mercredi 10 juin 2015

La gauche et les migrations : un sujet délicat.

Profitant de la torpeur naissante de l'été et des futures migrations de touristes français et étrangers, le gouvernement a entrepris quelques travaux de gauche au sujet de plusieurs types de migrations.

A Paris, la zone entre Barbès et la Chapelle était occupée depuis longtemps par un petit groupe de migrants africains (soudanais pour la plupart) qui n'avaient nulle part ailleurs où aller en attendant leurs droit d'asile. Cette zone sous le métro était bordée d'un côté par la Goutte d'Or et de l'autre par l'hopital Lariboisière. Depuis deux mois cette zone avait été envahie par plein d'autres migrants et la situation était satineraient impossible à justifier. La Mairie et le gouvernement s'étaient donc entendus pour proposer des hébergements de secours à ces migrants, tout en les expulsant de ces lieux insalubres sous le métro aérien. Grosse levée de boucliers des associations locales, un peu démago sur le coup. Grosse contre-mobilisation des socialistes du XVIII° arrondissement, un peu gênés sur le coup, pour rappeler que des solutions meilleures sont proposées. Les migrants, eux, se baladent depuis dans l'arrondissement. Ils étaient ce week-end devant la Halle de la rue Pajol et sont maintenants hébergés dans un "jardin associatif" pas loin. Solution d'hébergement toujours en attente.

Sur cette affaire, les socialistes ont très mal communiqué, réussissant à se fâcher à la fois avec les associations locales de gauche protégeant à tous prix les migrants et avec les politiciens de droite qui ont sauté sur l'occasion pour dénoncer le laxisme du gouvernement. La Mairie est entre deux chaises mais ses explications restent brumeuses. Il ne suffit pas de savoir que gouverner c'est difficile, il faut savoir le faire et communiquer autour...

A Paris, mais au Parlement cette fois, l'Assemblée Nationale a voté un projet de loi (en première lecture) qui supprime les fameux carnets et livrets de circulation pour les gens du voyage. La France était le seul pays au monde à avoir maintenu ce système hérité de l'époque des rois et renforcé en 1969 en pleine ère gaulliste. Il y a bien eu des épisodes de tels carnets dans des situations dramatiques - comme l'apartheid en Afrique du Sud, le génocide nazi ou la gestion par Staline des juifs en Russie - mais la France était unanime condamnée, en Europe ou à l'ONU. Cette suppression est donc plus que symbolique. C'est une vraie mesure sociale, de gauche et humaniste.

Les nomades sont des citoyens français comme les autres, avec un mode de vie différent, c'est tout. Certains en ont fait leur mode de vie principal et y gagnent leur vie, comme les forains par exemple. D'autres ont des ressources officielles qui leur garantissent une vie normale, y compris avec une scolarisation adaptée de leurs enfants. D'autres, enfin, n'ont pas de ressources, mais ni plus ni moins qu'un SDF en ville. L'obligation de les pister à travers ce livret de circulation ou même ce carnet qui demandaient à être visés par les préfectures tous les ans ou tous les trimestres, créait un climat général de suspicion. Des citoyens moins citoyens que d'autres, parce qu'ils ne nous ressemblent pas ?

Les explications techniques sur ces livrets et carnets de circulation sont ici. Elles sont éclairantes sur le degré de gravité des fantasmes qui peuplent les cerveaux de certains. La peur de l'Autre est toujours aussi forte, et la généralisation toujours aussi facile à faire, à coups d'amalgames tous aussi forts les uns que les autres. "Tous des voleurs", "Ils n'ont qu'à rentrer chez eux"... L'histoire des différents peuples nomades en Europe est pourtant longue et riche. Et si certains commettent des délits ou des crimes, la justice doit s'en occuper, comme pour les criminels sédentaires (évidemment bien plus nombreux en volume).


Mais cette loi ajoute quelque chose d'important pour faciliter la vie et l'intégration de ces populations nomades : il s'agit d'organiser leurs accueils, en permettant aux préfectures (à l'Etat donc) de se substituer aux communes qui n'obéissent pas à la loi. Ceux qui ne sont pas d'accord n'ont qu'à voter pour un Etat de droite musclée. Ceux qui veulent continuer à imposer des quotas illégaux et immoraux n'ont qu'à se réfugier dans une commune Front National, quitte à exacerber des tensions déjà fortes.

Il y a des exceptions surprenantes dans le droit français. Souvent issues de régimes autoritaires passés, et jamais remises en question, il faut un certain courage politique pour les détruire et les remplacer par du droit humain et humaniste. On ne dira pas que ce gouvernement n'en a pas. Et tant pis si la droite tempête contre ces lois. S'ils reviennent au pouvoir, ils n'auront qu'à rétablir ces lois iniques. S'ils osent.

Alors oui, quelques mesures de gauche ça fait du bien, même si elles semblent plus délicates que cela à analyser si l'on ne se fie qu'aux discours de comptoirs.

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