Depuis le 8 mai 2017 un blog nouveau style
(du 6 mai 2012 au 7 mai 2017 ? le quinquennat de François Hollande au jour le jour) : International, France, politique, science, francophonie, et même du temps de cerveau disponible de temps en temps pour des nouvelles
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jeudi 30 avril 2015
La corniche d'or, petite balade en mer dans les calanques de Saint-Raphaël
mercredi 29 avril 2015
Auteurs et éditeurs : de nouvelles règles du jeu numérique
La ministre de la culture et de la communication a présenté un projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2014-1348 du 12 novembre 2014 modifiant les dispositions du code de la propriété intellectuelle relatives au contrat d’édition.
Cette ordonnance, qui transpose les grands principes ayant fait l’objet de l’accord-cadre du 21 mars 2013 entre le Conseil permanent des écrivains (CPE) et le Syndicat national de l’édition (SNE) sur le contrat d’édition dans le secteur du livre à l’ère numérique, est entrée en vigueur le 1er décembre 2014. Ses modalités d’application ont été précisées par l’accord interprofessionnel du 1er décembre 2014 entre le CPE et le SNE, lequel a été étendu à l’ensemble des auteurs et des éditeurs du secteur du livre par un arrêté de la ministre de la culture et de la communication en date du 10 décembre 2014.
La notion de contrat d’édition couvre désormais tant l’édition des exemplaires physiques d’une œuvre que la réalisation de cette œuvre sous une forme numérique.
L’ordonnance définit l’étendue de l’obligation qui pèse sur l’éditeur en matière d’exploitation permanente et suivie, et de reddition des comptes pour l’édition imprimée et pour l’édition numérique. Elle prévoit la possibilité pour l’auteur ou l’éditeur de mettre fin au contrat d’édition en cas de constat d’un défaut durable d’activité économique dans l’exploitation de l’œuvre.
L’ordonnance garantit également une juste rémunération de l’auteur en cas d’exploitation numérique. Les conditions économiques de la cession des droits numériques feront l’objet d’un réexamen régulier, afin de tenir compte de l’évolution des modèles économiques de diffusion numérique.
La présentation du projet de loi de ratification est l’aboutissement de cette réforme qui doit permettre d’accompagner les mutations de l’édition en garantissant des relations contractuelles équilibrées entre auteurs et éditeurs."
En clair, il s'agit ici d'un double mouvement, pour contenter les auteurs bien trop exploités par leurs éditeurs, et pour contenter les éditeurs sur le volet numérique. Sachant que le monde de l'édition française est l'un des plus ringards au monde, sinon le plus, tout projet de loi dans ce domaine est intéressant à surveiller. D'autant plus qu'il s'agit ici de mettre en place une loi a posteriori après des négociations acides entre auteurs et éditeurs. On attend la réaction de leurs représentants et des autres acteurs du secteur, des libraires aux multinationales du livre, en commençant par Amazon qui ne se contente pas de distribuer des livres. Cette loi et les ordonnances et arrêtés de la fin 2014 auront des conséquences directes pour beaucoup d'auteurs. Une analyse juridique ici, entre autres. Les négociations duraient depuis quatre ans, donc avant 2012... Deux exemples de conséquences pour les auteurs :
- un auteur pourra obliger son éditeur à publier aussi sous forme numérique son œuvre, et pourra le quitter s'il refuse, en récupérant ses droits.
- un auteur pourra renégocier le montant de ses droits d'auteur pour les versions numériques, sachant que les frais de distribution sont bien moins élevés dans ce cas. Dépasser les 10 ou 15% serait donc possible à terme.
Évidemment, il faudra du temps. Comme pour les femmes, dont on fête aujourd'hui les 70 ans depuis la première élection à laquelle elles ont eu le droit de participer (des élections municipales), mais qui sont toujours aussi peu présentes dans la vie politique française. Le scandale des élections départementales en témoigne : malgré une parité stricte imposée par la loi pour les candidatures, le pourcentage de femmes occupant des postes à responsabilité dans les assemblées territoriales est très en dessous des 50%. Les hommes sont toujours très myopes. Et en France le monde de l'édition est également très masculin. Alors les lois, sans une volonté partagée de les appliquer...
mardi 28 avril 2015
Du plus haut au plus bas, hommes et catastrophes
lundi 27 avril 2015
Dépenser moins ou dépenser plus ? Dépenser mieux peut-être ?
dimanche 26 avril 2015
Du temps de cerveau pour... une nouvelle carte des vents
Depuis que jnou'ai atterri ici, c'est la première fois. Cela veut dire que la phase initiale est terminée et que monotre corâme est ajusté aux conditions bizarres de cette planète. Le Maîtresprit mnous'avait prévenu évidemment, mais jenous ne pensais pas que cela prendrait aussi longtemps, presque une périmaine. Il faut dire que jnou'ai été bien occupé ici. Il a fallu installer le campement et ses protections, et les nuits ont été courtes. et sans rêves donc.
Mais cette nuit tout a changé. Jenous rêve enfin. Vous vous demandez peut-être comment on sait qu'on rêve ? Jnou'ai entendu dire que chez les peuples qui ne participent pas au Jeu, il suffit de se pincer pour savoir si on rêve. C'est bien puéril comme réaction et typique de planètes peu évoluées et qui ne connaissent pas les rêvonds, les rêves les plus profonds qui puissent exister. Chez nous, on sait quand on rêve vraiment. C'est lorsque le corâme se divise et qu'on commence à coursauter.
