il contenait et qui restait toujours au centre, quel que soit son orientation. Il avait conquis ce flacon des années auparavant lors d'une bataille incertaine jusqu'au bout. Il se demandait encore comment son ancien propriétaire avait pu perdre cette bataille tout en possédant un tel objet. Peut-être n’avait-il pas eu de chance ? En tous cas, lui, il comptait bien profiter au maximum des pouvoirs du flacon et le garder indéfiniment.

Ce matin-là, Kwak était en train de lire un chapitre sur les sorts blancs lorsqu'il sentit le coup de vent. Il eut la présence d'esprit de tout remettre dans la sacoche, de se l'accrocher solidement et de s'attacher lui-même en haut du mât. Les coups de vent étaient fréquents sur les mers et tous les capitaines savaient y faire face. Son équipage savait quoi faire et Kwak se contenta de vérifier que toutes les dispositions avaient été prises en bas, avant de profiter du spectacle. Les poètes avaient souvent chanté la beauté des tempêtes marines. Celle-ci promettait d'être particulièrement belle et forte. Kwak n'était pas inquiet. De mémoire de Clote jamais un navire n'avait été mis en danger par une tempête, car la magie les protégeait.

Kwak ouvrit grand ses yeux et regarda la tempête venir. Il surveillait particulièrement l'œil de la tempête, ce grand tunnel noir qui balayait tout sur son passage. Il suffisait d'écarter le navire un peu sur bâbord et il n'y aurait aucun danger. L'œil passerait loin. Kwak eut un sourire et leva la main pour guider le navire. C'est à ce moment que les choses se gâtèrent. Son doigt était coincé dans la boucle de la sacoche. Kwak eut à peine le temps de regarder son équipage en bas que le navire se coucha. L'œil de la tempête frôla le navire sans le toucher. Seul le haut du mât était sur son passage.

Un instant plus tard la tempête était terminée. Le navire avait repris sa position normale. Kwak poussa un soupir de soulagement et réussit enfin à dégager son doigt. Son navire était sauf et il le vit s'éloigner tranquillement sur une mer redevenue calme. S'éloigner, pensa-t-il soudainement ? Mais ce n'était pas possible. S'éloigner ?

C'est à ce moment que Kwak réalisa qu'il n'était plus sur son navire. Il était seul, en train de flotter dans l'air, sans aucun bruit. On aurait dit que la nuit était également en train de tomber car tout devenait noir très rapidement. En quelques instants Kwak se retrouva tout seul en train de flotter, sans aucune sensation. Il pouvait juste sentir la sacoche contre lui et il réalisa qu'il avait dû être capturé par l'œil. Jamais il n'avait entendu parler d'une telle histoire... Et il avait fallu que cela tombe sur lui !

Kwak ne voyait rien et ne sentait même pas le temps passer. Il essaya bien de lancer un ou deux sorts mais rien ne traversait le noir qui l’entourait. Au bout d’un certain temps, non mesurable, Kwak décida d’y aller avec les grands moyens. Il prit le flacon dans la sacoche, le cala bien dans la main gauche et commença à dévisser le bouchon avec la main droite, celle qui avait été coincée au mauvais moment. Il savait que le flacon contenait bien plus de saumure que ce qu’il pouvait en contenir et que ce liquide ne pouvait sortir du flacon sans injonction magique. Lorsque le bouchon eut disparu, Kak plongea le doigt puis la main dans le flacon. Très vite il se sentit complètement immergé dans le flacon qui tenait pourtant habituellement dans une poche. Il nagea vers le champignon qui luisait faiblement au loin. Il eut l’impression de mettre des heures à le rejoindre mais il réussit à l’atteinte et à le toucher du doigt.

En un instant Kwak se retrouva  dans un tourbillon de vents et dut fermer les yeux. Il était secoué comme un grobayer. Puis tout se calma. Kwak ouvrit les yeux. Il était entier, sa sacoche toujours à ses côtés. le flacon était refermé et semblait intact. Kwak le remit dans la sacoche et commença à regarder autour de lui.

