dimanche 18 août 2013

Les aventures de Monsieur Gentilliti à Paris - 3

Monsieur Gentilliti est allongé sur un lit taille roi. Il aime bien cette chambre qui correspond tout-à-fait à ce qu'il connaît des hôtels texans : un style plein de décorations et de moulures, avec des meubles visiblement copiés d'anciens et du clinquant tout autour de lui. Il sait que c'est la mode aux États-Unis d'avoir des hôtels imitant des palais du passė et il trouve que cela a du charme. On a l'avantage du beau sans avoir les problèmes liés aux technologies dépassées. Il ne savait pas par contre que ce type d'hôtel existait aussi à Paris et est très heureux d'avoir trouvé celui-ci.

A propos d'hôtel, celui auquel Lucette l'avait amené ne lui a tout de suite pas plu. Trop petit, trop étriqué, pas de distributeur de Coca-Cola dans l'entrée mais un distributeur d'autres choses plus petites qu'il n'a pas eu le temps de comprendre, car Lucette l'a tiré par le bras pour l'entraîner vers l'escalier sombre et étroit.

Un escalier sombre et étroit, qui en plus sent bon l'humidité ? Monsieur Gentilliti a alors réalisé qu'il avait trouvé les conditions parfaites pour le test du biglage de l'autruche. Il s'était arrêté subitement après douze marches et avait attrapé la main de Lucette. Celle-ci, surprise dans son élan, s'était retournée et Monsieur Gentilliti avait alors rapidement biglé le nombril de Lucette avec son index droit tandis qu'il fermait ses yeux de la main gauche.

Le test de l'autruche biglée demande des conditions très particulières pour être pratiqué sur un humain. Il doit son origine à un autre missionnaire de Biti, gloire à lui, qui avait atterri en Australie et qui avait réussi à transformer en espions Bitis un troupeau d'autruches agressives, temporairement aveuglées par une éclipse de soleil et dont les ventres rebondis l'entouraient pour mieux l'étouffer. Toutes les autruches avaient été instantanément converties. Malheureusement, des espions autruches ne servaient pas à grand chose sinon à avaler tous les documents secrets qu'elles trouvaient, et elles n'en trouvaient quand même pas beaucoup... Lorsque ce missionnaire, Monsieur Bigliti, avait essayé cette même manipulation sur des humains, il avait dû l'adapter. Et le taux de réussite était assez faible. Mais le test était fiable, si l'on visait bien le nombril.

Lucette parut un instant surprise avant de disparaître avec un "flop" caractéristique. Monsieur Gentilliti fut un peu déçu car il avait trouvé Lucette agréable et son nombril facile d'accès. Un échec ! Tant pis, se dit-il. Une de perdue, dix de retrouvées, ce qui était l'exact inverse de la probabilité de réussite du test. Il réfléchit quelques instants et décida de ressortir de cet hôtel qui ne lui plaisait pas, de toutes façons. Le problème avec ce test, c'est qu'on ne pouvait jamais savoir avant ce qui allait se passer. Les savants de Biti travaillaient sur un test de pré-biglage mais les résultats étaient encore moins convaincants. L'autre problème avec ce test était qu'on devait prendre le candidat par surprise et que si ça ratait on ne pouvait plus s'excuser. Personne ne savait où partaient les personnes ainsi biglées, mais il y avait une légende qui disait qu'elles se retrouvaient toutes dans un paradis exotique et qu'elles étaient très heureuses. Monsieur Gentilliti ne croyait pas trop aux légendes, mais il espérait que celle-ci était vraie ou à peu près vraie. Après tout, c'était son premier biglage et il se sentait un peu coupable.

