lundi 31 octobre 2016

Horrible Halloween

Halloween. Réjouissances tristes entres bonbons déguisements et fêtes. Une fête anglo-saxonne dérivée de la Samain celte, devenue un festival de marchandisation. 

Rien de tel pour moi cette année. Ma sœur chérie est morte cette nuit. 

Silence amour et paix. Baisers sourires et larmes. Recueillement colère et soulagement. Tristesse. Immense. Noyée d'eau couleur de larmes et de Méditerranée couleur de tasoif. Ma vieille sœur qui avait 'tuit ans depuis si longtemps. 

Nous avons jeté aujourd'hui quelques roses dans la mer. Une autre mer mais une mer quand même. Une mer dont nous sommes tous issus et où nous retournerons tous, plus qu'à la poussière des religions arides d'un Moyen-Orient desséché et désertique. Vive la mer. Vive les collines au-dessus. Vive le soleil. Vive la vie. 

Saint-Raphaël n'aura plus jamais la même couleur sans toi, ma Véra. Mais tes couleurs illumineront toujours nos yeux. Tu as appris le combat de la vie à tous ceux qui sont venus à toi. Le sourire compatible avec la force, l'énergie avec le caractère, le vrai du cœur avec les drames de la vie. Les inconnus qui liront ce billet ne savent pas. Mais les connus savent. 

Ma soeur fut dès le premier jour une lectrice assidue de ce blog. Une critique littéraire aussi. Un blog qui était un moyen de lui passer quelques messages subliminaux de temps en temps. Je continuerai car l'éther-net existe forcément.

Ma soeur était une seconde mère pour moi. Que ces mots sont durs à écrire. Mais ils sont vrais. On n'oublie pas ses mères. 


Ma soeur lorsqu'elle avait 'tuit ans

dimanche 30 octobre 2016

Du temps de cerveau pour... un roman - chapitre un


Chapitre Un

Je me rappelle ce premier moment où je suis entré dans le bureau du coordonnateur. J'avais deux ans.

Depuis que le monde est Monde, les coordonnateurs en sont les maîtres. Personne ne sait combien il y en a. Quand on en discutait, enfants, le nombre n'était pas un sujet. J'ai toujours cru à l'époque qu'il n'y avait qu'un coordonnateur puisqu'on n'en parlait qu'au singulier et que c'était comme une sorte de divinité inexplicable et impossible à rencontrer. Nos superviseurs étaient, par contre, très nombreux et ils changeaient tout le temps.

Je ne me souviens plus des premiers superviseurs qui se sont occupés de moi. Qui s'en souvient ? C'est comme si nos mémoires détaillées commençaient à deux ans. La garderie où je suis né et où j'ai vécu ces deux premières années était comme toutes les autres garderies. Je ne sais même pas où elle est située. Elle pourrait être à quelques kilomètres d'ici où à des années lumières. Qui se soucie de ses origines ? Depuis, on m'a expliqué la reproduction humaine. C'est une histoire dégoûtante et je ne connais aucun autre enfant qui ait envie d'en passer par là. Bien sûr on en a parlé, le soir dans les dortoirs. Les plus grands avaient toujours l'air informés mais on se rendait vite compte qu'ils disaient n'importe quoi. Aujourd'hui en tous cas, je le sais, du haut de mes dix ans.

Deux ans. Deux ans de cohabitation avec les autres enfants non sélectionnés. Deux ans c'est court, heureusement, mais c'est long aussi, surtout quand on doit supporter des enfants colériques ou qui ne faisaient pas ce que je voulais. Les superviseurs flottaient autour de nous pour surveiller tout cela et empêcher les plus grosses crises. Mais ils ne pouvaient pas tout contrôler. Nos jeux étaient bêtes mais ils impliquaient forcément de tromper ces superviseurs. Nous avions appris très tôt qu'ils étaient jetables. Dès qu'un problème survenait qu'ils n'avaient pas réussi à prévenir, ils disparaissaient et étaient remplacés. Ce tourbillon de superviseurs était incessant. C'était devenu un challenge entre nous, à celui ou celle qui arriverait à faire disparaître le plus vite possible tel ou tel superviseur. Je n'en ai plus de souvenir précis, mais je sais que j'étais très doué à ce jeu.

Maintenant que j'y repense, je me rappelle quand même ce moment, juste avant de quitter la garderie. Je devais avoir tout juste en-dessous de deux ans, puisque c'est la règle. Je jouais avec d'autres enfants dans l'une des salles de jeux, la salle du son. Depuis, on m'a expliqué qu'il y avait une salle pour chacun des sept sens dans chaque garderie dans le Monde entier. J'en ai déduit que je devais passer plus de temps dans la salle de l'audition, puisqu'ils m'ont choisi.

Je jouais donc dans le labyrinthe de la musique. Un labyrinthe tout simple, pour les bébés, pas comme celui que j'ai créé depuis. Un petit labyrinthe où chaque mouvement à gauche ou à droite faisait descendre où monter la tonalité et où les portes apparaissaient où disparaissaient selon que votre musique était harmonieuse ou pas. Simpliste, non ? Une autre époque, déjà si lointaine... J'étais seul dans le labyrinthe à ce moment là, avec un superviseur évidemment qui m'observait. C'est là que j'ai eu l'idée de le faire disparaître. Je suis allé vers lui, tout droit, sur fond d'une unique note continue qui a cessé dès que j'ai quitté le labyrinthe et je lui ai pris la main. Je savais déjà qu'ils ne pouvaient rien nous refuser. Qu'ils ne devaient sous aucun prétexte nous influencer ou nous refuser quelque chose. Alors je l'ai emmené avec moi dans le labyrinthe. Il était à côté de moi, visiblement gêné mais m'accompagnant sans résistance. Nous sommes entrés dans le labyrinthe et j'ai commencé ma danse de musique, harmonieuse évidemment, puisque la musique est en moi. Il mimait tous les mouvements, bien obligé. La porte est apparue et je l'ai brutalement poussé dedans. Il y a eu un grand accord plein de fausses notes, un cri dissonant. La porte s'est refermée au moment même où il passait à travers.

Une partie est restée avec moi, le bas, avec ses roulettes et ses moteurs, tandis que la partie adulrobot disparaissait dans le néant. Je suis resté quelques secondes immobile, pour faire disparaître la dissonance. Juste le temps nécessaire pour qu'ils envoient un autre superviseur. Les autres enfants m'ont regardé en souriant. Une petite victoire. Je me souviens encore de ma fierté à ce moment.

En fait, je pense que ce souvenir est à placer la veille de ma première visite chez le coordonnateur. La veille de mon deuxième anniversaire. Car c'est le lendemain matin que le superviseur du moment est venu me chercher dans le dortoir. Je paressais devant ma petite console à regarder des dessins vivants diffusés sur le Réso. Il m'a suggéré de m'habiller avec de nouveaux habits. Je les ai regardés avec surprise. Une belle combinaison blanche, éclatante de lumière et d'irisations. Une combinaison de "grand", comme on en voyait de temps en temps sur le Réso. Je l'ai enfilé avec plaisir. Cela me changeait un peu des habits de bébé, informes et pleins de couleurs ternes. Elle m'allait parfaitement.

Il m'a pris par la main et m'a conduit à travers les couloirs vers une porte que je n'avais jamais franchie. La porte divine, comme nous l'appelions. La porte qui menait au Coordinateur si mystérieux. Ce superviseur n'avait rien dit, à part "Habille toi" et "Bon anniversaire Kiks". Mais quand nous sommes arrivés devant cette porte, il m'a regardé et a dit "Adieu Kiks, bonne chance". Son regard m'a vrillé et il a appuyé sur une plaque à côté de la porte. Elle s'est ouverte.

J'ai vu ses yeux briller et je les ai regardés intensément. Les adulrobots ne pleurent pas, c'est bien connu, me suis-je dit. Et pourtant... Les siens avaient vraiment l'air vivants. C'est à ce moment que j'ai eu l'intuition que tous les superviseurs n'en faisaient qu'un, qu'ils partageaient tous la même mémoire. Sur le moment j'ai trouvé cette idée à la fois folle et évidente. Une idée qui ne m'a jamais quitté, et dont je n'ai jamais parlé à personne. Une idée invérifiable, à la fois logique et invraisemblable. Je n'ai pu dire que "Merci superviseur" puis j'ai franchi la porte. J'ai entendu un soupir derrière moi et j'ai compris deux choses : que ce superviseur serait remplacé par un autre puisqu'un sentiment était forcément une erreur pour eux ; et que je ne le reverrai plus jamais, ni lui ni aucun superviseur qui partageait ses souvenirs. Comme si, une fois cette porte franchie, un cordon ombilical était coupé entre ma prime enfance et le reste de ma vie.

Devant moi, un couloir blanc s'arrondissait vers la droite. La porte s'est refermée et j'ai avancé. Blanc sur blanc, je me sentais à la fois une partie du décor et le centre du monde. Le couloir continuait à tourner. J'ai continué à avancer. Au jugé j'ai eu l'impression de parcourir plusieurs fois un cercle, ce qui était bien sûr impossible. J'aurais dû me retrouver face à un mur ou à une porte. Mais le couloir continuait, avec sa courbe immuable. J'ai commencé à courir mais le couloir tournait toujours.

Puis je me suis arrêté. J'ai fermé les yeux un instant. Je ressentais un vertige inédit et quelque chose en moi battait très fort. Mon coeur. J'ai rouvert les yeux et une porte était ouverte devant moi, noire sur le blanc éclatant. Je suis entré. Le noir était total, à part le rectangle de la porte que je venais de franchir. Un rectangle blanc qui n'éclairait que lui-même. Le rectangle blanc est devenu de plus en plus étroit au fur et à mesure où la porte se refermait. Au moment précis où la porte s'est enclenchée, la lumière s'est allumée et j'ai découvert la pièce où j'étais.