Il était entouré d’algues énormes, beaucoup plus grandes que lui, avec des troncs impressionnants et qui semblait surgir du sol. Sous ses pieds en effet il n’y avait pas un bateau, ni même la mer, mais une surface étrange, grise et dure. Il était assis sur un siège vert foncé planté dans ce sol qui sentait mauvais. Il était seul et regarda encore une fois ses pieds. Ils semblaient avoir disparu. Ils étaient enfermés dans des objets noirs et brillants, avec des ficelles noires pour les attacher, au lieu d’être comme d’habitude à l’air libre pour profiter des racines avec la mer. Très étonné, Kwak regarda ensuite le reste de ses vêtements. Au lieu des couleurs habituelles et des dorures propres à son rang, il avait des habits gris foncé sans aucun apparat, et portait même autour du cou une sorte de corde colorée, nouée de manière simpliste et sans aucune élégance.

Kwak se leva et rajusta sa sacoche, toujours identique à elle-même, elle. Il huma l’air et se dirigea vers l’endroit où il sentait une odeur familière, différente de l’odeur épouvantable qui régnait autour de lui. Il ne savait pas où il était mais il sentait que c'était le matin. Il pensa qu’il était mort et en enfer, l’enfer des mauvais capitaines qui n’avaient pas su conquérir la mer. Mais il ne sentait pas mort. Il marcha, d’un pas mal assuré sur ce sol gris qui ne bougeait pas comme lui et au bout de quelques dizaines de mètres dans ce paysage onirique, se retrouva à la source de l’odeur. Une petite mer circulaire, comme enfermée dans un océan de sol gris, avec une barrière blanche autour. Il sut alors qu’il avait quitté son monde. Il y avait bien quelques petites îles sur Clote, mais il n’y était jamais allé car elles étaient maudites. Tout se passait comme si ce monde était le négatif de Clote : un océan de sol gris au milieu duquel flottaient quelques petites mers rondes.

C’était une vue révulsante et Kwak dut s’asseoir sur un autre siège vert foncé qui était placé à côté de la petite mer. Après quelques instants de panique, il réussit à se calmer. Il se leva et trempa sa main dans la mer. La texture de cette mer ressemblait à ce qu’il connaissait, mais elle semblait comme morte. Kwak retira vite sa main et regarda cet avorton de mer avec tristesse. Quel cauchemar ! Quel monde maudit ! Comment pouvait-on survivre, même de manière temporaire, dans un lieu si gris et triste ? Il voyait bien quelques oiseaux au loin, mais il étaient gris et bougeaient la tête de manière bizarre.

Kwak était un homme d’action. Il réfléchit à peine et décida de sauver cette mer. Il reprit le flacon, l’ouvrit et jeta un peu de saumure dans la mer circulaire. Puis il attendit. Il savait que la mer devait digérer la saumure. Lorsqu’il vit naître la phosphorescence habituelle de la mer, de ses mers, il leva le doigt et jeta son sort.

La mer circulaire se comporta de la manière qu’il attendait. Elle changea de couleur et se mit à gonfler. En quelques instants elle sortit de sa prison et se mit à inonder le sol gris qui devenait scintillant à son contact. Kwak était aux anges. Bientôt le sol disparut sous la mer, ainsi que les grandes algues bizarres qui avaient à peine survécu à l’air libre et qui semblaient enfin s’épanouir au contact de la vraie mer.

Lorsque presque plus rien n’émergea autour de lui, Kwak se mit à nager. Il sentait ses forces revenir au contact de la mer. Il avait eu un peu de mal à se débarrasser de ces vêtements bizarres, mais maintenant tout allait bien. Il ne voyait plus aucune trace d’eux, ni de rien d’autre d’ailleurs, sauf peut-être une tour bizarre qui émergeait encore au loin. Seulement la mer. Il nageait nu dans la mer, la vraie, la seule, et il reconnaissait le petit picotement sur ses écailles. Le ciel changea de couleur et devint vert, comme il se devait. Kwak sut alors qu’il venait de rendre à ce monde sa beauté originelle. Il ne savait pas qui en étaient les habitants avant mais cela n’avait plus d’importance maintenant. Ils devaient tous être morts et toutes leurs constructions bizarres devaient être en train de finir de se dissoudre dans la mer. Même la tour était en train d’être engloutie. Il devait s’agit de la plus haute des « constructions » étrangères et elle n’allait pas tarder à disparaître. Il n’avait plus qu’à attendre un peu. Il savait que d’ici quelles moments apparaitraient autour de lui les premiers glorgs, ces créatures de la mer qui l’aideraient à construire son navire. Le premier et le plus beau de tous les navires de ce monde étrange.