Ah, combien coursauter menous manquait ! C'est la sensation la plus agréable qui existe. Vous êtes là, debout, toutes vos pattes bien ancrées dans le sol, et vous sentez votre corâme affleurer à la surface, comme une bulle qui vous protège et vous entoure. Puis il arrive, ce moment délicieux où la bulle se détache de vous, de tous les points au même moment, avec un frisson de plaisir qui n'a pas d'égal dans la galaxie. Et vous commencez à courir pour sentir la bulle vous entourer, vous frôler, vous étirailler. Et vous courez de plus en plus vite, de toutes vos pattes, en sautant de plus en plus loin. Et puis arrive peut-être, si les conditions sont réunies, ce moment suprême où grâce à un dernier coup de reinerfs, vous continuez à courir en ne touchent plus le sol, comme un saut permanent, comme une délicieuse coursaute sans fin. Un saut au-delà du saut, une course au-delà de la course. Une coursaute qui fait exploser la bulle comme si l'univers entier était la bulle et vous le centre du monde. Vous, et tous vos vous, je, nous, elles, ils...
Jenous coursaute enfin, tous réunis et séparés jenous sommes les rois du rêvond. Monotre corâme est éclaté et infini, il parcourt le monde dans tous les sens. Chaque graine du corâme est indépendante et pourtant reliée à toutes les autres. Jenous vois la planète, jenous la pressens par toutes menos graines. La coursaute est en action. Elle ne s'arrêtera que lorsque tous les êtres vivants de la planète auront été ensemencés. Cela peut prendre plusieurs périmois, mais jenous mnou'en moque. La coursaute est si agréable, si parfaite qu'elle pourrait durer toute manotre vie. La vie.
Car jenous sais que le rêvond a une fin. Jenous sais que la coursaute s'arrêtera, que le corâme s'éteindra lorsque la planète sera prête à germer. Et jenous sais qu'alors le réveil aura lieu. Jenous n'existerai plus, seulement des milliards de "je" séparés les uns des autres pour toujours, moi coincé dans l'un d'eux, vaquant à nos occupations dans la viéveillée et essayant chaque nuit de retrouver notre union dans des rêves qui pourront peut-être, avec un peu de chance et si jenous ai bien coursauté, devenir des rêvonds.
Mais pour le moment, le rêvond est à moinous, seul et tous à la fois. Il sera peut-être impossible de le retrouver après la germinaissance de cette nouvelle planète. Seul le Maîtresprit sait si cette coursaute réussira et si cette Terre rejoindra le grand Jeu. Mais jenous suis optimiste car cette coursaute est si belle qu'elle ne peut échouer. Vous ferez bientôt, comme nous tous, de beaux rêvonds.
samedi 25 avril 2015
Attention au pastis méditerranéen
Marius : Et ça fait quatre tiers.
César : Exactement. J'espère que cette fois, tu as compris. (Il boit une gorgée du mélange)
Marius : Dans un verre, il n'y a que trois tiers.
César : Mais, imbécile, ça dépend de la grosseur des tiers !
Marius : Eh non, ça ne dépend pas. Même dans un arrosoir, on ne peut mettre que trois tiers.
César (triomphant) : Alors, explique-moi comment j'en ai mis quatre dans ce verre !
Marius : Ça, c'est de l'Arithmétique.
Marcel Pagnol, Marius, Acte I, scène 2.
vendredi 24 avril 2015
Bisbilles tropéziennes
jeudi 23 avril 2015
Saint Georges, une fleur et un livre
mercredi 22 avril 2015
Vacances politiques à droite
mardi 21 avril 2015
L'Europe, un continent ou une île ?
lundi 20 avril 2015
Saint-Raphaël : sans frite mais avec du sel
dimanche 19 avril 2015
Du temps de cerveau pour... une nouvelle fois sans de neufs essedéheffes
Vous ne devinerez jamais ce qui m’est arrivé ! Il n’y a pas que pour les riches que l’or tombe du ciel !
Je me présente. Albert, 49 ans, homme de la rue. Quand j’étais jeune on disait encore clodo. Maintenant on dit essedéheffe, sans domicile fixe. C’est moins bien je trouve. En plus c’est faux. J’ai un domicile moi ! Place Clichy même, au pied d’une des nombreuses banques du coin. Pas loin de Pigalle et de Montmartre, avec une grille chauffée, ce qui est bien pratique en hiver.
Justement, en hiver, on y est. Et un sacré hiver pour le coup. Avec leur réchauffement climatique, ils m’amusent. Qu’ils viennent ici en plein vent sans grille chauffée et on verra combien de temps ils restent, les fameux spécialistes ! Enfin, moi je dis ça, j’ai rien dit. Je n’ai pas fait d’études, mais la rue est une bonne école.
