mercredi 29 juillet 2015

Rencontre avec les sites de rencontre(s) suite aux décisions de la CNIL

La CNIL est une institution précieuse. Elle n'a pas vraiment de pouvoir mais elle peut nuire à toutes les organisations qui cherchent justement à nous nuire. Evidemment la CNIL est française, donc elle n'a le droit de s'intéresser qu'aux organisations dont le siège est en France, ou dont l'un des sièges est en France.

Le rapport publié hier jette le trouble dans les eaux déjà noueuses des sites de rencontre et les médias se précipitent sur le sujet - un sujet parfait en plein été. Il s'agit de mettre en demeure 13 sites parmi les plus populaires en France à cause de leur légèreté à traiter nos données intimes (8 éditeurs différents en fait). Parmi eux, Meetic, le numéro 1. La CNIL se sert de cet avis pour faire bouger les lignes, en faveur des libertés individuelles, mais aussi pour éduquer le public - inscrit ou non - sur ces sites. Elle publie d'ailleurs sur son site une liste de conseils très utiles, de bon sens, mais de temps en temps ça va mieux en le disant. Les documents officiels sont ici.

Alors j'en profite pour vous livrer quelques réflexions sur le sujet, en ordre dispersé. Chacun et chacune s'y retrouvera :

Le principe de la rencontre en ligne ne pose aucun problème pour les personnes qui savent déjà se comporter en ligne (ne pas dire n'importe quoi, ne pas croire n'importe quoi ou n'importe qui, être honnête avec un écart nul ou faible entre leur personnalité réelle et la personnalité décrite). Ce n'est que des prolégomènes à une rencontre réelle, dans la vraie vie quelles qu'en soient les circonstances. Rester uniquement en ligne risque de vous détacher du contact réel des âmes, des esprits, des corps, des yeux et de tout ce qui fait qu'une relation humaine est ce qu'elle est. Rester trop longtemps en ligne avant de rencontrer physiquement quelqu'un ouvre la porte au danger de la surprise (en général mauvaise) lors d'une rencontre réelle avec la divergence inévitable entre virtuel et réel.

Evidemment il y a des risques mais ils sont maîtrisables. Plus facilement par les personnes solides et de bon sens que par les personnes fragiles, naïves. La confiance et la transparence dont on "doit" faire preuve est une porte ouvert aux agressions de toutes natures. C'est donc un mélange de risque et de sécurité. Là encore, comment construire une confiance partagée sans un minimum de contact direct ? Le virtuel, et les différentes formes d'identité qu'il permet, peut venir enrichir le réel. Mais il peut aussi le combattre et c'est une chose à éviter, pour soi mais aussi face à d'autres.

Il y a site et site. Il y a les sites gratuits qui vous inondent de pub et vendent vos données à la Terre entière, y compris avec des profils ciblés illégaux (cf. les décisions salvatrices de la CNIL) mais également avec des informations clés pour les opérations ciblées de marketing :vous aimez la mer, les promenades, le cinéma, les livres, le sexe, Mandela ou vous êtes à la retraite, gros, sportif, fonctionnaire, cadre, vivant dans telle ville ? Toutes ces informations ont une valeur énorme pour beaucoup d'entreprises. Il y a ceux qui avouent vendre vos données et ceux qui ne l'avouent pas mais le font. Il doit bien y en avoir qui protègent totalement vos données avec l'argument massue que "puisque vous payez on ne vend pas nos données", mais je n'en connais pas. Il est difficile d'établir la confiance avec ce type de site et la CNIL nous le rappelle justement avec force.

Ce n'est pas pour cela qu'il ne faut pas les utiliser si on le souhaite. Ma position personnelle sur le sujet est parfaitement floue compte tenu de mon histoire :
- En tant qu'utilisateur averti de l'Internet je n'y crois pas ou presque pas, car on ne doit pas être géré par des algorithmes et des robots, même sophistiqués.
- En ayant pratiqué Meetic il y a longtemps quelques jours j'ai eu l'impression sauvage et perturbante d'être dans un supermarché dans lequel, moi, j'étais à la fois le client avec des femmes dans les rayons, et le produit (l'homme) dans les rayons voyant défiler des clientes devant lui... Une vision dantesque et difficile à accepter quand on se sent un peu humain, tout en sachant que pendant ce temps le magasin gagne beaucoup d'argent, avec les cotisations, la pub et/ou la revente de nos données personnelles, et je ne sais quoi encore. C'est d'ailleurs pourquoi je refusais déjà à l'époque de payer pour un tel site
- Mais voilà. J'ai rencontré Lisa sur Meetic pendant ces trois jours d'essai gratuit. Et je serais toujours avec elle si ce maudit cancer ne l'avait pas emporté. Alors comment dire du mal d'un site ou d'un système sans lequel je n'aurais pas rencontré la femme que j'aime que j'aimais et que j'ai aimé au premier regard ? C'est évidemment impossible.

Pour voir, suite à la décision de la CNIL, puisque je suis toujours intéressé par les évolutions de l'Internet (et plus si affinités), je me suis réinscrit sur deux sites. Un, étranger (allemand) donc non étudié par la CNIL et payant mais je ne le paye pas, avec des réponses honnêtes et claires sur qui je suis, et l'autre, gratuit dans la liste des sites épinglés par la CNIL avec des infos bizarres pour voir, histoire de prendre le moins de risques possibles. Il n'y a pas de gratuit (sinon c'est vous le produit comme tout le monde le sait). Mais entre trois jours d'essais gratuits, ou même 36 heures seulement, et l'impossibilité de lire ou de répondre à des messages passé le premier "échange", tout est fait pour nous pousser à prendre un abonnement le plus long possible. Un oxymore pour un système dont on est censé sortir le plus vite possible pour passer à la vraie vie. Je précise que sur le site payant, en moins de 12 heures j'ai déjà reçu plein de sollicitations publicitaires que je n'ai pas approuvées, y compris sur d'autres adresses de mon carnet d'adresses ou de mon historique de courriels, comme si celui-ci avait été siphonné par le site sans m'en demander l'autorisation : un parfait exemple de non-confiance. Mais ce site est allemand, alors... la CNIL ne s'en occupe pas. Ils peuvent attendre longtemps avant que je m'y investisse - indépendamment de la qualité ou non des personnes inscrites et qui n'ont pas toujours conscience de l'usage qui est fait de leurs données par de tels "marchands". Le nom du site ressemble un peu à partenariat en anglais et en plus court.

Il est donc difficile d'avoir des idées définitives sur le sujet, car il peut toucher chacun de nous avec force, mépris ou simplement douleur. Réfléchissez-y soigneusement en y étant ou en n'y allant pas. Je n'ai aucun avis à vous donner. C'est trop personnel. Mais si vous y allez, allez-y honnêtement et soyez aussi prudent qu'en traversant une rue. Onvit dans un monde où ces virtualités nous permettent d'enrichir nos réalités. Mais comme il ne s'agit que de préliminaires, encore faut-il qu'ils soient suivis d'actes réels.

PS : ceux qui croient que bloguer est un acte factuel qui n'a rien à voir avec la personne qui écrit le blog sont priés d'aller voir ailleurs ;)

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