Je sais que je vais me retrouver dans cette pièce dans quelques instants. Je n'y suis pas venu souvent, entre cette première fois le jour de mes deux ans et aujourd'hui, après ce concert et mon prélude, quelques semaines après mon dixième anniversaire. C'est une pièce rectangulaire sans décor, avec juste deux fauteuils. Une couleur gris clair indéfinissable et changeante, comme les fauteuils. Pas d'indication de porte. Le Coordinateur est assis dans un fauteuil. Il est habillé de la même combinaison que moi, mais grise comme la pièce. Même sa peau a l'air grise, comme ses cheveux. Je pense que s'il ne bouge pas, on peut ne pas le voir tellement il se confond avec le décor.

Mais il bouge la main droite et me montre l'autre siège. Il sourit. Je m'assois.

- Bonjour Kiks. Sa voix est grave, très grave et pleine d'harmoniques.
- Bonjour monsieur le coordinateur. Ma voix est à la fois rieuse et apeurée. J'ai deviné qu'il était Le Coordinateur et je suis effrayé par cette confrontation tout en étant très fier d'avoir deviné.
- Ah, Kiks, je vois que ton dossier ne ment pas. Tu es intelligent...

Il me regarde intensément. Ses yeux gris sont totalement humains comme les miens. Cela me fascine. A part les autres enfants, je n'ai jamais vu d'humain en vrai. Juste des superviseurs plus ou moins adulrobots. Et même quand ils ont des yeux humains, il leur manquait toujours cette force. Je réfléchis à la situation. Si le coordinateur est humain comme moi, est-il divin ? Il n'a pas contesté être coordinateur. Suis-je un dieu aussi ? Ou alors, si le coordinateur est humain, peut-il y en avoir plusieurs ? Mon cerveau fonctionne à plein. C'est fascinant. J'ai envie de poser plein de questions.

- Kiks ? Sa voix perce ma réflexion. Je m'ébroue
- Monsieur ?
- Kiks, tu ne m'as pas entendu ?
- Non désolé, Monsieur, excusez-moi, je rêvassais. Mon excuse est piteuse, mais il faut que je l'écoute. Je réfléchirai ensuite.
- Tu rêvassais ? Non je ne crois pas, Kiks. Tu te demandes qui je suis ?
- Non Monsieur, vous êtes... euh... coordonnateur. J'ai bafouillé. Je n'ai pas dit Le coordonnateur, ou un coordonnateur. J'ai hésité. Je m'en veux. Il me regarde fixement.
- Coordonnateur ? Oui je le suis. Tu as raison. Combien de coordonnateurs crois-tu qu'il y ait ?

Je suis tombé dans le piège. A peine quelques instants devant lui et je suis face à une question à laquelle je n'ai pas de réponse certaine. Que répondre ? Si je tombe à côté, que va-t-il m'arriver ? J'ai subitement la certitude que de ma réponse va dépendre toute ma vie à venir. Que répondre ?

- Kiks ? Sa voix est insistante. Je dois répondre vite. Je décèle dans sa vois un rire étouffé. Cela me rassure un peu. Il y a peut-être uns solution.
- Vous êtes le premier coordinateur que je vois, Monsieur le coordinateur.
- Ah ! Il sourit. Une bonne réponse ? Pourtant je n'ai pas répondu directement.

Il se tourne légèrement et je vois alors une petite étiquette sur son bras. Une suite de 7 caractères comme mon nom complet, kiK6D8n. S'il a une étiquette, c'est qu'il est comme moi. Ce n'est pas 0000001 ou Aaaaaaa qui est écrit, mais une combinaison banale. A7opP8Z. Elle commence certes par un A mais j'ai déjà vu des enfants pareils.

- Il y a beaucoup de coordinateurs, Monsieur, mais comme vous êtes le premier que je vois, vous êtes le plus important pour moi. Ma formulation est un peu alambiquée, mais elle est logique. J'espère qu'il l'appréciera.
- Je vois, je vois, dit-il, oui c'est une réponse acceptable.

Il se lève et prend une feuille blanche sur une table grise que je n'avais pas vue, tellement elle se confondait avec le mur. Il la regarde quelques instants.

- Ton dossier est remarquable. Tu as été le meilleur dans tous les domaines, tu sais ? Et en musique tu est particulièrement doué. Ca te plairait d'étudier la musique ?
- La musique, Monsieur le coordinateur ? J'aime la musique. Et elle m'aime aussi.
- Elle t'aime ? Jolie formulation, mon petit Kiks. Jolie formulation. Il sourit.

Il sort un stylux gris d'une poche et trace un trait sur la feuille, puis il la repose sur la table à côté de lui. Une autre table ? Décidément cette pièce grise est pleine de surprise. Je regarde autour de moi, cherchant à identifier d'autres formes dans ce gris mouvant qui m'entoure. Mais c'est difficile et je n'arrive à voir que ce que j'ai déjà vu.

- Kiks ? Tu rêvasses encore ? Sa voix me réveille. Il faut absolument que je me contrôle.
- Non Monsieur, je regardais la pièce. Elle est surprenante.
- Surprenante ? Oui tu as raison, je suppose, quand on la voit pour la première fois. Mais tu y reviendras, Kiks. Tu y reviendras... plus tard. Maintenant, file !

Il tend le bras et je me lève automatiquement. Un rectangle noir se détache sur le mur gris. Je baragouine un "Au revoir, Monsieur le coordinateur" et je passe la porte. Comme tout à l'heure tout est noir autour de moi. Puis la porte se referme et un couloir blanc s'ouvre devant moi. Il s'arrondit vers la droite. Je décide de ne pas avancer. A quoi bon ? Je ferme les yeux un instant et les rouvre. Une porte est devant moi. Je le savais.

Je la franchis. La vie est une succession de portes, me dis-je. Je n'ai que deux ans mais je sais déjà cela. Que me réservera cette porte ? Je sens simplement que je vais passer plusieurs années dans ce nouvel endroit. Combien ? Je ne sais pas à cet instant précis. J'y passerai 7 ans. Jusqu'à mon neuvième anniversaire. Mais c'est une autre histoire. Je suis maintenant une nouvelle fois devant la porte qui me conduira au Coordinateur et j'ai dix ans. Que va-t-il se passer ?

samedi 29 octobre 2016

Abeilles mourantes

Congrès français de l'apiculture en Auvergne. Les abeilles se meurent un peu partout avec un taux de mortalité qui explose (de 5 à 30% en vingt ans). 

Il y a de multiples causes à cette mortalité. La première reste les pesticides, de Monsanto et de Bayer (qui a racheté Monsanto) ou d'ailleurs. Un petit effet à court terme pour de grands effets à long terme. Les abeilles, l'insecte pollinisateur par excellence, sont en effet indispensables à la reproduction de nombreuses plantes essentielles pour notre alimentation, directement ou non, par exemple pour celles que les animaux que nous mangeons mangent. 

Il y a d'autres causes moins connues, comme les antennes 4G de nos jolis téléphones qui désorientent les abeilles et les empêchent de tracer la route entre ruche et fleurs. Les apiculteurs voient eux leur chiffre d'affaire baisser. Pour une ruche donnée, il faut laisser une quantité suffisante de miel aux abeilles pour l'hiver, sinon c'est un génocide. Seul le surplus peut être exploité par l'homme. Quand il y en a...

Alors quelles solutions ? GreenPeace pose la bonne question dans ce film passablement effrayant. Effectivement, pourquoi essayer de créer un nouveau monde sans abeilles plutôt que de réparer l'actuel ? Un message impeccable à regarder absolument. 

À Harvard, quelques scientifiques ont mal compris le film. Ils essayent de créer de vrais robots abeilles. Les USA sont le pays du paradoxe assumé, pour les abeilles aussi. Monsanto et son Roundup sont connus et reconnus (sauf par eux et leurs sous-traitants) pour tuer les abeilles, mais en même temps les abeilles viennent d'être enfin reconnues comme une espèce en voie de disparition par l'autorité americaine, une première. À Harvard, on croit au scientisme qui va sauver le monde. Pesticides, OGM et abeilles-robots : un mauvais roman de SF. 

O

Aux USA et au Canada la situation se dégrade aussi beaucoup. Le CETA qui sera finalement signé ce dimanche prévoit-il l'export de miel ?


L'époque de Maya est bien lointaine...







vendredi 28 octobre 2016

Nostalgie, régression et avenir

Le temps nous joue des tours en cette fin de semaine avant un long week-end. Le temps qui passe, pas le temps qu'il fait.

La Toussaint c'est le temps du souvenir pour nos chers disparus. Attention à ne pas glisser sur les feuilles mortes dans les cimetières non balayés, vous n'êtes pas aussi pressés que ça de rejoindre vos parents non ? Il est vrai que la Toussaint est devenue la fête des morts-vivants avec Halloween. Les joueurs de Pokémon Go et autres jeux sauront de quoi je parle puisqu'il y a des promotions partout sur ces jeux pour attirer le chaland dans ce qui est aux USA une fête Hallmark, ce vendeur de cartes et papiers (orange) qui inonde le marché d'objets bizarres.

En ce moment, il y a la Paris Games Week, pour le présent et le futur des jeux vidéo comme on continue à les appeler en attendant d'appeler tout ce monde les e-sports... Prévoir des heures de queues pour accéder à une vraie console. Ce salon attire de plus en plus de monde. Des jeunes évidemment et des moins jeunes qui sont nés dans le jeu vidéo, il y en a de plus en plus puisqu'on parle de la tranche solvable des 15-35 ans. Quelques parents, aussi, noyés dans la masse et venus accompagner leurs "petits" qui ont grandi plus vite qu'ils ne le voient. Comme chaque année, il y a un coin rétro avec des consoles d'il y a vingt ou trente ans, pour les adulescents (sans faute) et ceux qui préfèrent les gros pixels. D'ailleurs tous les fabricants de consoles ressortent leurs premiers modèles puisqu'il y a un marché, en boucle comme pour la mode, lorsque les grands ont des enfants.