Tout aurait été bien sans deux problèmes simultanés, concomitants et liés. Ils font des travaux dans le quartier pour réparer le chauffage urbain, en plein hiver, tu crois ça, toi ? Alors ma grille est devenue froide. Et comme la grille chaude la plus proche est occupée par ce salaud de Marcel, j’ai dû me rapprocher de lui. Marcel pue. C’est pas bon pour mes narines et pour les affaires. Moi je joue de la musique - de l’harmonica - et plutôt bien. Ca me rapporte assez pour tenir, même en hiver. Mais Marcel, lui, il ne fait que mendier. Il m’a demandé un pourcentage sur mes recettes pour partager « sa » grille et en plus les passants font un détour. A cause de l’odeur.
Je commençais à me dire qu’il allait falloir que je déménage, quand j’ai vu mon portrait dans le journal. Je vous jure. C’était un dessin, pas une photo, mais c’était bien moi, juste un peu plus rasé et mieux coiffé. L’article disait qu’il s’agissait du portrait robot d’un truand qui avait dévalisé une banque à Paris, e qu’il était activement recherché car très dangereux. J’ai relu l’article trois fois. J’ai réfléchi et je suis allé faire quelques courses.
Oui les essedéheffes aussi font des courses, faut pas croire ! C’est juste qu’on n’a pas de quoi avoir un logement en général. J’ai commencé par aller voir Jules, square des Batignolles. Jules est toujours de bon conseil. Il était avocat avant la prison. Il m’a bien éclairé sur les peines encourues et les délais. Ca m’a coûté une bouteille de rouge, même pas étoilé, mais ça valait le coup. Ensuite je suis passé chez un fripier à Pigalle pour m’équiper de pied en cap comme un mec qui ne dort pas dans la rue. Ca m’a couté moins de dix euros pour une tenue complète. Enfin je suis allé chez Raoul, le meilleur rapport qualité-prix des coiffeurs à Paris. Je lui ai montré le dessin et il m’a fait plus ressemblant que le vrai, j’en suis sûr. Ca m’a coûté… Non, je ne vous dirai pas ce que ça m’a coûté, c’est trop privé.
Ensuite je suis revenu sur la place et je me suis mis devant Marcel. Il a dit « une petite pièce, monsieur ? » puis il a levé les yeux vers ma ceinture et a ajouté : « ou un billet, mon prince ? » et enfin il m’a regardé dans les yeux. Il a cillé et il a dit, d’une toute petite voix : « Albert ? »
J’ai souri. Mon costume faisait vraiment de l’effet. Marcel avait l’air vraiment surpris de me voir comme ça. Il a d’abord cru que j’avais gagné au loto, puis je lui ai expliqué mon plan. Il a regardé la photo et a souri. On a négocié un certain temps mais à la fin on est tombés d’accord. J’y ai laissé mon manteau en pure laine chinoise de Belleville quand même.
Ensuite Marcel est parti téléphoner et je me suis installé un peu plus loin avec mon harmonica. Les flics sont arrivés très vite, et en nombre. De plus en plus efficaces nos poulets. J’ai été très impressionné ! Ils m’ont embarqué vite fait. Marcel s’était bien gardé de revenir mais je savais qu’il observait la scène de loin pour la raconter aux copains.
Ils m’ont mis en cellule (chauffée) et j’ai attendu. Ils ont pris l’harmonica évidemment, mais ça allait. Je sais attendre. Il y a tellement d’histoires à se raconter dans sa propre tête… Puis il y a eu la garde à vue évidemment et ils m’ont pas mal asticoté. Mon idée initiale était de ne pas avouer évidemment - pas folle la guêpe - mais de nier avec mollesse pour me faire mettre en prison quelques semaines, en attendant une libération inéluctable et la fin des travaux de chauffage, ou au pire la fin de l’hiver. D’après Jules, mon cher avocat aviné, ça devait coller.
Ca ne s’est pas passé comme ça. Je n’avais encore jamais été questionné par des pros et c’est pas rigolo. Je me suis mis à regretter cette bonne idée qui était devenue assez mauvaise en fait. En plus il fallait tout leur répéter à ces cons là. Ils ne voulaient pas croire que j’étais un SDF comme ils disaient sans prononcer le H. J’étais trop bien habillé pour eux. Je devais crècher quelque part. Et sur mes antécédents ils ne retrouvaient rien. Normal. Je n’ai jamais été fiché. Comme j’ai le teint un peu basané, à force de rester dans la rue, ils ont vérifié mes papiers plusieurs fois. Mais ils étaient vraiment très bien faits, je ne rigole pas là-dessus. Je me fournis toujours chez les meilleurs faiseurs de Barbès.
Ils ont étendu la garde à vue au maximum. A la fin j’ai un peu craqué, je dois l’avouer. J’ai donc avoué ce qu’ils voulaient. Ils ont souri comme de vrais carnassiers qu’ils étaient. Le passage devant le juge pour m’écrouer a été très rapide et je me suis retrouvé à Fresnes. Au moins, comme je suis considéré dangereux - il semble que le truand ait tiré et blessé un vigile - on m’a donné une cellule seul. Et chauffée !