Kwak n’avait aucune nostalgie pour son ancien monde. Il savait maintenant quelle était sa mission. Il devait attendre une prochaine tempête et essayer de se glisser dans l’oeil pour être projeté sur un autre monde, afin de le rendre lui aussi à son état originel. Kwak se sentait comme un prophète, comme un champignon qui se répandait à travers les mondes. Il nagea vers la tour. Et c’est là qu’il la vit. Elle. Toute seule. En haut de cette tour qui allait disparaître. Elle avait l’air belle et l’appelait, dans une langue qu’il ne comprenait pas. Kwak la regarda un instant. Elle était vraiment belle.

Mais il n’avait pas besoin de compagne pour se reproduire. Il fit demi-tour et vit à peine la tour et elle disparaitre. Les premiers glorgs étaient en effet déjà en train de surgir de la mer. Kwak leur sourit.


samedi 26 avril 2014

Alstom, les choses sérieuses commencent

Alstom est une entreprise prospère mais trop petite à l’échelle de la mondialisation. Entreprise française et centrée sur l’Europe avec des concurrents européens plus forts (comme Siemens en Allemagne), Alstom est au coeur de plein de marchés potentiellement juteux et émergents, du nucléaire au TGV en passant par l’éolien. En plein dans le débat actuel sur le développement durable et les énergies nouvelles, et en plein dans le débat sur la capacité de la France à exporter.

Ces marchés sont en plein essor et les acteurs « occidentaux » se rapprochent pour en tirer des profits et pour optimiser leurs coûts comme ils disent. C’est en général à certains moments particuliers que les entreprises prennent des décisions stratégiques : autour d’une crise et lors d’un essor particulier du marché. Aujourd’hui on a les deux et la course à l’Alstom est donc enclenchée car son portefeuille d’activités et de brevets est fort intéressant.

Il semble que General Electric (USA) soit le mieux placé dans cette course. En matière de business il est toujours important d’aller plus vite que les concurrents ou les obstacles « publics ». Et un certain nombre d’actions sont donc en cours pour accélérer le mouvement. On verra bien si ça se fait, mais comme le dit Le Monde à la fin de son article en cita,t un « conseiller » : « Soit l'Etat fait casser le deal mais laisse Alstom dans la panade faute de solution, soit il accepte l'offre de GE mais donne l'impression de brader un fleuron tricolore aux Américains ».

+
=
???
Les groupes français de taille internationale sont peu nombreux, surtout dans le domaine industriel lourd. c’est très bien de devenir une cible tentante pour des groupes plus puissants. C’est la règle du jeu du capital international. Ce qui caractérise une économie puissante c’est qu’elle sache accompagner de tels groupes dans leur expansion. Ce qui caractérise une économie en développement c’est qu’elle sache générer de tels groupes. Ce qui caractérise une économie en dédéveloppement (excusez-moi pour ce néologisme qui concerne le passage du statut de développé à moins développé) c’est qu’elle se fait piquer ses richesses, ses pépites.

C’est un exemple de plus de la toute puissance du capital. Tant mieux pour les patrons et les actionnaires. Tant mieux pour tous ceux qui en profiteront. Tant pis pour le tissu industriel de la France qui s’effrite un peu plus encore. Si cette opération se fait, on peut parier sur le fait que les TGV vont se développer beaucoup plus vite et que GE va en devenir un acteur majeur ! Parlera-t-on dorénavant de l’explosion des MST dans le monde (Mega Speed Trains) ?

Couvrez-vous !

Et lisez les mille pages du livre de Thomas Piketty, l’économiste français qui monte aux US. En France on n’a pas de capital mais on a des économistes.

vendredi 25 avril 2014

(Net)Mundial

Le Mundial, le Mundial !!! Braaaaaziiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiil !!!

Ah zut c’est en juin seulement. Il faut encore attendre…
Par contre cette semaine c’était le NetMundial au Brésil aussi.
Un Sommet étrange et inédit pour parler de gouvernance de l’Internet et de l’avenir de l’ICANN. Le Brésil essaye de prendre la tête d’une fronde anti-américaine pour leur enlever le contrôle de l’Internet. Mais c’est plus compliqué que ça. On en a parlé ici plusieurs fois.