Eternel problème de la technologie appliquée aux jeux : comment garder une part de rêve, d'histoire qui nous entraîne, lorsqu'on passe son temps à imiter de plus en plus la réalité ou à l'enrichir ? Le plus simpliste des jeux peut contenir plus de beauté et d'imagination que des réalisation hyper-sophistiquées. Et le souvenir de ses premiers jeux marque à jamais une vie de joueur, c'est bien connu. Notons aussi un phénomène intéressant en termes de sociologie des joueurs. Il y a eu la période où on jouait seul, puis à plusieurs manettes autour du même écran, puis en réseau avec ses potes chacun devant son écran, puis dans des grands réseaux mondiaux en réseau sans vraiment connaître personne. Régression ou progression ?

A propos de régression, il y a aussi le Salon du chocolat. Après être passé dans les halls 1 à 3 de la porte de Versailles, pourquoi ne pas venir au hall 5 pour y regarder du chocolat (et en acheter pour en manger) ? Idée pour les parents : laissez vos gamins près des jeux et allez au chocolat, sans avoir honte d'être un mauvais parent. A moins que vous ne préfériez le contraire ? En tous cas, il y a plein de choses à voir sans toucher, comme ces fameux défilés de robes en chocolat.

Posture Choco-zen, Om Mani Padmé Oum Miam

C'est quand même un salon commercial avant tout. Mais je me souviens encore de la première machine à concher que j'ai vu fonctionner au musée du chocolat à Vevey en Suisse (le siège de Nestlé). Je suis resté scotché devant ce chocolat en mouvement... Voici une vidéo avec une machine moderne, mais je vous laisse imaginer le mouvement lent de conchage dans la machine originale...



Nostalgie ? Depuis combien de temps n'êtes vous pas allé dans une bibliothèque (à Paris) pour le grand public ? En ce moment il y a le festival Numok dans une quarantaine d'entre elles. Impressions 3D, tablettes, machins assistés par ordinateur, animations modernes dans des lieux qui sont avant tout des lieux de diffusion (et qui ne sont plus depuis bien longtemps des lieux de conservation). Un pendant utile au salon du jeu vidéo, non ?

Nostalgie numérique. Eh oui, déjà. Twitter a annoncé l'arrêt de Vine dans le cadre de ses compressions de dépenses et aussi parce que Snapchat et Instagram sont passés par là. Vine c'était ce format de vidéos de 6 secondes, devenu très créatif avec le temps. Quelques beaux Vine ici, par un nostalgique.

Nostalgie papier enfin. Plus de Pariscope dans les kiosques depuis cette semaine. Vous ne trouverez que l'Officiel (à Paris). La fin d'une époque... depuis 1965... L'Internet a définitivement gagné et le téléphone a remplacé le papier sur ce coup. Finies les pubs insérées dans les pages de cet hebdo, y compris celles à la limite de la légalité pour des bars louches ou des spectacles pour adultes blets (sinon pourris).

Quand à la nostalgie politique, n'en parlons pas. Elle n'est pas intéressante ;)

jeudi 27 octobre 2016

Quel François ?

La gauche fête le centenaire de Mitterrand qui aurait donc eu 100 ans hier s'il avait survécu à l'Union de la Gauche. La droite aussi, pour rappeler qu'il ne faisait pas consensus.

François, notre président actuel, aussi bien sûr fête cet anniversaire, discours souriant et auto-satisfait ici. L'occasion est trop belle de faire des parallèles à quelques mois d'une primaire puis d'une élection présidentielle. La presse regorge de comparaisons (bonnes ou mauvaises) et d'analyse des mots à demi-mot du discours hommage de François l'actuel.


Le temps d'abord. 1981, c'est un temps que les moins de vingt ans n'ont pas connu. Pas la bohème. 35 ans depuis son élection, disons donc qu'en dessous de 35 ans aujourd'hui on ne sait plus vraiment qui était ce président unificateur des gauches. La plupart des gens aujourd'hui le voient d'ailleurs comme un personnage historique plutôt que comme un homme politique, genre De Gaulle. Je n'ai pas dit Giscard car il est encore vivant parait-il, tant mieux pour lui et sa famille fleurie, même s'il a été président juste avant Mitterrand.

La durée ensuite. 14 ans c'est beaucoup, puisqu'on raisonnait en multiples de 7 à l'époque et que Mitterrand a été le président le plus longtemps au pouvoir dans cette République quinte. On a parlé de génération Mitterrand. Un score inatteignable aujourd'hui puisque dix ans est le maximum, si jamais un président arrive à se faire réélire.

La génération justement. Lorsque la gauche est arrivée au pouvoir, toute une génération de "brillants" politiciens de gauche a enfin pu respirer, car ils allaient pouvoir à leur tour exercer des fonctions politiques. Depuis, c'est un enchaînement de va-et-vient entre les cohabitations avec l'opposition ou les emmerdements entre branches d'une même "majorité". Les combattants de l'époque étaient souvent des jeunots. Beaucoup sont encore au pouvoir, même si cela s'éteint progressivement dans notre modèle pourtant très gérontocratique en France. A l'époque, les jeunes énarques étaient pleins d'illusions. Et le classement initial n'est pas forcément le même que celui d'aujourd'hui (et je ne parle pas du classement de sortie de l'ENA). Ségolène était mieux placée que François à l'époque, par exemple.

L'amour ensuite. Mitterrand a été fortement détesté par de nombreux concurrents ou amis. Le pouvoir entraîne automatiquement ce genre de sentiments. Certains y résistent mieux que d'autres et entre les deux François il n'y a pas photo, quels que soient les gesticulations d'aujourd'hui. L'amour et l'autorité peuvent aller ensemble. Il y a plusieurs formes d'autorité et les deux François en ont certainement eu leur dose. L'amour des femmes, l'amour du peuple, avec des durées variables et une inconstance constante à moins que cela ne soit une constance inconstante. L'autorité ferme ou molle, la manière de mobiliser des fidèles ou de les faire fuir à tour de rôle. Leur désamour commun des journalistes, mais avec des façons différentes de leur parler, autre temps autres moeurs, l'Internet n'ayant commencé à vraiment exister qu'à la fin du règne de Mitterrand.

Alors quand notre François d'aujourd'hui essaye de nous entraîner grâce au François d'hier, on ne peut que le regarder piteusement, avec une tendresse désabusée. Il n'a pour le sauver que la médiocrité des autres vieux, puisque les jeunes sont interdits de pouvoir par le système. Pas de quoi se réjouir, face à cette classe politique vieillotte et radoteuse, d'une extrême à l'autre en passant par le ventre mou des partis de gouvernement. La notion même de centenaire nous fait plonger dans l'Histoire et ses critiques, de l'exégèse à l'enterrement.

Arrêtons-nous vite là. Pourquoi autant parler du passé ?

C'est un peu comme quand on marche et qu'on a un engourdissement d'une main dans le froid, la main gauche évidemment. On continue à avancer mais on pense à cette partie de soi-même qui est en retard, comme arrêtée dans le temps. Et à force on ne pense plus qu'à cette main gauche comme si c'était la plus importante dans le monde. Au risque même de nous empêcher d'avancer. Et de regarder devant. C'est ça les commémorations. Le danger de figer quelque chose qui n'avance plus. Au risque de s'immobiliser soi-même ou de vouloir s'aveugler avec des illusions du même type que celles qui ont bercé le début de notre carrière politique.

N'est-ce pas, François ?




mercredi 26 octobre 2016

Egalité des genres ? Vraiment ?

Pas encore, en fait.

Le WEF (le machin de Davos) s'est penché sur la question comme chaque année. Résumé ici de son rapport annuel là. La situation de l'égalité hommes-femmes recule.

L'Islande reste le meilleur élève en numéro 1, et la Slovénie et le Nicaragua sont dans le Top 10 avec aussi les plus grands progrès. En termes de progrès, d'ailleurs, la France qui est 17ème (mais devant les britanniques et les US) se classe 5ème en progrès, juste devant le Cameroun. (Indice : est-ce grâce à Bolloré qui gère les transports par fer dans ce pays où un grave accident vient de se produire à cause d'une mauvaise gestion de la ligne en pleines pluies ?). Les chiffres détaillés, au plan mondial, montrent que la situation se dégrade en général dans l'égalité économique et qu'on est revenus à la situation de 2008. Pas brillant, hein ? Evidemment, dans l'éducation, ça progresse, mais ça régresse dans le porte-monnaie.

En France, quelques chiffres clés : 51,5% de femmes en France. En éducation, on est très bon, avec un 55% de femmes par exemple dans le supérieur. En politique, sans surprise, c'est la catastrophe : pas sur le plan des ministres grâce à François, mais au Parlement essentiellement sans compter l'absence de femme comme "patronne" politique. Et en économie ? Une autre cata, -28% en moyenne sur les revenus pour les femmes, surtout chez les "cadres" et un ratio calamiteux pour l'égalité des revenus à travail égal qui nous place 134èmes sur 144...

L'Islande a (re)fait parler d'elle lundi, avec une autre grève des femmes. Elles se sont arrêté de travailler à 14h38 au lieu de 17h, pour marquer symboliquement l'heure au-delà de laquelle elles ne sont pas payées comme des hommes. Une opération qui dure depuis 1975, tous les cinq ans à peu près, à la date du jour des droits des femmes en Islande. 14h08 en 2005. Elles n'ont gagné qu'une trentaine de minutes. Terrible, non ? Même pour le pays le mieux classé globalement. Y'a du boulot. Et en France ? Selon Libé, c'est la même heure qu'en Islande ! Mais une grève de femmes suivie à 90% ce n'est pas dans nos traditions. Dommage.

Et sans parler de cette étude d'une association américaine de femmes universitaires qui prédit, à ce rythme, la fin des inégalités hommes-femmes en 2186 si on ne change rien... Etude sur les USA.

mardi 25 octobre 2016

Insultes

Les politiciens adorent les injures, quoique certains plus que d'autres. 