Ca fait maintenant un mois que je suis ici. Le procès est pour la semaine prochaine. Procédure d’urgence qu’ils ont dit. Nickel. Ils m’ont même redonné mon harmonica et ensuite du papier à musique et un crayon. Ils trouvent que je joue bien. Je viens de terminer ma première symphonie pour harmonica et orchestre et j’ai entamé la deuxième. Bon, c’est vrai que la bouffe n’est pas terrible, mais au moins pendant ce temps je ne dépense rien et mon argent travaille tranquillement à la banque - juste derrière ma grille. En plus celui de la cellule d’à côté m’a fait signer un contrat pour jouer mon oeuvre en avant-première à New-York. C’est un producteur véreux mais connu. Un vrai coup de chance !
Maintenant, il ne reste plus qu’à espérer que le reste du plan fonctionne bien. Marcel et Raoul doivent venir témoigner au procès et raconter ma « transformation ». Normalement, je devrais être libéré dans la foulée. Normalement… Sauf si Marcel joue un plus fin. Il en est bien capable, ce con.
samedi 18 avril 2015
Vacances
Je sais, je sais, vous êtes jaloux, mais bon, chacun son tour. Quelques remarques.
D'abord je continuerai à bloguer chaque jour que François fait. Ce blog quotidien né le 6 mai 2012 n'a jamais connu d'interruption. Il n'y a pas de raison que ça commence. La seule chose que je ne garantis pas c'est l'heure où le billet du jour est publié. Ca peut être à 7 heures du matin quand je l'ai écrit d'avance. Ca peut être à 23h45 juste avant l'heure fatidique. Ou n'importe où entre les deux. Je vous dois ça, mes lecteurs. Je me le dois aussi. Je vous rappelle juste ce billet sur la raison d'être d'un blog quotidien, AMHA, à mon humble avis.
Ensuite, je vais au bord de la Méditerranée. A la fois en France donc et dans la région du Front National. Je vous promets que je ferai attention. Aujourd'hui d'ailleurs le FN a confirmé que la tête de liste pour les régionales en PACA serait l'autre Marion, la jeunette de 25 ans... L'autre Marion ? Oui, au cas où vous ne le sauriez pas Marine s'appelle en fait Marion. On est très mar(t)ial chez les Le Pen. Il y aura peut-être des choses à dire à ce sujet... on verra. Je ne vais pas vous gâcher vos vacances (ni les miennes) en parlant de ces affreux tout le temps, non mais !
Enfin, la Méditerranée ça donne envie de voyager. Alors un peu plus de légèreté peut-être pendant ces deux semaines, vers des contrées joyeuses, loin des lambris des palais républicains. Ah zut, on ne pourra plus dire républicains bientôt si la préemption par Sarkozy réussit. D'ailleurs il faudra trouver un signe à ce parti, notamment pour les tableaux et les enquêtes. Pas plus de 5 lettres (MoDem a été le plus long). Faudra-t-il les appeler LR au lieu de UMP ? Ou LRS comme les républicains de Sarko ? Ou LRD comme les Républicains de droite ? On verra. En attendant, la Droite, elle erre !
A l'heure où ce billet sera publié je serai dans le train. Un beau TGV avec un peu
vendredi 17 avril 2015
Expliquer.
Six heures et un mot "Expliquer". C'est un peu sec, vous pensez ? Quelques explications :
- Ce concours est réputé comme le plus difficile de France (et certainement l'un des plus difficiles au monde) et l'un de ses principes est de déstabiliser ceux qui peuvent l'être tout en étant hyper-sélectif, bien au-delà d'autres concours plus tournés sur des compétences existantes.
- Le sujet s'inscrit dans le thème de l'année, histoire de le replacer dans son contexte. Or le thème de cette année était la science. Ce qui permet d'expliquer un peu mieux le mot expliquer.
- La philosophie est un ensemble de méthodes à appliquer à tout un tas d'objet ou à elle-même, comme ici. La philosophie ne doit reculer devant rien.
- Souvent les sujets de philosophie comprennent plusieurs mots qu'il faut commenter séparément ainsi que l'articulation entre eux. Avec un seul mot il s'agit donc de l'articulation avec soi-même. Et a priori en y réfléchissant bien il n'y a pas de difficulté majeure à ce sujet.
Je vous vois soupirer. Vous préférez prendre un café au soleil que d'avoir à rester six heures devant une feuille à remplir sur ce sujet. Je vous comprends. Mais ce sujet est remarquable, vraiment et au delà des humours désabusés de celles et ceux qui ne savent pas comment s'en dépêtrer. Explique, point. Expliquer un point c'est tout.
Expliquer c'est un art difficile, surtout en sciences. Pour mémoire, la philosophie est considérée comme une science aussi. Expliquer ce n'est pas trouver des causes, simplement. Tous les scientifiques savent qu'on ne peut expliquer sur le fond que dans certaines conditions : montrer qu'une théorie antérieure est fausse car un fait vint la contredire, comme disait Popper par exemple. On se voit bien écrire des heures sur le sujet, non ?
Expliquer, en tous cas, est un mot avec plusieurs avantages : il met dans l'ombre les doctrines où on n'a pas besoin d'expliquer, mais juste d'accepter : les terrorismes, les religions, les dogmes décrétés ; il met en plus au défi d'expliquer avec un adverbe derrière : clairement (ce qui se comprend bien s'énonce bien), complètement (est-ce possible ?), hypothétiquement (sur la base de conjectures fulgurantes). Expliquer pose enfin des questions de type journalistique, sans parler de vulgarisation : expliquer quoi, à qui, par qui, comment, quand (merci à Galilée), où ?