La France était représentée par sa nouvelle ministre du numérique qui s’avoue un peu déçue des conclusions, pas assez claires à son goût. Rien n’est clair dans la gouvernance de l’Internet et il faut prendre son mal en patience. Les conclusions en anglais sont ici. Condamnation de l’espionnage sur l’Internet (genre NSA mais pas seulement) mais sur le fond pas d’accord sur quelques points clés, comme la neutralité du Net : cette idée que l’Internet est un ensemble de tuyaux devant laisser passer tous les contenus quelles que soient leurs tailles et leurs types dérange beaucoup de personnes. C’est pourtant l’idée de base du Net depuis l’origine. Comme un gigantesque réseau de tuyaux pneumatiques, les paquets voyagent dedans sans qu’on s’occupe de leur contenus… hum… Google au fait, par hasard, a averti tous ses utilisateurs qu’il scannait leurs courriels pour identifier des mots-clés et mieux cibler les pubs pour vous. Vive la vie privée non ? Ceci était un message pour tous ceux qui ont une adresse en gmail.com par exemple.

Réactions contrastées donc un peu partout. C’est souvent le cas à propos d’un texte forcément mou, issu d’un consensus où les Etats ont un poids déterminant. Exemple avec Vinton Cerf, respecté de tous et l’un des inventeurs de l’Internet (avant le web, il y avait l’internet et ses protocoles variés). Il a dit entre autres :
- Si vous regardez bien, les Etats-Unis ne contrôlent pas internet, c'est un mythe… Avant peut-être, mais plus maintenant...
- Internet est un animal très singulier par son caractère transnational. Vous ne pouvez pas tracer une ligne et dire : cela est pour ce pays et cela pour l’autre
-  Il est juste de souligner que les États-Unis jouent un rôle unique au niveau du système de noms de domaine.
Autrement dit, tout va bien dans le meilleur des mondes. Ah au fait Vinton Cerf est l’un des vice-présidents d’une petite boîte aux USA, appelée Google… Et il roule clairement pour les USA.

Les discussions portent entre autres sur le modèle de gouvernance de l’Internet. L’ICANN prône (et pratique à peu près on y reviendra) un modèle unique the multi stakeholder model, ou un modèle multi-acteurs. On devrait plutôt parler de parties prenantes, des acteurs qui possèdent des parts (du marché) et qui agissent sur le marché. Autrement dit les acteurs existants à un moment donné, ce qui exclut de fait les nouveaux entrants. Cela suppose plein de tables et d’enceintes pour réunir des groupes plus ou moins infiltrés dans lesquels il faut être adoubé par les membres existants pour y rentrer. C’est un modèle puissant mais qui peut assez facilement être manipulé et qui exclut de fait les utilisateurs, les citoyens normaux si vous préférez. Les Etats préfèrent les modèles type ONU où ils peuvent négocier dans le confort de salles de réunion douillettes, du genre : je cède sur ceci mais tu me donnes cela… Les acteurs économiques hyperpuissants (genre Google) préfèrent n’importe quel modèle du moment qu’ils peuvent l’infiltrer. Les techs (les informaticiens et spécialistes) préfèrent tout contrôler en douce en fixant des règles techniques que tout le monde passe du temps à contourner ensuite. On est dans le même genre de démarche que dans les organismes de normalisation où les experts indépendants (même respectés et historiques) sont quand même payés par des Etats ou des entreprises, et cela ne gêne personne.

Le paradoxe évidemment est que pour décider d’un (futur) modèle de gouvernance il faut appliquer un modèle (existant) de gouvernance qui organise les débats. C’est d’ailleurs pour cela que les diplomates discutent d’abord du lieu de la réunion, de la forme de la table, de la liste des participants et de la couleur de la tapisserie avant de parler du fond.

Ce qui est quand même révélateur c’est que ce combat de la présidente du Brésil commence à faire des petits.





jeudi 24 avril 2014

Un petit château en Bordeaux

Parenthèse œnologique aujourd'hui, puisque je suis à Bordeaux. Petite visite en photos d'un château de Graves, un Pessac-Léognan plus exactement, et même pour être plus précis le château Carbonnieux, que les amateurs connaissent bien.

Quelques vues rapides de Bordeaux

Une ancienne chapelle reconvertie en salle de conférences par l'Université...

Les abords du "château" qui n'en est pas un mais plutôt un ancien cloître du moyen-âge (si,si)

Quelques anciens outils et matériels de vignerons

Les matériels utilisés aujourd'hui
Du vin pas encore prêt à boire. La coquille Saint Jacques dans le logo ne vient pas de la proximité avec la mer mais du fait que c'était une étape sur un des chemins vers Saint-Jacques de Compostelle. Étape intéressante certainement !
La réserve de vieilles bouteilles, fermée à clé malheureusement.