Aujourd'hui petit cours d'anglais avec cette double page dans le New-York Times recensant les injures balancées par Donald Trump et ses cibles. Détails ici



L'imagination injurieuse est sans bornes. On dirait presque un slam poétique. Il y a d'autres insultes politiques célèbres ici par exemple. 

Et en France ? François, malgré sa fonction, est un grand receveur d'insultes comme : 



Mais il faut des envoyeurs d'insultes aussi, sans tomber dans le syndrome Haddock. Et il y en a ! Je vous laisse choisir lequel est votre préféré. Mélenchon ? 

Heureusement, il y a des universitaires (en Savoie) pour analyser tout ça. Il y en a pour tout, donc pour l'insultologie, si, si, je vous jure. Il ne faut pas jurer ! Ah bon ?... Car c'est une science !

En tous cas, et pour reboucler sur Trump, l'insulte en dit toujours plus sur celui qui la prononce que sur celui qui la reçoit comme le casse-toi pôv'con de Sarkozy. 

lundi 24 octobre 2016

Critique culinaire - Le P'tit Vélo

Grande première. J'inaugure ici une rubrique culinaire. J'en profite pour rappeler que ce blog n'a pas de pub ni de sponsor et que j'y dis ce que je pense. Pas de pub cachée non plus ou de "placement produit", je ne suis pas une youtubeuse de mode.

Ouverture donc dans mon quartier d'un nouveau restaurant, Le P'tit Vélo, dans le haut 9ème, 24 rue de Vintimille. On n'est pas loin de la Place Clichy ou de la Place Blanche, mais c'est un quartier calme de bureaux et de bourgeois et comme partout à Paris la frontière invisible est passée par là. Il y a plein de restaurants dans le coin un peu plus loin, beaucoup de chaînes et beaucoup pour touristes (quantité de pubs anglophones par exemple), quelques grands noms incontournables, comme le Wepler ou la Pomponnette. Mais peu de vrais bistro(t)s simples et bons. En voici un.

A la même adresse, depuis des années, il y avait le Petit Lyon, un bouchon lyonnais traditionnel et toujours plein, avec un cave à vins exceptionnelle, pas chère et pleine de pots de coteaux du lyonnais à déguster. Sans compter une nourriture incontournable. Puis un magasin de réparation de vélo est venu s'installer à côté et le Petit Lyon a fermé cet été pour devenir un nouveau restaurant. Nouveau concept bien sûr, mais avec une certaine continuité qui fait plaisir. Aucun rapport avec le magasin de vélo à côté a priori. Le petit vélo est accroché dans la salle au plafond. Il est effectivement très petit, question de cadrage...


L'accueil est très chaleureux, plein de moustaches et de frisures. Ils ont commencé le service il y a trois semaines et c'est plein (encore ou déjà ?). La gentillesse se sent à plein de petits détails. Au fait qu'ils ont recueilli un chat errant du quartier aussi (et pourtant, ils ne servent pas de lapin).

Parlons bouffe :
- Les harengs en entrée sont doux, très bien dessalés et bien assaisonnés. Pas d'oignon avec, ce qui est un choix discutable surtout pour moi, grand amateur d'oignons devant le hareng. Mais on ne mange pas toujours à ce prix des harengs aussi bien préparés.
- Le magret de canard est très bon. Petite remarque sur cette ancienne spécialité très courue du Petit Lyon, le magret de canard sauce Rossini (au foie gras) avec pommes sarladaises. Les nouveaux patrons ont décidé de le garder à la carte, transformé. Le résultat est convaincant. C'est le même tout en étant un autre, moins copieux et moins brûlant. L'ajout de salades donne un croustillant et une amertume bienvenus. Pour ceux qui le découvrent, c'est un bon petit plat.
- Le foie de veau est extraordinaire. Cuit comme il faut, fondant à l'intérieur et quasi croustillant à l'extérieur. Une manière de redécouvrir ce foie un peu oublié de nos jours.
- La banane flambée au rhum avec sa glace rhum raisins est très douce. N'hésitez pas à demander un peu plus de rhum puisqu'il arrive dans un petit verre à côté avant de flamber sous vos yeux brillants. On ne lésine pas, ici.
- Le vin est délicat. Très bon Corbières, mais aussi la même cave qu'avant, tant qu'elle dure.
Pour le reste de la carte, je vous laisse regarder un exemple (ça change et ils ont rajouté le magret après, à la demande générale des voisins je suppose ;)



Un changement de restaurant c'est toujours un événement dans un quartier. Surtout quand le précédent a laissé une empreinte aussi forte, que cela soit pour les travailleurs en col blanc du midi ou les bourgeois du soir. Pour le moment, le pari est évidemment réussi. Moi j'y retournerai.

dimanche 23 octobre 2016

Du temps de cerveau pour... un roman - prélude

Prélude

Le dernier accord vibre encore dans mes oreilles. Je ne bouge pas. Il ondule autour de moi, me vrille le cerveau et parcourt l’immensité du Réso. Un accord qui résume tout ce qui a précédé et qui doit se déguster jusqu’à ce qu’il devienne inaudible. Je le sens diminuer d’intensité et en même temps pénétrer plus profondément. Je sais qu’à un moment, la foule commencera à applaudir. J’espère que cela ne sera pas trop tôt. Pour ne pas perdre une milliseconde de cet accord magique. Plk0DkI était un compositeur magnifique, en plus d’avoir inventé cet instrument magique.

Je me souviens du dernier concert. Les applaudissements ont commencé si tôt que même le coordonnateur a été choqué, lui qui a pourtant une ouïe si loin d’être parfaite comme la mienne. Ce soir-là, j’ai refusé de jouer un bis. Je savais que cela me portait plus tort qu’à eux, ces millions de spectateurs lointains et branchés sur le Réso, mais cela a été ma vengeance, en l’honneur de la mémoire de Plk0DkI. On ne transige pas avec la beauté de la musique.

Je ne bouge toujours pas, la musique s’éteint progressivement, ravivant mes braises intérieures. Son feu se transfère à chacun. Toujours pas d’applaudissements. Je commence à être surpris.

Aurais-je mal interprété ce grand classique ? Je me dis que c’est impossible, car je ressens cette vibration unique au fond de moi, au plus profond maintenant. Je sais reconnaître cette sensation de perfection.

Auraient-ils coupé le son ? Coupé le retour du public ? C’est impossible, jamais ils ne feraient cela. L’interprète a besoin de son public, toujours et en toutes circonstances, c’est cela qui l’enrichit. Déjà que je suis tout seul dans ce studio d’enregistrement, sur cette petite scène ridicule, devant des parois blanches et parées de zones réfléchissantes. Jouer ainsi, sans contact charnel et direct avec son public, est déjà assez difficile. Alors s’ils coupent le retour du public, nous les artistes, nous sommes morts. Autant diffuser des enregistrements.

Je ne bouge pas. L’accord s’éteint. Enfin ? Déjà ? Je sais que seules les oreilles absolues en ont entendu la dernière note cristalline. Puis je lève la tête et la tourne à droite, vers ce qui est le public. Vers ce qui a toujours été la place du public, de tous temps. En face de moi, le mur elliptique est blanc immaculé.

Puis les premiers applaudissements arrivent. Ils viennent de la droite, puis de partout. Le mur blanc s’illumine en quelques secondes de toutes ces audiences. Des foules réparties aux quatre millions de coins du Réso. Je vois des spectateurs debout, frappant dans leurs mains, les yeux illuminés, comme il se doit, par la musique.

Je me lève de mon banc et m’incline pour les saluer. Ils sont tout autour de moi maintenant mais je sais que chacun d’eux me voit en gros plan en train de le saluer, lui ou elle, personnellement. Les applaudissements dessinent un mur de bruits totalement chaotique, un bruit blanc de mains qui s’entrechoquent. Je souris et je guette le moment. Le moment où ce chaos va se résoudre en un rythme à l’unisson. Un battement lent et hypnotique. Une demande de bis. Pleine d’espoir.

Le bis est la raison de vivre de nous autres, artistes. Dans notre monde, tout est stéréotypé et cadré. Les programmes des concerts, le déroulement des spectacles, l’écriture des partitions. Seul le bis est un moment de liberté absolue pour l’interprète. Face à une demande de bis, nous pouvons choisir de faire ce que nous voulons. Plus aucune règle n’existe, plus aucune contrainte. Je suis seul maître à bord, comme disaient les capitaines de l’Antiquité qui voguaient vers des étoiles lointaines.

J’ai toujours eu droit à des demandes de bis. Je suppose que c’est le signe d’un don. On m’a toujours dit que j’étais un musicien de génie. Sans forfanterie. Je le sais, c’est tout. La musique me le clame à chaque fois. Je la crois.

Ce soir, la demande arrive très vite, comme si les foules étaient avides d’en avoir plus. Tout de suite. Si elles étaient là, dans cette pièce, elles me lyncheraient certainement. J’entends cet unisson. Il est très puissant. Je sens mon instrument commencer à vibrer en harmonie avec lui. Un La parfait.

Je lève la main droite et les applaudissements s’arrêtent. Tous en même temps. Puis je me rassois. Je pose mes mains sur le clavier du milieu et je prends ma respiration. Le silence total est revenu à travers le Réso. C’est mon moment préféré, celui où je peux choisir ce que je veux. Vais-je rejouer ce dernier morceau ? Vais-je jouer un morceau bref de Plk0DkI ?

Je sens autour de moi, un silence compact. Je sais que je suis surveillé. Je sais aussi que personne ne pourra interrompre ce bis, c’est la règle. Je me sens à cet instant le roi du monde, moi ce petit enfant de dix ans, surdoué disent-ils.