Le mot expliquer a beaucoup disparu du langage des médias et des politiques. Alors, vive les philosophes ! Et à l'ère des tweets, vive les sujets courts.
PS : ce jeudi se tient aussi aux USA la plus importante convention de l'année autour de Star Wars. Sauront-ils "expliquer" la force et les midi-chloriens ?
PPS : Pour ceux qui se demandent en quoi une calculatrice pourrait être utile pendant une épreuve de philo, je vous donne quatre heures, cela devait suffire pour l'expliquer !
jeudi 16 avril 2015
Harcèlement sexiste et #plutôtsympa
Pour ceux qui ont raté un épisode, il s’agit du harcèlement des femmes par les hommes, dans la rue ou dans les transports en commun principalement. Le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes vient de rendre un premier rapport/avis sur ce phénomène dans les transports (pdf ici).
Avec une conclusion imparable : 100% des femmes ont été harcelées ou pire victimes de violences sexuelles au moins une fois dans leur vie, beaucoup pendant qu’elles étaient mineures. Une réalité difficile à entendre et à comprendre pour les hommes qui ne veulent pas admettre de tels comportements.
Dans le même temps, une femme habituée de propos machistes contre les femmes, Sophie de Menthon, s’est fendue d’un tweet dans lequel elle trouve que se faire siffler dans la rue est plutôt sympa... Ce qui a déclenché a contrario une campagne de tweets avec le hashtag #plutôtsympa pour justement dénoncer toutes les formes de harcèlement sexiste. Et non, je ne la harcèlerai pas en disant que cela ne doit plus lui arriver souvent...
C’est un sujet délicat à aborder sereinement. Suivant le moment où vous êtes, homme et femme, et suivant celles et ceux qui vous entourent, chacun va en parler de manière différente. Avec un grand sérieux docte, avec un militantisme énervé, avec un sourire narquois ou avec une violence assumée.
Evidemment, tous ceux qui ont été agressés ou témoins d’une agression - même d’un vol - savent que le coupable « professionnel » va toujours adopter la même attitude : insulter la victime en parlant très fort (mais pour qui elle se prend, la folle...) intimider en bougeant et partir en gueulant. La plupart des témoins n’ayant rien remarqué avant, ou n’ayant rien voulu remarquer c’est pareil, risquent alors de se ranger du côté de celui qui gueule le plus, l’agresseur. C’est un cas classique enseigné dans toutes les bonnes écoles de pickpockets et autres truands. Le problème n’est pas tant les « professionnels » mais le tout-venant, l’usager normal qui se croit plus fort que les autres... et qui aura du mal à supporter la honte du regard des autres après un tel esclandre.
Agir comment, alors ? Par une attitude de chacun à chaque instant, et je m’adresse plus particulièrement aux hommes, tentés par ça ou témoins ? Par des actions publiques portées par le gouvernement (et ses femmes ministres), et lesquelles ? Par l’humour, par le mépris, par le ridicule ? Par le théâtre dans Polyeucte, Acte I, scène 1 « Et le désir s’accroît quand l’effet se recule » ?
Certains essayent l’amalgame en assimilant ces pratiques de harcèlement à la drague classique qui avance ou pas selon un accord qui se forme progressivement entre les deux parties. Il y a pourtant une différence, mais pas toujours. Je me souviens d’avoir vu un reportage il y a quelques années à la télé sur « comment draguer à Paris aux beaux jours ? » Il y avait une interview d’un mec qui décrivait sa technique à une journaliste : il parcourait les Champs-Elysées et demandait à toutes les femmes seules « voulez-vous coucher avec moi ? ». La journaliste s’était émue et avait dit un truc du genre « Ah ben dis donc. Mais ça ne doit pas marcher votre technique ». Et le mec avait répondu « Détrompez-vous. Ca marche une fois sur cent. Ca me suffit ! »... Et ça avait scotché la journaliste. Il est pourtant clair qu’on était ici dans une technique de harcèlement, pas dans de la drague. Non ?
mercredi 15 avril 2015
François Finlande et l'Alsacienne de constructions atomiques, de télécommunications et d'électroniques
Cela nous laisse deux géants européens en Europe, un en Finlande et l'autre en Suède (Ericsson), pour essayer de contrer les géants asiatiques et américains. C'est donc une grande victoire
Alcatel a eu une vie agitée, à coups de rachats, de fusions, de plans sociaux et d'errements stratégiques. Nationalisée en 1983 par un autre François dans le cadre de la CGE, Alcatel s'appelait à l'origine l'Alsacienne de constructions atomiques, de télécommunications et d'électroniques. C'est l'époque des fusions pour les régions et aussi les multinationales. L'Alsace aussi.
La France perd donc définitivement l'un de ses fleurons, même si plusieurs milliers de salariés y travaillent, notamment dans des centres de recherche. C'est d'une logique imparable : la recherche en France, les brevets en Finlande et les usines ailleurs. C'est ce qu'on appelle une grande vision industrielle stratégique, pour un pays - la France - qui n'a plus les moyens de ses ambitions passées et qui essaye quand même de faire croire qu'elle peut développer sur son territoire des géants internationaux.