Magnums

Vieilles affiches

Et pour les scientifiques la carte détaillée des Pessac-Léognan...

Sur ce... J'y retourne ;) À votre santé

mercredi 23 avril 2014

Économie : des visions différentes

Deux nouvelles aujourd'hui :

Juppé et Rocard sont deux cautions morales indiscutées et indiscutables. Ils chapeautaient le PIA qui vise à coordonner les grand investissements innovants en France. Ils viennent d'annoncer qu'ils se désengageaient puisque le dossier maintenant est rattaché à Montebourg, ministre de l'économie. Ils disent qu'il s'agit par essence même d'un projet interministériel qui ne peut dépendre d'un seul ministère. Rappelons qu'il s'agit en l'occurrence de deux anciens premiers ministres qui défendent la le rôle de l'interministériel ! Ils en profitent pour souhaiter bonne chance au ministre pour la suite... Merci les copains. La suite va être difficile.

L'autre ministre de l'économie annonce lui un plan drastique pour réduire le déficit, avec encore plus d'économies à venir, suite à la pression de Bruxelles. On sent bien une grosse radicalisation du gouvernement. Tout ça est basé sur des hypothèses et elles ont été choisies pour être les plus favorables. Certains les jugent trop optimistes. Au moment où le gouvernement cherche à faire voter son plan et drague même certains UMP et UDI pour cela (au cas où), ces annonces vont déclencher l'ire de la gauche de la gauche. Mais elles auront le mérite de bien poser le débat pour les élections européennes dans un mois. Déjà.

Ces deux nouvelles montrent le poids de l'économique dans la politique française actuelle. Foin des réformes de société, ce n'est pas le moment, sauf pour quelques diversions passagères. Il faut s'y préparer. Chacun à son niveau...

mardi 22 avril 2014

Vous avez dit nourricière ?

22 avril - Journée internationale de la Terre nourricière... selon l'ONU, avec comme thème cette année : "Des villes vertes". Raéppelons que cette journée existe depuis 1970, avant la crise pétrolière donc, et en pleine sensibilité post-68. Histoire de cette journée ici, vue par les américains qui l'ont inventée. En anglais, on dit d'ailleurs Mother Earth Day. C'est donc une vision nourricière de la Terre-Mère qui est mise en avant, comme depuis l'antiquité avec Gê ou Gaïa. D'ailleurs les Georges comme moi ne doivent jamais oublier que leur nom vient de Gê orgos, le travailleur de la Terre. On avait parlé de cette journée ici l'année dernière.

La Terre va mal, et de plus en plus mal. La Terre nourricière ne pourra plus nourrir tous les humains qui la peuplent dans quelques dizaines d'années. Ce n'est pas long quelques dizaines d'années, surtout pour les jeunes d'aujourd'hui... A ce propos, relisez ce billet d'il y a quelques mois sur les planètes et surtout la petite nouvelle de Fredric Brown à la fin du billet ;) Au moment où la NASA vient d'annoncer qu'elle a identifié une planète "presque jumelle" de la Terre, c'est intéressant même si cette soeur est à presque 500 années-lumière de nous. Ca veut dire qu'à la vitesse de la lumière ou de rayons quelconques qui lui seraient envoyés, il faudrait quand même attendre 1000 ans pour une réponse... s'il reste des survivants ici à cette époque. Foin de science-fiction, ce genre de nouvelle est quand même rafraîchissante pour les jeunes apprentis scientifiques d'aujourd'hui. Mais comme c'est plutôt du "long terme", il est tout aussi important de s'occuper aujourd'hui de notre Terre.

En France, comme chaque année, quasiment aucun écho médiatique. Il y a certainement des choses plus importantes à dire et les écolos ont l'air d'être occupés ailleurs. Ah si quand on cherche, il y a quand même un site internet spécial ici. Ah zut, c'est un site québécois. Il y a le site google.fr avec son doodle du jour à regarder aujourd'hui seulement. Si vous l'avez raté, allez ici pour voir tous les doodles et choisissez celui du 22 avril. Ah Zut, Google est américain ! Et sur le site du grand ministère nouveau du développement durable ? Rien du tout. Le gros titre du jour est sur la parution au Journal Officiel du décret d'attribution de ce beau Ministère la semaine dernière. Tous les décrets sont parus d'ailleurs dans le JO du 18 avril (n°92). J'aime quand on s'occupe d'abord de soi (de son propre Ministère, de son propre territoire) avant de s'occuper des Autres et de la Terre !