Alors je choisis de jouer mon prélude. Je ne saurai jamais pourquoi c’est à ce moment précis que je décide de jouer ce morceau que personne n’a jamais entendu. Un morceau que j’ai composé seul dans ma tête, sans jamais le jouer sur un quelconque instrument. Personne d’autre que moi ne le connaît. Lorsque j’y repenserai plus tard, des centaines de fois, je me dirai que ce choix a bouleversé ma vie. Et tellement plus. Mais sur le moment, je ressens juste cette envie irrépressible de donner au monde ce petit prélude. Un morceau original, inédit, nouveau. Un morceau qui n’a été approuvé par personne d’autre que moi.

Je plaque mon premier accord, puis le second juste au moment où le premier se vrille. Les deux vrilles vont dans des sens contraires et on frôle la rupture d’harmonie, mais j’enfile alors les arpèges de la mélodie, qui se faufilent entre les battements du rythme qui se poursuite. J’entends quelques hoquets de surprise de ci de là. Je souris et continue.

Le prélude est court. Après tout, ce n’est qu’un prélude. Mais sa construction complexe annonce forcément une suite. Le dernier accord, d’ailleurs, est tellement ouvert et interrogatif qu’on n’a pas envie qu’il finisse. Mes mains ne commencent à trembler qu’après la fin du prélude. Je regarde longtemps le clavier. J’entends des applaudissements, mais ils sont lointains. Mes oreilles bourdonnent. Je me lève, je salue et je me dirige vers la porte blanche. Elle s’ouvre devant moi.

Clis me saute dans les bras. «  Tu as été magnifique, Kiks ». A côté d’elle mon superviseur me regarde avec ses yeux habituels, sans aucune expression discernable. Il nous laisse quelque secondes où Clis manque de m’étouffer, puis il dit ce que j’attendais : « kiK6D8n, suivez-moi ». Son ton est posé, comme d’habitude mais c’est un ordre. Clis me regarde dans les yeux. Elle sourit, mais je vois bien qu’elle a peur. Elle n’est pas musicienne, mais elle a bien senti que quelque chose de particulier s’est joué ce soir.

Je l’embrasse sur le front et suit mon superviseur qui s’est déjà éloigné. Je me compose une marche souple. Je sais où nous allons. Je sais que la partie va être difficile à jouer. Mais je suis prêt. Après tout, j’ai déjà dix ans, non ?

Chapitre Un

samedi 22 octobre 2016

Internet des passoires shadoks

L’Internet des objets, vous connaissez ? Il s’agit de la génération suivante, déjà bien répandue autour de nous.

Au début l’Internet reliait entre eux des réseaux locaux plus ou moins grands et donc des serveurs qui les pilotent, c’est-à-dire des ordinateurs spéciaux destinés à « servir » des machines comme celles que nous, les humains normaux, on utilise. Ces serveurs sont devenus de plus en plus petits et seuls les informaticiens savent les comprendre (disent-ils). Mais avec la généralisation des ordinateurs et des mobiles (autre nom pour un petit ordinateur portable) est apparue une nouvelle catégorie. Un objet, relié à l’Internet est accessible, comme les serveurs ou nos machines normales, via son adresse.

On peut citer les caméras vidéos installées un peu partout mais aussi les puces communicantes sur les chaudières, des porte-clés, les voitures, les frigos et même les vibre-masseurs commandés à distance. Il y en aura de plus en plus, cousus dans les vêtements ou même sous notre peau, dans des matériels médicaux ou toutes sortes d’inventions toutes plus lucratives les unes que les autres. Lorsque les patrons de l’Internet ont décidé il y a quelques années de passer à IPv6 au lieu de IPv4, c’était pour absorber cette quantité phénoménale d’adresses qui était en train d’arriver.

Aujourd’hui, donc, il n’y a plus de risque lié à un manque d’adresses et chaque caméra de vidéo-surveillance peut en avoir une sans souci. Le DNS (domain name system) est une méthode qui existe depuis les débuts de l’Internet pour faire la correspondance entre des noms (comme lemonde.fr) et des adresses IP comme 93.184.220.20 pour le site web du Monde justement.

Le problème est que la plupart de ces milliards d’objects connectés ne sont pas sécurisés. Ils sont peu chers et fabriqués avec des composants produits en grande masse (en Chine souvent). Les mots de passe sont inscrits en dur dans ces composants et impossibles à modifier sans changer l’appareil en entier. Il est donc facile de piloter à distance de tels objets (par millions) et de les infecter de virus et autres machins dangereux.

L’internet mondial a été attaqué hier - massivement - par un tel réseau d’objects connectés (des caméras vidéo connectées en l’occurence). C’est la première fois avec cette ampleur. Détails ici où là en anglais. Le « code source » du « malware » utilisé est public et n’importe quel geek peut l’utiliser. La beauté et l’horreur de la chose c’est qu’il est vraiment impossible de protéger ces objets connectés anciens. La faille peut donc être exploitée en permanence. On espère que ce n’est plus le cas pour les nouveaux objets... Sifflote.... L’attaque a touché un des plus gros fournisseurs au monde de services DNS (DynDNS) et beaucoup de grands sites ont donc été bloqués, de Twitter à Facebook en passant par de multiples sites professionnels.

L’Internet est un réseau de chaînes. Quand un maillon est coupé on peut passer par un autre, en théorie, mais dans certains cas, il y a des blocages quand on sait bloquer le bon maillon.

Ne frémissez pas. En tous cas pas trop. Qui serait intéressé à pousser à votre insu votre chauffage à fond ou à détourner les images de la caméra vidéo en face de votre chambre ? Qui oserait arrêter votre pacemaker ou votre détecteur de taux d’insuline ? Qui s’amuserait à déprogrammer votre réveil la nuit ou à activer votre téléphone à distance comme dans KingsMan ?

L’Internet est fragile, donc notre monde aussi. De là à en faire une passoire shadok...

vendredi 21 octobre 2016

Nuit

1

Une nuit en avion c'est toujours bizarre, surtout quand il y a du décalage horaire en vue. En rentrant de Montréal à Paris on se demande toujours quand on est. On part à 10h du soir pour arriver à 11h du matin ou alors on part à 4h du matin ou alors on arrive à 5h du matin. Quand tout se mélange il est difficile de s'y retrouver. Même notre horloge biologique est perturbée. Je ne suis pas resté assez longtemps pour me recaler, j'espère, mais cela n'empêche pas une fatigue accrue par l'impossibilité d'allonger ses jambes. Eh oui, votre blogueur favori ne voyage ni en première, ni en business, ni même en premium ;)

Tout cela se passe dans un brouillard flou où on dort rarement assez sauf à se gaver de mélatonine pour dormir ou inversement d'eau oxygénée en arrivant pour se réveiller comme les pilotes. Pas mon cas. Sur mon vol, comme sur tous ceux d'à côté, des affiches de pub pour Samsung et son Note7 interdit même éteint. 

Une nuit blanche, une nuit noire, une nuit grise. Tout cela à la fois. Je poste ce billet en plusieurs fois. Cette première partie dans l'aérogare - merci au Wifi gratuit standard de YUL. Le reste ? On verra. À suivre. 

2

L'intérieur d'une cabine d'avion est un petit monde cylindrique. Il est plein de fauteuils et puis de gens et de lumières puis de nuit. Ce soir, une atmosphère bleue
où les langues latines dominent l'anglais ;)...et le wifi fonctionne encore dans l'avion pour le moment. Pas une vraie cage de Faraday alors. 


3

L'avion va bouger et le wifi va décoller. Bientôt l'avion décollera et ma nuit agitée commencera. Une magie toujours renouvelée. Un vol porté par les vents (c'est toujours plus court dans ce sens-là). Il pleut à Montréal, pas encore de la neige, mais ça approche. Pleuvra-t-il à Paris ? Prochain numéro en direct à Roissy. D'autres numéros entre deux si j'ai le courage. Mais je n'en suis pas certain. Le sommeil me rattrape. Il est bientôt 4 heures et je vais me coucher comme aurait pu dire Dutronc (le pére). Bonne nuit à vous, bonne sieste ou bon sommeil éveillé. Car après tout on dort plus souvent qu'on ne le croit, même éveillé et songeur dans notre société d'attente. 

4

Pistes d'aéroport de nuit sous la pluie. Nous, moi, coincé derrière un hublot mouillé. Perspectives de lumière. L'œil capte tout mais l'appareil photo doit faire des choix. De près ou de loin... Où suis-je ?





5

Nuit. Lumières variées dans l'avion. Ambiances créées par la lumière. Bleu nuit pour la nuit. Puis aube pourprée pour le café. Alchimie des couleurs. 



6

Aube dehors aussi évidemment au milieu de la nuit-matinée éclatée de sommeil. La terre se réveille. On distingue bien l'Irlande en-dessous, non ? 














Paris. 3G ou 4G. Endormi et réveillé à la fois. Heureux de quitter les bras pas très efficaces ni voluptueux de Morphée pour retrouver ceux de la femme que j'aime. Bientôt. 

jeudi 20 octobre 2016

De profundis temporaires ou définitifs ?

Journée bizarre aujourd'hui. Plusieurs événements quasi-mortuaires dont on ne sait pas encore trop s'ils sont définitifs. 

Cette nuit a eu lieu le débat Trump-Clinton, le dernier en direct à la télé. En fait, étant au Canada, j'ai pu en voir la fin, en plein jet lag. Un débat qui a sonné le glas pour Donald. Il n'a pas gagné le combat ni rattrapé Clinton. En plus il a dit deux grosses conneries qui tournent en boucle sur les chaînes d'info US, résumé ici par exemple

En annonçant qu'il ne reconnaîtrait pas le résultat de l'élection il a scié l'arbre de la démocratie aux branches duquel il s'accroche. A la question Would he support the results of the election, as every other presidential candidate has done since time immemorial ? Il a répondu "I will look at it at the time, I will keep you in suspense." Un bon gros déni de démocratie. Et puis il a prouvé son caractère sexiste encore une fois et ne s'est pas attiré les sympathies de beaucoup d'électrices en traitant sa concurrente de "nasty woman" quelque part entre méchante, mauvaise ou même vicieuse. Brillant, non ? Les "chances" d'élection de Trump sont tombées au plus bas, moins de 13%, et les défections républicaines vont se multiplier dans les (moins) de trois semaines qui restent. 