Quand on parle de la France numérique et de ses startups (destinées à grossir ou à se faire racheter par des grands groupes) on imagine un avenir doré. La signature de pas mal des acteurs du numérique contre la loi sur le renseignement - dont on a parlé lundi - est révélatrice d'un malaise entre industriels, fournisseurs de services et Etat, dans des dossiers pourtant stratégiques pour l'avenir. Un environnement favorable eu développement, c'est une alchimie délicate et en perpétuel déséquilibre. Un environnement qui ne se décrète pas, mais qui se courait par touches. Ou se déconstruit.
On saluera donc cette grande victoire du court terme sur le long terme : Le gouvernement s'intéresse plus à la protection de quelques milliers d'emplois en France qu'à un aménagement du territoire et de l'environnement numérique. Est-il au courant que le nouveau Nokia a déjà annoncé plus de 900 millions d'euros d'économies grâce aux synergies ? Vous avez dit synergies ? on pourrait dire économies d'échelles, restructurations, ajustements structurels, consolidation, licenciements, restructurations. Chez l'intrus dans l'énumération précédente...
mardi 14 avril 2015
Paris calculés
Lundi, Anne Hidalgo a emporté avec une majorité écrasante le vote pour que Paris soit candidate aux JO de 2024. Ces JO sont promis à l'Europe et il y aura une belle bataille avec les allemands et les italiens au moins. Décision en 2017. Le gouvernement soutient et la communauté sportive aussi, derrière M. Lapasset. Après 2012 et le vol du bourdon anglais, c'est une affaire à suivre, surtout dans les détails : quel aménagements, où sera la grande piscine, etc. On remarquera juste une question de leadership. Alors que le projet 2012 était porté par la ville et son maire, le projet 2024 sera a priori porté par le mouvement sportif - avec le soutien de la ville. Anne Hidalgo appréciera... Mais on est ici dans un jeu préparatoire de chaises musicales. Ce qui compte c'est d'avoir des voix fortes et un bon lobbying arrière.
La candidature de Paris pour la grande exposition universelle de 2025 est également confirmée chaque jour. Plus personne n'est gêné par la presque concomitance des deux projets. Au contraire, ils se renforcent l'un l'autre, histoire de donner un coup de fouet à la région. Construire de l'éphémère, le recycler pour d'autres événements ou le transformer en élément durable du paysage urbain, c'est un sacré problème.
Aujourd'hui en plus, le premier ministre, également très présent dans la région - à partir d'Evry - a annoncé les mesures arbitrées pour le Grand Paris. Quelques nouvelles mesures, en plus de celles dévoilées depuis des mois, et avant les grandes tractations au sein de la région (qui risque de changer de main en décembre lors des élections régionales prévues les 6 et 13. Parmi ces nouvelles mesures, l'annonce du renforcement des autoroutes dans la région, en plus des mesures connues sur les transports collectifs. Ca va plaire aux Verts ça ! C'est aussi reconnaître que la voiture est incontournable, tant qu'il y a du carburant pour les faire avancer.
Paris vu comme un moteur de la croissance et de l'emploi, dans le bâtiment et les services autour donc. Sachant qu'il n'y aura bientôt plus que 13 capitales régionales en France et que les batailles sont rudes en Normandie ou en Midi-Pyrénées par exemple, c'est un exemple à suivre pour les nouvelles régions, histoire d'attirer des partenaires frontaliers plus importants.
Heureusement pendant ce temps, certains continuent à s'occuper de choses essentielles. Sarkozy s'occupe de remplacer UMP par "Les Républicains", histoire de faire oublier Bygmalion. Un coup qui a déjà marché par le passé. Les français seront-ils encore aussi cons, ou ont-ils appris quelque chose ? Pourquoi ne pas appeler son parti les RépuByglicains ? ou simplement LR, comme une ligue républicaine dans les années 20 ? Il ne peut pas choisir l'éléphant comme symbole, ça ferait trop américain et les socialistes ont préempté le symbole... Au FN c'est plus simple, bientôt il y aura le parti Bleu Marine, le parti Bleu Marion et le parti Bleu Jean-Marie, en attendant la génération suivante et en espérant que cela soit aussi des filles.
lundi 13 avril 2015
Loi sur le renseignement : Derrière chaque français, deux ordinateurs et un vigile
Disons-le tout de suite, il s'agit d'une des lois les plus liberticides en France ! Ici, on est contre cette loi, comme la plupart des organisations qui connaissent le monde du numérique et ses dangers, ou qui défendent simplement des droits de l'Homme et du citoyen et de la personne qui téléphone, surfe ou écrit simplement un texte sur un clavier. On citera parmi les opposants à cette loi des noms comme la Quadrature du net, Gandi, le Syndicat de la Magistrature, Amnesty International, la CGT Police, La commission nationale consultative des droits de l’homme, l’Ordre des avocats de Paris, l’Union Syndicat des magistrats, Renaissance numérique, l’AFDEL, le Syntec Numérique, Human Rights Watch, la Commission du numérique, Charlie Hebdo (qui sert pourtant de contre-exemple dans les attendus de la loi). Vous pouvez y ajouter des grands fournisseurs d'accès et de services qui menacent même de quitter la France à cette occasion.