Une fois dehors, Monsieur Gentilliti s'était senti perdu, une fois encore. Le paysage ne lui plaisait pas. Il faut dire que la rue Saint-Denis entre chien et louve est plutôt une rue torve. Il avait sorti sa carte d'or et la regardait avec tristesse. Il aurait été tellement plus heureux au Texas, autour de cette piscine, avec toute cette humidité et tous ces nombrils autour de lui. Soupir... Mais on ne récure pas une poêle brûlée, comme on dit sur Biti, gloire à lui. Il appuya alors machinalement sur le logo de la BB (la Banque de Biti, gloire à lui), sa carte s'ouvrit comme un livre et Monsieur Gentilliti se sentit tout bête. Mais oui, évidemment. Sa carte contenait le manuel du parfait missionnaire. Il y avait sur la première page la liste des hôtels où aller et un mode d'emploi pour appeler un taxi ! Monsieur Gentilliti se dit : "Je suis bête !" Et c'est vrai que Monsieur Gentilliti était bête, sinon on ne l'aurait pas choisi pour cette mission. En fait le doigt de Monsieur Grositi13 n'avait pas dérapé !!! Monsieur Gentilliti avait été envoyé exprès à Paris pour tenter d'y recruter des espions, alors que toutes les missions précédentes s'étaient soldées par des échecs. Biti, gloire à lui, savait très peu de choses sur Paris.

Monsieur Gentilliti se trouva tout ragaillardi par la découverte de cette liste d'hôtels. Il héla donc un taxi en beuglant très fort "Taxi" et en sifflant en même temps car il était doué pour des choses sans importance. Deux taxis arrivèrent dans la seconde. Les chauffeurs commencèrent à s'insulter et à se bagarrer pour avoir le droit de conduire ce riche touriste. Commençant à s'impatienter, parce qu'il n'avait pas que ça à faire, Monsieur Gentilliti profita du débraillage d'un des chauffeurs pour le bigler. Mais ce fut un autre échec, ce qui eut quand même pour effet positif de calmer instantanément l'autre chauffeur qui commença à regarder Monsieur Gentilliti avec un respect interrogatif, mélangé d'une crainte saine et d'un mépris souverain qui font le vrai chauffeur de taxi parisien. En deux temps et trois mouvements, Monsieur Gentilliti fut installé dans le taxi et le chauffeur mis sur la voie de l'hôtel indiqué par son client, le premier sur la liste. Monsieur Gentilliti, ne voulant pas faire d'impair, lui avait en effet montré la liste, car il se sentait peu confiant dans sa prononciation française.

Malheureusement, Monsieur Gentilliti s'était trompé de page et c'est comme ça qu'il se retrouva au Château de Versailles, à la nuit tombée.


Monsieur Gentilliti trouva cet hôtel un peu grand quand même, mais on ne le décourageait pas facilement. Après quelques palabres avec deux vigiles, une jolie guide, deux touristes japonais, et autant de flops de biglage, il se retrouva dans la chambre du roi et trouva le décor à son goût.

S'étant déshabillé, Monsieur Gentilliti est donc maintenant étendu et regarde le plafond. Cet hôtel est un peu loin et un peu grand mais il lui plaît bien et il le recommandera à son retour. Dès demain, il commencera vraiment ici sa mission !

Monsieur Gentilliti s'endort comme un bébé blurve en soufflonnant. Il rêve et repart sur Biti, gloire à lui. Il y vit des aventures cocasses et délirantes, époustouflantes même, mais qui n'ont aucun intérêt pour un terrien. Nous n'en parlerons donc pas ici.

Lorsque le gardien de nuit lui pose la main sur l'épaule, pour le secouer d'un air scandalisé, monsieur Gentilliti est frais et dispos. Il a le temps de le bigler avant que le gardien ne cligne des yeux, et "Bing" Gustave Duchemol devient le premier espion Biti en France !!! Monsieur Gentilliti est un peu étonné mais très content. Gustave aussi est surpris.

Mais comment est-ce possible ? Comment un espion français a-t-il pu être trouvé après tous ces échecs ? Qui est Gustave Duchemol ? que vont-ils faire maintenant ? De quelle couleur est le ciel ?

Vous le saurez au prochain épisode !

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