Mais que fait Ségolène ? Nos villes seraient-elles déjà vertes ?



lundi 21 avril 2014

Après Pâques, la semaine des négociations budgétaires

La trêve pascale se termine. Retour aux bisbilles habituelles.

Pour le coup on parle des mesures d’économies (entre 35 et 50 milliards d’euros) proposées par le nouveau Premier Ministre. Certains députés socialistes qui se souviennent mesures alternatives pour faire ces économies tout en ne faisant pas trop peser de charges sur les plus pauvres et même les classes moyennes. C’est un débat classique avant un débat parlementaire qui commencera le 29 avril. Mais ici le gouvernement a besoin de sa majorité pour faire passer ces mesures.

Il y a plusieurs plans possibles : ici et ici. Dans les détails ces discussions peuvent changer beaucoup de choses pour des millions de français. Mais la vraie question est ailleurs.

Le dialogue entre le gouvernement et sa majorité est en train de changer de nature. La méthode Valls, qui est plus « cash » comme disait un de ses confrères, est celle du pendule : un coup à gauche, un coup à droite et ensuite on converge vers l’équilibre. Remarquez bien que c’est la même méthode que dans l’artillerie : un coup trop long, un coup trop court et ensuite tout est réglé. Les discussions qui commencent ont vocation à déminer les débats publics de la semaine prochaine, alors que les députés PS sont divisés. Le fait d’avoir pris un ton plutôt agressif lors de son discours inaugural permet maintenant à M. Valls d’avoir des marges de manoeuvres. Est-ce de l’artillerie ? N’est-ce pas plutôt comme l’art du toréador qui tourne astucieusement autour de l’arène pour réduire petit-à-petit les marges de manoeuvres du taureau ?

Comment utiliser cette méthode d’artillerie sans tomber dans le marchandage ou sans rater son objectif ? Cela demande une sacrée dose d’habileté politique, et pas seulement médiatique. On va donc pouvoir mesurer à cette aune l’habileté du nouveau Premier Ministre. Et ce d’autant plus facilement que la droite est prête à tomber dans le panneau en étant elle-même plus que divisée sur les mesures à prendre… Il n’y a qu’à voir le ballet effarouché des centristes autour du pouvoir ou la manière dont le MEDEF est de plus en plus isolé dans son camp.

Heureusement, depuis une quinzaine d’années, le dimanche qui suit Pâques est celui de la « Divine Miséricorde ». Reste à voir si elle s’appliquera aussi au gouvernement.




dimanche 20 avril 2014

Du temps de cerveau pour… une nouvelle Trente

C’était le 14 du mois, un jeudi et Gilles était déjà à sec. Comme tous les mois. Il n’y arrivait décidément pas et il savait qu’il allait devoir aller chez M. Loiseau, l’usurier et le prêteur sur gages, celui que tout le monde appelait l’oiseau de proie. Et pas plus tard que demain s’il voulait continuer à donner le change.

Gilles était entre deux âges et n’avait pas eu de chance, mais il avait un bon fond. Il donnait de son temps libre pour l’église du village, et en ce moment il avait beaucoup de temps libre ! Gilles était l’organiste attitré de l’église et il était le seul à avoir le droit de toucher l’orgue de l’église, les grandes orgues comme disait pompeusement le curé, qui était situé comme il se doit au-dessus de la grande porte de l’église, dans la grande tribune à l’ouest. La plupart du temps le curé, conscient de l’état plutôt mauvais de l’orgue se contentait du petit orgue moderne près du choeur avec des paroissiennes volontaires, mais pour les grandes messes du dimanche, il exigeait les grandes orgues et Gilles était chargé de le maintenir à peu près en état et d’en jouer.