Manif aujourd'hui : 12h30 Assemblée nationale mais peu de monde attendu.
Il faut toujours un ennemi, ici c'est le terrorisme, pour justifier, ou essayer de justifier la perte de libertés. Comme disait Benjamin Franklin il y a longtemps et dans un autre contexte "Un peuple prêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité ne mérite ni l'une ni l'autre, et finit par perdre les deux". Le député rapporteur de la loi n'y va pas par quatre chemins, en expliquant que cette loi permet "une surveillance limitée à quelques individus qui présentent une menace avérée au regard de motivations sérieuses". Il critique donc ceux qui dénoncent une loi qui va beaucoup plus loin, beaucoup trop loin.
Il y a deux sortes de lois liberticides : celles qui sont décrétées par un gouvernement autoritaire (quel que soit son bord) pour écouter ses citoyens et réprimer les opposants ; celles qui sont prises pour de bonnes raisons à un moment donné (la sécurité ou le terrorisme) mais qui sont utilisées plus tard - par un autre gouvernement - pour des motifs qui ressemblent au premier cas ci-dessus. Mais dans les deux cas, ce sont des lois liberticides et qui vident à légaliser les pratiques illégales d'écoute et de renseignement. A force de légaliser l'illégal au bénéfice des forces de police, on se retrouve dans un Etat policier...
Il parait que ce combat n'intéresse que peu les français, qui sont contents d'une meilleure sécurité, dans un climat général de droitisation de la société. Les opposants sont accusés d'être des geeks et des spécialistes, sur un sujet trop technique. Prenons alors un exemple de dispositif interdit aujourd'hui, sauf mandat d'un juge, et qui sera utilisable légalement demain dès qu'un vague soupçon pèse sur n'importe qui : Les fameuses valises "IMSI-Catcher" qui permettent, à partir d'une simple mallette d'homme d'affaires, d'écouter toutes les conversations et communications dans un rayon de 500 mètres (qui sera forcément étendu dans les années à venir à plusieurs kilomètres avec les avancées de la technologie. Vous voulez participer à une manif et ne voulez pas que la police le sache ? Eteignez votre téléphone ou détectez si vous êtes dans une zone écoutée... C'est juste un petit exemple parlant (et écoutant).
Techniquement, celle loi est évidemment inopérante puisque les organisations réellement dangereuses sauront mettre n place des méthodes pour empêcher ces contrôles. Mais pas les citoyens de base, ni les apprentis terroristes ni les apprentis hommes politiques.
A vous de voir. Ou de ne pas voir. Ou d'être vu. Ou de ne pas être vu...
dimanche 12 avril 2015
Du temps de cerveau pour... une nouvelle fois sans tes dix-huit mètres
La juge regarda Xyla. Il était tard et cette affaire était la dernière de la journée. Il était difficile de garder sa concentration après tant de dossiers aussi différents. Heureusement tout ici avait l’air limpide et les informations se recoupaient. En plus, la femme jugée semblait très coopérative. Il n’y avait pas d’avocat. Il n’y en avait jamais pour de banales histoires de circulation. Les débats seraient expédiés plus vite, se dit la juge en fixant Xyla dans les yeux. Mais il y avait quand même une procédure à suivre et la juge était très respectueuse des formes. Elle attaqua donc son interrogatoire : « A quel moment précis à été prise cette image, Xyla ? »
- La photo a été prise juste avant, répondit Xyla. C’est une image automatique prise au moment exact où il franchit la limite, comme toujours en ce cas.
- Et à quelle distance fixez-vous votre limite ?
- Dix-huit mètres, répondit Xyla. Depuis toujours. Je trouve que c’est un joli nombre et cela convient parfaitement à la taille de mon habitat. D’ailleurs sur la photo, on voit bien qu’il commence à tourner la tête vers la gauche en arrière. Il est évidemment bien conscient qu’il vient de franchir la limite.
- Effectivement. Et que faisiez-vous à ce moment là ?
- Que faisais-je, madame la juge ? J’ai peur de ne pas bien comprendre. Je suis sur la photo, ici, au premier plan. Il est très clair que je suis occupée, répondit d’un air surpris Xyla.
- Oui, oui, évidemment, mais que faisiez-vous exactement ?
- Ah ! Excusez-moi, je n’avais pas compris, dit Xyla d’un air soulagé. Comme vous le voyez je possède un véhicule moderne à deux places et il était tombé en panne. Je le réparais simplement.
- C’est bien le modèle décapo-table de cette année que je vois là ? demanda la juge avec un petit sourire. Un modèle très à la mode, non ?
- Oui, madame, c’est le dernier modèle de chez Xylautomobiles, et je le possède depuis plusieurs mois. Il est extraordinaire. Ses performances sont remarquables et il a une esthétique rétro absolument unique.
- Mais les Xylautomobiles ne tombent plus jamais en panne de nos jours, demanda insidieusement la juge. Et surtout pas pendant les premiers mois. Racontez-moi ce qui s’est passé.
- Ah, madame la juge, je le pensais aussi, avant ce jour. Mais la panne est bel et bien arrivée. Comme vous le voyez j’avais choisi le modèle à deux sièges et avec une décoration soignée. Le réservoir à grains d’énergie était plein – on le voit bien au centre de la table – et tout allait bien. La route était belle et bordée de charmantes images de maisons anciennes. Depuis le matin, il était un peu agité et il buvait beaucoup de vin, mais ça me tenait compagnie, vous savez comme ils sont, dit-elle en faisant un clin d’œil.