En France, les écolos ont choisi et c'est Cécile Duflot qui en a pris plein dans la poire (bio). Elle est éliminée du second tour des primaires vertes qui opposera un homme et une femme tous les deux eurodéputés et défenseurs d'une écologie moins bling-bling et politique. Un enterrement de seconde classe pour l'ex-ministre qui a fait du combat contre Hollande sa raison d'être et qui aura du mal à se faire rélire députée. Un vote sanction contre les sortants surtout. Comme ce sera le cas dans d'autres partis et autres primaires. Il y a un désir de renouveau, bien venu dans notre pays congelé dans un conservatisme évident. 

Et puis on attend tous des nouvelles de Schiaparelli  ce petit robot qui s'est posé sur Mars mais qui n'a pas répondu depuis. L'Europe spatiale sait envoyer des fusées et des sondes mais n'a pas de chance avec ses atterrisseurs (exemple de Philae récemment). Il est trop tôt pour savoir si ce robot survivra ou s'il a creusé un canal sur Mars, avec un tel nom prédestiné. L'Europe a peut-être des progrès techniques à faire, mais surtout des progrès en marketing. La NASA est mille fois plus forte sur ce dernier plan en sachant communiquer sur ce qui fait fantasmer le public. Qui sait écrire Schiaparelli ou sait même qui il était ? Les rovers américains portent des noms plus simples, n'est-ce pas, Curiosity ? Attendons quand même avant d'enterrer ce robot qui n'est qu'un atterrisseur basique en test.





mercredi 19 octobre 2016

Développement et durable

Le développement est une question clé mais il y a plusieurs façons de l'appréhender. Exemple ici au Canada. 

Il y a eu la COP21 et bientôt la 22 où l'accord de Paris entrera officiellement en vigueur. Le développement effréné devrait donc se plier à des règles différentes du passé avec cette obligation de prendre en compte le réchauffement climatique dans les stratégies nationales. Le Canada a eu du mal à signer mais le plan fédéral a été dévoilé par son dynamique premier ministre Justin B. Trudeau sur le prix du carbone. Le puissant voisin US a ratifié l'accord de Paris mais n'a pas fixé de prix au carbone. Pas encore ? 

Certaines provinces se rebiffent, à cause du pétrole et du gaz évidemment. C'est le cas du Saskatchewan qui a dévoilé un plan alternatif afin de garder les milliards de dollars chez eux au lieu de les "envoyer" dans les pays en développement qui ont moins contribué au réchauffement. Pourquoi ne pas développer des capacités de recherche ici sous notre contrôle et pour nos emplois plutôt que de les envoyer au fin fond de nulle part ? On pourrait en dire autant de la Wallonie ou des agriculteurs bretons dans des registres proches. 

Le développement local vs le développement global... Les modèles de solidarité internationale contre ceux des politiques nationales ou même ici provinciales... Comment instiller du gagnant-gagnant dans des discussions pilotées à des niveaux aussi divers, aussi multi-partenaires, que ceux du climat : ONU, accord international, États payeurs, leurs composantes fédérales, États bénéficiaires, firmes et multinationales, universités et centres de recherche, ONG et citoyens...

Un exemple parmi d'autres de la complexité des actions dans un mille-feuilles percé de trous, mais heureusement cuisiné par quelques décideurs audacieux. Pour le développement, mais pas n'importe quel développement. Au-delà de son jardin "nimby" surtout quand il s'agit d'enjeux planétaires qui ne connaissent pas les frontières. Y'a du boulot. 

mardi 18 octobre 2016

Sujets québécois cycliques

Je suis à Montréal pour quelques jours, pour y réfléchir sur l'économie et le rôle des universités. 

Un vaste sujet où les vraies questions ne sont pas souvent abordées, cachées comme elles sont derrière des contextes locaux très divers. Le tissu économique, comme on dit, est imprimé de motifs très différents suivant les pays et les moyens de porter ce tissu difficilement comparables, en particulier pour les étudiants. En Afrique les pagnes aux couleurs fantastiques sont souvent fabriqués et imprimés en Europe, aux Pays-Bas par exemple.

La mondialisation est effective mais les emplois qui y sont liés sont très volatils. Ils dépendent entre autre des accords commerciaux entre "zones". Le CETA ? On en parle ici évidemment beaucoup. L'accord Canada-Europe était donné comme déjà signé avec une réunion de simple formalité aujourd'hui au Luxembourg puis une signature en grande pompe le 27 octobre. Patatras  le parlement wallon s'y oppose et a choisi d'exercer son droit, dans ce bizarre mode de gouvernance fédéral où l'accord des trois parlements belges est nécessaire pour ce type de texte, malgré les pirouettes du gouvernement belge et les tentatives de contournement de la Commission européenne. 

La presse canadienne est surprise et ne comprend pas vraiment. A chacun son mode d'organisation du circuit de décision. Il est vrai que les systèmes de gouvernance sont très différents : une Belgique fédérale où les communautés ont un poids très fort, une Européenne non fédérale pù l'unanimité est la règle et un Canada où les provinces n'ont pas d'autonomie internationale, ou si peu. Au Canada l'accord est presque unanime (mais pas selon les belges) même si on en a peu parlé. Le Devoir a pondu un article intéressant à lire sur le sujet. On y apprend pêle-mêle que les producteurs locaux de fromage s'inquiètent (ici aussi), que 80% des échanges se font naturellement avec les USA et qu'il est nécessaire de faire tomber les barrières douanières avec l'Europe (y compris les britanniques ?). La Presse (de Montréal) relaie elle un appelle du premier ministre du Québec aux francophones de Wallonie. 

Entre francophones on devrait s'aider non ? Ben non justement. La Francophonie économique n'existe pas encore, c'est clair. Heureusement, les universitaires cherchent à l'inventer (ad libitum, coda et boucle infinie)

Boucle infinie comme le temps, même s'il se réchauffe. Fin de l'été indien ici et températures douces aujourd'hui, jusqu'à 23 degrés, si,si même s'il ne fait que 5 ce matin. Quelques photos aériennes alors, prises hier. 








lundi 17 octobre 2016

C’est dimanche, c’est l'église

Euh...

En fait c’est lundi. Mais j’écris ce billet en ce dimache soir puisque demain lundi (aujourd’hui pour vous en fait) je vole vers Montréal pour y passer quelques jours. Histoire de parler de sujets plus... américains, au sens noble du terme.

En fait la vraie citation c’est C’est lundi, c’est ravioli de cette famille bien catho-bourgeoise dans La vie est un long fleuve tranquille. Pas de raviolis aujourd’hui, mais des nouvelles de l’église.

Dimanche donc il y a eu la Manif pour tous. Une petite manif pour le coup avec, selon les sources, entre 24 000 et 200 000 personnes, la plus petite de toutes. Devinez qui a dit quoi entre la Préfecture et les gentils organisateurs. Peu de politiques en fait. Personne ne se mouille trop derrière cette manif, en tous cas officiellement. Fillon s’était fait porter pâle puisqu’il est au Maroc. Mais il a annulé Marrakech et ses hammams car il devait rentrer à Paris. Dur, dur, la vie d’homme politique. Heureusement il y avait l’ultra-traditionaliste Poisson autour des bassins du Trocadéro. Il n’y a pas que des pathos dans la Manif pour tous, je crois, mais ils représentent quand même l’écrasante majorité des faibles troupes.

Graphique pas très gentil du Monde

Dimanche aussi, on a pu lire cette surprenante nouvelle sur Le Figaro : L’Eglise demande pardon pour les cathares. Ah ben dis donc. C’est ce qu’on appelle une longue traîne, huit cent soixante dix ans après le massacre de Montségur. C’est l’année de la miséricorde et du pardon, qui a commencé par une bulle et qui se termine d’ailleurs dans un mois, mais quoi encore ? Ils vont pardonner quoi et à qui ? Ils ont demandé pardon aux victimes de prêtres pédophiles ici, mais aussi à Gatineau au Canada. Où cela va-t-il s’arrêter ? Vont-ils pardonner à Galilée ou à Giordano Bruno ? Le pardon, pilier du Vatican, est un truc bizarre, car on ne peut pardonner quelqu’un qui ne le demande pas, si, si. Il reste des cathares, si,si, au delà de mots étranges et barbares comme néo-catharisme. Un univers impitoyables de chapelles et de sectes, avec des tendances toutes aussi indéchiffrables les unes que les autres.

Où est Charlie François ?

Enfin, mercredi, y aura-t-il ou pas l’inauguration de la cathédrale orthodoxe (moscovite) de Paris ? Poutine ne viendra pas, mais tout est prêt pour l’inauguration. C’est une autre église catholique, mais pas vaticane. Sans année de la miséricorde, donc. On tremble d’impatience ! On a hâte d’y aller déguster des zakouskis, de la vodka et d’écouter de la musique russe.

Vue de la Tour Eiffel

dimanche 16 octobre 2016

Du temps de cerveau pour ... une nouvelle déboustiffleuse

Partie d’un mode d’emploi, retrouvé dans les archives du Musée du Design, 2435 AD, Terre.

Mode d’emploi de la Near 7
Modèle De Luxe

Merci d’avoir acheté ce modèle. La Near 7 est la meilleure déboustiffleuse du marché et le restera longtemps. Nous y avons intégré de nouvelles fonctionnalités, basées sur l’excellent modèle Near 6 qui a été la plus grande vente dans la galaxie et sur les demandes de nos fidèles clients. Nous espérons (nous savons) que cette déboustiffleuse vous donnera toute satisfaction grâce notamment à son caractère portable au poignet.

Image (malheureusement disparue)

Les quatre contrôles de la Near 7 sont d’une élégante simplicité et conviendront à tous les usages.

Le bouton rouge sert lancer et arrêter la Near 7. Les réglages sont déterminés par la position de chacune des trois molettes.