Gilles était un vrai musicien mais il avait vraiment du mal à gagner sa vie en vivant de sa passion. Et il avait tellement de problèmes d’argent qu’il avait commencé à mal se comporter, tout en se sentant affreusement coupable. Tout avait commencé il y a presque un an, quand ses problèmes d’argent l’avaient pris à la gorge. Il était en train de regarder un registre de l’orgue, celui qui donnait accès au théorbe, qui ne voulait plus marcher. Toute la mécanique semblait pourrie et même en ayant changé les ressorts, il voyait bien que ce registre ne pouvait plus être utilisé. Il s’était dit ce jour là que c’était dommage car ces 7 tuyaux ne serviraient plus. Et il avait regardé les tuyaux de cuivre, bien cachés derrière les autres… et invisibles du choeur…

C’est ce jour-là qu’il avait commencé à démonter des parties de l’orgue, invisibles et inutilisables pour les vendre à Monsieur Loiseau. Au début l’usurier avait été réticent mais petit à petit il l’avait encouragé. Il avait des acheteurs pour ce type de pièces et lui promettait un bon prix pour chaque morceau. Gilles était rongé par le remords mais il n’avait pas trouvé d’autre solution pour survivre. Graduellement l’orgue s’était allégé de tuyaux invisibles et de mécanismes inutilisables. Gilles se sentait coupable mais il se disait que de toutes façons toutes ces parties de l’orgue ne servaient plus à rien depuis belle lurette.

Trois mois auparavant, Gilles n’avait toujours pas plus d’argent et il était arrivé au bout des parties cassées de l’orgue. De l’extérieur tout était pareil et il pouvait jouer tous les morceaux sans aucun changement. Monsieur Loiseau s’était fait de plus en plus insistant chaque semaine. Gilles n’avait pas d’autre ressource. Il décida alors de démonter quelques tuyaux des jeux les moins utilisés, les notes les plus graves ou les plus aiguës, celles qu’on ne jouait jamais. Au début cela avait été facile et puis cela avait compliqué son jeu à lui.

Le mois dernier, il avait dû s’attaquer à un tuyau visible. Un gros. Il avait dû découper la partie cachée pour ne laisser que la façade avant. C’était un crève-coeur mais cela lui évitait un crève-la-faim. Et Monsieur Loiseau était insatiable maintenant.

En allant à l’église, ce jeudi soir, Gilles avait le regard sombre. Il avait la clé et pouvait franchir à toute heure du jour et de la nuit la petite porte qui donnait sur la tribune. Le seul accès à l’orgue. La semaine dernière il avait dû changer son interprétation pour éviter les tuyaux absents et le curé l’avait regardé bizarrement après la messe. Mais il devait continuer. C’était la semaine sainte et la grande messe du dimanche de Pâques devrait être parfaite. Chaque année, le curé lui demandait de venir saluer la foule. Il devait pouvoir être bien habillé, or cela faisait longtemps qu’il n’avait plus d’habits corrects. Il allait vendre un tuyau et pourrait au moins s’habiller correctement pour faire honneur au curé et à la foule.

La nuit du jeudi saint au vendredi tout était calme dans l’église. La légende disait que les cloches s’envolaient pour Rome. Tout était silencieux et Gilles put travailler rapidement. Ce tuyau était un Ré. Il allait devoir transposer certains airs pour éviter de montrer son absence. En sortant de l’église au coeur de la nuit, Gilles crut voir une petite lumière flotter derrière une fenêtre dans la maison en face de l’église et une ombre en forme de cloche passer dans le ciel, noire sur fond noir. Gilles pressa le pas et se dit qu’il devait manger, s’il commençait à avoir des visions.

Une fois sorti de la boutique de Monsieur Loiseau, toujours ouverte pour lui, Gilles se retrancha chez lui, dans sa petite cabane. Il devait maintenant se préparer pour dimanche et trouver de nouvelles interprétations pour éviter ce Ré. Le samedi soir il alla louer son habit qu’il devait rendre le lundi matin. La boutique de location d’habits était en face de l’église et la jeune femme qui lui tendit son habit lui sourit d'une manière si franche que Gilles s’enfuit en courant chez lui. Il avait tellement honte qu’il décida que ce serait son dernier dimanche de Pâques. Il avouerait tout au curé dès le lundi et se prépara aux conséquences inévitables.

Le dimanche matin, Gilles arriva très tôt à l’église, avec son bel habit. Le curé fut charmé de le voir et le complimenta sur sa tenue. Il lui donna ensuite une partition nouvelle à jouer en fin de messe, pour l’apothéose. Il devrait saluer la foule de la tribune puis jouer cet air. Gilles lui sourit et regarda la partition. C’était une toccata en Ré. Gilles la connaissait bien et il sut tout de suite que ce morceau serait impossible à jouer. Il manquait trop de tuyaux, et même un jeu entier, qu’il croyait ne jamais devoir utiliser. Gilles bredouilla quelques mots et alla vite se réfugier devant la console de son orgue.