- Continuez, dit la juge, amusée.
- Je lui ai demandé de rajouter un grain d’énergie dans le tube et il s’est trompé. Il en a mis deux avec un peu d’eau pour faire bonne mesure. Je croyais que nos véhicules étaient protégés contre ce type de manipulation, mais il faut croire que non. Le moteur s’est arrêté instantanément. J’ai même failli être décoiffée.
- Et ensuite, Xyla ?
- J’ai évidemment commencé à l’engueuler, mais cela ne sert jamais à rien avec eux. Ensuite je me suis ressaisie et je l’ai frappé, mais il n’a pas réagi. Je l’ai enfin fait sortir de table en lui demandant de ne plus toucher à rien. Puis je me suis glissée sous la table pour voir si je pouvais réparer quelque chose.
- Vous avez des connaissances en hypermécanique ?
- Un peu, madame la juge. On n’est pas l’héritière d’une famille de constructeurs automobiles sans avoir quelques connaissances. J’ai d’ailleurs tout de suite repéré la cause du problème. Le moteur principal avait un tuyau bouché avec une petite fuite. On en voit d’ailleurs nettement les conséquences sur la photo avec toutes ces horribles taches de graisse sur ma robe.
- Oui en effet, répondit la juge en examinant la photo. Et vous avez pu réparer ?
- J’étais en train de terminer de reboucher la fuite quand l’accident s’est produit.
- Ah. Racontez-moi ce que vous avez vu de l’accident, s’il vous plait.
- L’accident ? Mais je n’ai rien vu, Madame la juge. J’étais focalisée sur les entrailles de la table sous la nappe et je n’avais pas de raison de regarder dehors. Je savais qu’il n’était pas loin. Moins de dix-huit mètres naturellement.
- N’avez-vous rien entendu ?
- Ah si, Madame, j’ai entendu le petit carillon indiquant qu’il venait de quitter la zone permise et toute de suite après, avant d’avoir pu réagir, j’ai entendu le choc. Un choc terrible.
Xyla s’arrêta un instant. Elle venait de revivre ce pénible moment. Cela s’entendait. La juge comprit qu’il ne fallait pas pousser trop loin l’interrogatoire. Après tout il n’y avait pas eu de blessée et juste un homme mort. De plus sur la photo, on distinguait très nettement l’autre véhicule arrivant en face, avec sa conductrice debout sous son alcôve de verdure. Un bolide de course, déjà ancien mais très rapide. La juge estimait qu’entre le moment de la photo et celui du choc, il n’avait pas pu se passer plus d’une seconde. L’homme n’avait eu aucune chance. Surtout qu’il ne regardait plus devant.
- Je vois que vous aviez pris la précaution de garer votre véhicule au bord de la route, demanda la juge d’un air détaché.
- Oui Madame. C’est une précaution élémentaire, surtout avec ces bolides de course qui sillonnent les routes, répondit Xyla.
- Mais pourquoi, alors, l’avoir laissé, lui, errer sur la route ? demanda la juge sur un ton soudain très sérieux.
- Pardon ? dit Xyla en relevant les sourcils
- Oui, pourquoi l’avoir laissé là, au risque de créer un accident ? Sans surveillance ?
- Mais Madame ? Il était parfaitement conscient de ses limites et de ses devoirs. De plus toutes mes caméras étaient fonctionnelles comme l’ont montré les expertises. Il n’aurait pas dû rester au milieu de la route ! répondit Xyla indignée.
- Pourtant, il y était, non ? insista la juge.
- Oui Madame, répondit d’un air penaud Xyla. Je ne comprends pas pourquoi. Peut-être a-t-il eu un dysfonctionnement ?
La juge laissa planer quelques secondes puis elle reprit : « Merci Xyla. Mon interrogatoire est terminé et ma décision prise. Il n’y a en effet pas de drame dans cette affaire. L’autre conductrice n’a souffert d’aucune blessure et son véhicule d’aucun dommage. Les robots de service ont nettoyé toutes les traces. Je ne vois donc aucune raison de vous condamner. Vous êtes libre. Faites plus attention dorénavant ».
- Oui, merci Madame la juge, répondit Xyla. Elle était à la fois satisfaite de cette décision conforme à la loi et à l’usage, et soulagée par cette issue dont elle n’avait pas été certaine au début. Elle sortit de la salle, vaguement inquiète de ces sentiments contradictoires. Elle décida qu’il faudrait être plus prudente la prochaine fois.
La juge se leva. Elle continuait à penser que cette automobile était bien belle. Dommage qu’elle n’ait pas les moyens de se l’offrir. Celle-ci, se dit-elle en pensant à Xyla, elle a toutes les chances du monde. La juge était en effet convaincue que la première chose que Xyla allait faire en sortant d’ici c’était d’aller s’acheter un autre homme et de faire une balade en voiture avec lui. C’était la pleine période des soldes et on trouvait des hommes à tous les prix.
D’ailleurs, elle-même, peut-être pourrait-elle s’en offrir un de plus ?