La molette 1 permet de choisir le rayon d’action de la déboustiffleuse. Le niveau minimum est un espace qui englobe exactement le porteur de la Near7, vêtements ou combinaison spatiale compris. Le niveau maximum va jusqu’à une sphère d'un kilomètre de rayon autour de la déboustiffleuse, permettant ainsi de faire voyager un vaisseau spatial ou une petite île. Les graduations intermédiaires permettent toutes les variations intermédiaires avec ajustement du rayon d’action en fonction de la taille souhaitée, afin de ne pas emporter le sol ou l’atmosphère, sauf si vous le souhaitez.

NB : Pour nos clients qui possédaient une Near 6 ou un modèle précédent, il n’est plus nécessaire de faire des mesures complexes de distances autour de soi. En effet, les modèles précédents n’étaient pas portables et pouvaient mesurer quelques mètres, obligeant les « voyageurs » à se placer à des endroits précis de la machine. L’intelligence artificioréelle de la Near 7 calcule à l’atome près ce qu’il faut emporter avec vous et de vous.

La molette 2 permet de choisir le lieu d’arrivée, comme sur les modèles précédents. La précision est ici calculée au millième d’atome près et le mécanisme de traitement des chocs, breveté par la Near Company, assure que votre arrivée se déroulera sans aucun effet de rencontre hasardeuse, en décalant l’endroit jusqu’à une zone de non-danger.

NB: La Near 1 permettait déjà de déboustiffler en toute sécurité mais c’était au prix de réglages délicats et ne pouvait être utilisée que dans le vide en déplaçant un vaisseau spatial en entier, afin d’éviter les chocs atomiques. C’est à partir de la Near 4 qu’a été introduit le mécanisme qui translate an temps réel qui a tant fait le succès de nos déboustiffleuses. Avec le modèle Near 7, il suffit de régler la molette 2 sur le niveau exact souhaité et la déboustiffleuse trouve le point d’arrivée le plus adapté. Et cela est valable pour tous les types de déboustifflages.

La molette 3 comporte plusieurs nouveautés exclusives à la Near 7 et doit être maniée avec précaution. Voici les différents réglages possibles qui correspondent à différents types de déboustifflage :

- Distance
Ce réglage est présent depuis la Near 1 et sur toutes les déboustiffleuses du marché. C’est la fonction standard qui permet de voyager instantanément d’un point à l’autre de l’Univers. La molette 1 détermine le volume de ce qui doit voyager et la molette 2 l’endroit d’arrivée. Malgré toutes les sécurités incluses dans la Near 7, une déboustiffleuse reste une déboustiffleuse et doit être maniée avec prudence. Très peu d’accidents sont arrivés depuis l’industrialisation des solutions de déboustifflage, mais il est de règle de faire attention. L’invention géniale qui a conduit à la création du déboustifflage a changé pour toujours notre Univers, mais reste une technique délicate à manier. Pour citer le Dr Schzrtyl qui a inventé la théorie, « Déboustiffler est une technique dangereuse, car la moindre erreur de réglage risque de vous envoyer à un endroit inapproprié ou de n’envoyer qu’un morceau de vous. »

Encadré
Rappel des théories du déboustifflage
L’Univers est un oignon et notre réalité se trouve sur l’une de ses couches. Nous ne pouvions nous déplacer que sur notre couche jusqu’à la découverte par le Dr Schzrtyl du moyen de traverser l’oignon grâce à une technique d’enfouissement proto-atomique. Grâce à cette théorie, la théorie du déboustifflage relatif, lorsqu’on souhaite se déplacer d’un point à un autre de l’Univers, il suffit de se déplacer vers l’intérieur de l’oignon (ce qui ne prend aucun temps), d’arriver à une couche plus basse, de s’y déplacer de manière classique puis de remonter à notre niveau. Le temps du déplacement est limité au temps du déplacement sur la couche basse, qui peut être très court, de l’ordre de quelques nano-secondes pour les trajets les plus longs à travers l’Univers. Comme les temps de descente et de remontée sont nuls, le temps total du voyage est quasi instantané, quelles que soient les distances à parcourir.

Il est vite apparu qu’il pouvait y avoir un peu d’incertitude dans les lieux d’arrivée avec ces techniques et c’est pourquoi les premières générations de déboustiffleuses obligeaient à des conditions rigoureuses de localisation et de protection. Les générations suivantes ont vite résolu ce problème en enchaînant un nombre de plus en plus grand de sauts verticaux avec des micro-mouvements latéraux à certaines couches, plus malléables que d’autres, ce qui a permis d’ajuster la précision des déplacements à ce que nous connaissons aujourd’hui, sans augmenter le temps de voyage au-delà de la micro-seconde.

Juste avant de mourir, le Dr Schzrtyl a énoncé la théorie du déboustifflage général qui permettait de traverser l’oignon de l’Univers dans d’autres directions que la verticale (c’est-à-dire la distance). Cette nouvelle théorie a bouleversé notre Univers et petit-à petit sont apparus d’autres techniques pour déboustiffler.

- Pensée
Ce réglage est présent depuis la Near 5 et sur toutes les bonnes déboustiffleuses du marché. Il permet de préciser une pensée et de l’envoyer précisément à un certain endroit, la plupart du temps le cerveau d’un autre être vivant. L’intérêt des pensées, comme vous le savez est qu’elles ne dépendent pas du langage utilisé et qu’elles peuvent donc être comprises par tous. Quand le mode pensée est choisi, a molette 1 permet d'enregistre votre pensée plus ou moins longtemps et la molette 2 de choisir l’individu vers qui elle doit arriver. Plusieurs milliers de graduations sont réservées à vos « favoris », les personnes avec lesquelles vous aimez échanger des pensées, puisqu’il suffit que les molettes des deux déboustiffleuses soient positionnées l’une vers l’autre pour qu’un dialogue de pensée ait lieu entre deux personnes, quel que soit l’endroit de l’Univers où elles se trouvent.
Nous rappelons aux utilisateurs que les modèles personnels comme la Near 7 ne doivent pas être utilisés pour spammer les cerveaux des personnes contre leur volonté et que la peine encourue en cas de plainte est l’interdiction de déboustiffler à vie.

- Temps
Ce réglage avait fait le succès de la Near 6 et a été depuis ajouté à quelques autres bonnes déboustiffleuses. Il est amélioré dans la Near 7 puisqu’il est possible maintenant de voyager dans le temps pour une période adaptée. Les premières solutions ne permettaient que de choisir un moment dans le passé ou l’avenir et une durée fixée pour y rester. Grâce à la Near 7 et à sa molette 2 fluide dans le mode « Temps » vous pouvez maintenant choisir un moment et une durée de base, puis une fois sur place dans le temps revenir au présent (si tant est que le présent veuille dire quelque chose) en appuyant deux fois sur le bouton rouge. Il vous est ainsi loisible de fixer dans certaines limites la durée de votre séjour mais de la modifier une fois sur place. Le mécanisme AntiP breveté évite tout paradoxe temporel. En cas de paradoxe détecté, vous revenez automatiquement quelques instants en arrière pour l’éviter puis à votre époque de départ. Il va sans dire que tous ceux qui, conformément à la loi, essayeront de créer des paradoxes seront interdits à vie de déboustiffler.

- Conscience
NOUVEAU - NOUVEAU
Avec la Near 7, un nouveau mode est disponible. Vous avez à votre poignet la seule déboustiffleuse qui offre ce mode de voyage à travers la conscience.
ATTENTION ATTENTION
Ce mode est encore expérimental et toutes les conséquences n’en sont pas maîtrisées. Nous vous recommandons de procéder avec soin aux réglages avant d’appuyer sur le bouton rouge.
Dans ce mode, la molette 1 sert à sélectionner le niveau de conscience que vous souhaitez activer. Les grands choix, marqués par des graduations, sont les suivants : conscience politique, sociale, sexuelle, amoureuse, intellectuelle, mystique, floubeuse et totale. Tous les choix sont possibles, y compris entre les graduations, mais tous n’ont pas encore été explorés, tellement il y a de façons de traverser les couches de l’oignon.
La plupart des choix vont vers le bas (le centre de l’oignon), mais depuis que nous avons découvert que nous ne vivions pas sur la couche externe de l’oignon mais qu’il y a d’autres choix possibles au-dessus, d’autres choix de conscience sont possibles. La molette 2 sert à fixer la destination de votre voyage, c’est-à-dire dans quelle couche de conscience vous souhaitez aboutir. A l’heure actuelle et pour des raisons de sécurité les niveaux de conscience auxquels vous pouvez accéder vont de 0 à 200, en prenant comme référence notre niveau de conscience actuel (100). Il est interdit de débrider la Near 7 pour essayer d’aller vers d’autres niveaux de conscience, plus bas ou plus haut, sous peine d’interdiction de déboustiffler à vie.

Nos chercheurs travaillent à la prochaine version de notre déboustiffleuse, la Near 8, mais celle-ci ne devrait pas être disponible avant plusieurs années, comme chacun de nous peut le constater en se projetant dans le futur. En attendant, nous vous souhaitons de bons voyages et de bons déboustifflages avec la Near 7, la plus avancée des déboustiffleuses, et tout cela à votre poignet !


samedi 15 octobre 2016

Paris en vidéo ? Question de point de vue...

La promotion c’est une constante de notre société. On a du mal à la différencier de l’information, de temps en temps, et de plus en plus, avec le poids dominant des RP (Relations Presse) face aux journalistes (et aux pigistes). Le marketing est partout, insidieux ou assumé. A chacun de nous de le voir, de le décoder et d’en penser ce qu’on veut.

Le secteur du tourisme est un bain de choix pour les nageurs du marketing. Les différents niveaux de collectivités locales usent et abusent de promotions en tout genre. Il y a plusieurs façons de faire des vidéos de promotion touristique, petit tour d’horizon ici. Paris n’y échappe pas, puisqu’il s’agit pour la Mairie de « reconstruire » l’image internationale pour les touristes qui ont peur d’y revenir. Surtout les riches. Je parle souvent de Paris.