Dans le miroir placé à sa gauche il voyait l’église se remplir. Il reconnaissait la plupart des paroissiens. Il vit Monsieur Loiseau et fut surpris que celui-ci vienne à la messe. Il vit la jeune femme de la boutique de location. Elle seule saurait d’où venait son habit. Il vit ensuite avec horreur une équipe de télévision s’installer. Il se souvient alors que le curé avait mentionné ce détail quelques semaines auparavant : la messe serait retransmise en direct. Gilles était en sueur.

Les cloches sonnèrent. Elles étaient donc bien revenues, se dit-il avec un sourire un peu forcé. Gilles joua. Il avait bien travaillé ces deux derniers jours et ses improvisations étaient brillantes. Seuls les grands musiciens auraient pu s’étonner qu’il n’utilise pas plus de registres. Pour les autres, tout sonnait bien. Et la messe se déroula de la même façons. On aurait dit qu’une aura particulière était présente dans l’église et sur l’église assemblée ici. Même le curé avait une voix inhabituellement forte et douce à la fois. Gilles commençait à se dire que personne ne remarquait rien.

Et puis, soudainement, le curé remercia l’organiste et demanda à Gilles de venir saluer. Gilles se leva et se tourna vers le public. Le curé le regardait avec des yeux pleins de lumière, et Monsieur Loiseau avec un sourire chaleureux. Mais Gilles ne vit que la jeune femme et son sourire et ses yeux. Il sut alors que sa vie avait trouvé un sens.

Gilles se rassit, posa la partition devant lui, ouvrit tous les registres, même les plus vieux, les cassés comme les vendus, et il plaqua le premier accord avec toute la puissance dont l’orgue était capable.

Il s’attendait à un accord faible mais correct. Le son qui sortit de l’orgue faillit le faire tomber de son banc. Jamais il n’avait entendu une telle puissance. Il laissa l’accord durer quelques secondes puis laissa un silence égal s’installer, dans un duel épique réverbéré sur les murs et les piliers. Le bruit de la foule s’était tu. Gilles appuya alors sur la touche Ré et commença les premier arpèges. L’orgue répondait à la perfection. Gilles ne vit pas le temps passer. Il se laissait porter par l’orgue et la musique. Lorsqu’il plaqua le dernier accord, le même que le premier, sur l’orgue, celui-ci semblait avoir encore gagné en puissance. Il y eut un autre silence. Puis un tonnerre d’applaudissements. Gilles était épuisé et heureux.

Lorsqu’il descendit de la tribune, toute une délégation l’attendait. Le curé l’embrassa, le producteur de la télévision lui laissa sa carte et lui promit une carrière exceptionnelle pour laquelle il se faisait un point d’honneur de l’aider, Monsieur Loiseau lui sourit et Gilles remarqua alors qu’il avait rajeuni. La jeune femme de la boutique de location le regarda et lui prit le bras. En chemin vers sa boutique, elle lui avoua avoir acheté toutes les pièces de l’orgue au fur et à mesure à un Monsieur Loiseau complice de son amour caché. Monsieur Loiseau était parti à Rome avec les cloches et avait rapporté les autres pièces manquantes. Les cloches avaient tout réparé pendant la nuit, sous la baguette magique de Monsieur Loiseau. Miracle ou magie ? Elle ne s’en étonnait pas. Pourquoi aurait-il dû s’en étonner ? Et de toutes façons, il n’eut pas le temps de s’étonner qu’elle l’embrassait déjà. Ensuite, il ne pensa plus à rien d’autre qu’à elle.

samedi 19 avril 2014

Michou Day’s fever

C’est samedi et la chasse aux oeufs de Pâques n’est pas encore ouverte mais c’est Michou Day à Montmartre. Détails ici. Quelques photos pour se souvenir, honorer Michou le roi de Montmartre et du quartier des Abbesses et son optimisme à toute épreuve, teinté de bleu électrique et au pied du Mur de l’Amour.

 

La Star


L’épinglette Collector !!!


Joli micro non ? Et partout où il passe il y a toujours des confettis… bleus of course.



Gros service d’ordre pour éviter les bleus.


 Votre serviteur ;)


Un selfie photographié par d’autres



 Des stars… et de l'amour


Mais aussi plein de photographes et des problèmes de cadrage (voyez-vous Charlie Michou ?


Une Michette, comme on les appelle...


Et une Poulbot car on est à Montmartre, M’enfin !!!