Le film officiel de Paris mérite d’être vu, dans la série des clichés internationaux de Paris. Un Paris monumental et qui ne correspond à rien de la vie à Paris. Un film qui en dit long sur la manière pour Paris d’attirer les touristes en masse (et les riches dans des lieux bien choisis mais pas toujours bien protégés). Paris, c’est donc, dans ce langage marketing, une ville vide de vrais gens et pleine de monuments, pleine de sourires en permanence, d’amour et de danse. Une ville pleine de mode, de mannequins et de richesse aussi. Une ville-musée « exclusive » et ripolinée donc.


On y voit même Anne Hidalgo (mais pas sur ce plan)

Un autre film a été mis en ligne par deux réalisateurs Max et Léo qui expliquent sur leur page Facebook qu’il y a d’autres visions de Paris. Leur film est très différent et donc complémentaire, car pour les parisiens il donne une image du vrai Paris multiculturel et de sa joie de vivre. Un film plus pour les français que pour les touristes chinois. Un film pour les gens normaux qui y vivent et qui arrivent à y vivre malgré ce musée à l’air libre. Un film qui casse aussi le code du film touristique traditionnel, filmé du matin au soir. Un film où la nuit et la bouffe sont plus présents. Un film parisien, quoi ! Il est urgent de comparer les deux.



Mais il y a tant de films sur Paris qu’on y trouve tout ce qu’on veut. Ou plutôt tout ce que le commanditaire veut. Exemple ici avec un clip musical pour une chanson Bienvenue à Paris, parmi d'autres films tournés à Paris. Je ne résiste pas au plaisir de vous remettre ce clip de Claude Lelouch, mythique et époustouflant. 1976...



Un dernier exemple ici avec British Airways qui compare Paris et New-York avec une pêche plutôt sympa et bien plus dynamique que le film institutionnel d'avant. Je proteste juste contre le dernier plan sur l’amour, symbolisé à Paris par le Pont des Arts et ses cadenas (enlevés depuis par la Mairie grâce à la compagne de dé-promotion lancée par No Love Locks ! Le film a été tourné avant, mais cela en disait long sur l’image cadenassée de Paris (et de l’amour).



Une image extraite ? A votre service :


A contrario, un long film de 50 minutes sans commentaire nous faisant passer la journée à Paris, normalement, comme une suite de plans vus par un touriste normal, du matin à la nuit. Une ambiance très différente et plus du point de vue d'un visiteur. Plusieurs millions de vues sur YouTube.



Enfin, comment ne pas citer ce film nauséabond du ministère syrien du tourisme pour nous inciter à visiter Alep (le côté Ouest contrôlé par le gouvernement). Sans rien mentionner des drames à quelques centaines de mètres. Le tout sur un fond musical dérangeant puisqu’il s’agit d’un arrangement du thème musical de Game of Thrones (si, si) pour lequel on imagine des droits d’auteur gigantesques (et impayés). On n’est pas à Paris évidemment. Mais on est bien dans le cadre d’une promotion touristique sans vergogne, non ?


vendredi 14 octobre 2016

L'UNESCO entre le marteau et l'enclume

L'UNESCO a du souci à se faire. Depuis un certain temps, les USA ne payent plus leurs cotisations (on en est à plus de 500 millions de dollars d'arriérés) depuis l'adhésion des palestiniens.

Le Japon vient d'annoncer qu'il suspendait aussi sa cotisation. Il était devenu de facto le premier contributeur, car il était deuxième derrière les USA. Derrière, il y a la Chine, l'Allemagne et la France (normal puisque le siège de l'UNESCO est dans les deux quartiers à Paris, derrière l'école militaire).

La raison invoquée est liée à une sombre histoire d'inscription au patrimoine immatériel des documents historiques relatifs au "massacre de Nankin" en décembre 1937 (en Chine). Le Japon (n°2) est furieux et la Chine (n°3) contente. Ceci n'est pas un chantage, comme aurait dit Magritte, ni la lutte pour un grand chelem au tennis. Les Etats ne sont pas comme ça, voyons ! Ni la diplomatie ! Le gouvernement japonais nie bien sûr tout lien entre les deux événements.

Le paradoxe est que débute au siège de l'UNESCO à Paris une exposition sur la culture japonaise "Voyage créatif au Japon"... Froid glacial sur le hall d'exposition, les fleurs des cerisiers sont depuis longtemps tombées dans l'oubli. Ah zut ! Et puis, deux jours avant, il y avait la remise d'un prix UNESCO-Japon...

Le même jour, on apprend que c'est Israël qui coupe les ponts avec l'UNESCO suite à des textes votés qui ne plaisent pas à Jérusalem sur l'affectation aux palestiniens des lieux sacrés à Jérusalem-Est. Israël ne payait pas beaucoup, mais cette coupure de liens va impacter les actions sur le patrimoine dans cette région. Une région riche s'il en est en patrimoine pour au moins trois religions. Ce coup-ci la France s'est abstenue. Elle est donc critiquée de partout.

L'UNESCO vivote déjà sur un certain nombre de programmes qui ont beaucoup réduit. Idem pour les traductions et l'interprétariat lors des réunions : ça fonctionne toujours pour les grandes conférences avec ministres etc. mais pas pour les réunions de travail entre experts, ou presque plus.

Sale temps pour la Directrice générale de l'UNESCO qui vient en plus de se faire recaler comme SG de l'ONU. Une fin de mandat agitée, c'est le moins qu'on puisse dire.

Bon, au moins une bonne nouvelle : il y a ce projet d'inscrire au Patrimoine mondial de l'UNESCO le droit normand. Si, si, je vous jure monsieur le juge. A priori pas de risque, si le projet est refusé, que la Normandie déclare la guerre à la Bretagne... Quoique...

PS : J'ai passé la journée dans un colloque organisé avec l'UNESCO, sur les stratégies numériques dans l'enseignement supérieur. Quelques tweets @2012a2017 et des débats archivés ici. Qu'en dire, sinon qu'il y a un écart entre les hautes sphères de la diplomatie intergouvernementale et le concret des projets de terrain sur un sujet pourtant profondément disruptif pour tous, de l'apprenant que nous sommes à l'enseignant que nous sommes peut-être aussi.

jeudi 13 octobre 2016

Alfred Dylan ???

Bob Dylan, prix Nobel de littérature 2016, le premier musicien à l'être, pour la poésie de sa musique et donc la littérature de ses paroles.

Bravo. Récompenser ainsi un jeune dynamiteur de la musique américaine de 75 ans est un bel exploit pour les héritiers de l'homme qui a inventé la poudre (ou presque). Une belle reconnaissance pour un artiste qui a accompagné la jeunesse des vieux d'aujourd'hui. Un OVNI tombé d'on ne sait où sur une "icône" comme ils disent. On attend qu'il se retourne dans son lit pour réagir, lui qui n'aime pas les armes.

Dylan n'est pas encore mort, malgré son âge. Il a sorti son dernier album il y a un peu plus de six mois. On attend le suivant, financé avec le million de dollars qu'il va recevoir. C'est une surprise et on imagine tous les journalistes ressortant la nécrologie toute prête, allant sur Wikipédia ou fouillant dans leurs vieux albums. Je vous laisse le plaisir de le (re)découvrir ici par exemple...

Alors, après avoir ouvert le Nobel à la musique et à ses paroles, que sera la prochaine étape ? les oeuvres des hommes politiques, retranscrites plus ou moins bien par des journalistes, comme le papatras qui est tombé cette semaine sur la tête de François ? les notes de pressing et autres post-it laissés en héritage aux Archives nationales par Giscard après la fin de son mandat ? l'humour à travers les chroniques sur les radios ou avec les sketches politiques ? des formes multimédias de la littérature, puisqu'il y a aussi de l'écriture scénaristique ?...

La surprise créée par cette annonce est totale. L'époque des "crazy speculations" est loin. Il y a pourtant un culte "Dylan" chez les scientifiques en Suède... Le favori était Adonis, le grand poète syrien, mais cette année la Syrie n'a pas eu de chance, sans jeu de mots. Le coup de jeune (paradoxal) pour les Nobel est bien calculé, très folk lore (en deux mots). "The great American tradition", comme ils disent ? Une idée contre Trump ? Un message subliminal contre Poutine ? Meuh non, juste un hommage.


La littérature a un son donc, depuis aujourd'hui, au sens planétaire des prix Nobel. Celui de la voix grinçante de Dylan et d'un rythme entêtant, autour de mots combattifs. Et les Nobel peuvent ainsi profiter de l'image de Dylan, plus que l'inverse.

Un commentaire sur Dylan et le Nobel, avant ?

After these possibilities, there is the category of long shots, led by the poet and musician Robert Allen Zimmerman, aka Bob Dylan. Daniel Karlin, Dylan maven and professor of English literature at the U.K.’s University of Bristol, told the Forward, “I have less faith than I did when I was younger that the Nobel Committee would have the gumption to [award Dylan the prize]. The Nobel Prize would ‘add’ nothing to Dylan; Dylan’s name would add luster to the prize.” If the unlikely occurred and he received the honor? “[Dylan] would accept it,” Karlin suggested, “and would make some odd, unpredictable, possibly offensive statement about it. I like to think that his acceptance speech would consist of a performance of ‘Long and Wasted Years’ from ‘Tempest.’”

Yet the eminent aficionado Christopher Ricks, literary critic and author of “Dylan’s Visions of Sin,” is not holding his breath. Dylan’s “art is that of tripled media, compounded: voice, music, words,” Ricks cautioned, adding, “Literature is probably best thought of — most of the time — as the art of a single medium, language… And the prize for literature may be best left to literature, I think, not to arts that have words as one among several media… A price is paid for these crossings over, and the price is probably not worth paying when Dylan’s name and fame — and achievement — are such as to make his art stand in need of no such recognition.”