lundi 13 janvier 2014

Hep, taxi !

Lundi. Grève. Galère. Ca sent bon la rentrée.
Ce coup-ci ce sont les taxis. (tract ci-dessous, venu d'ici, avec analyse des "lobbies" en course)


La grève de taxis est un grand classique. Pour le moment, toutes ces grèves ont "marché" et les taxis ont obtenu ce qu'ils voulait. Même le supposé Sarkozy de fer a cédé à l'époque et François aussi (plus mollement) puisque la loi votée leur accorde des privilèges par rapport à leurs concurrents.

Pourquoi une grève de taxis marche-t-elle ?
- comme toutes les grèves de transporteurs (camions, trains, métros, bus) ces grèves sont très visibles et peuvent facilement bloquer des villes ou un pays. Un camion, c'est évidemment puissant pour bloquer des routes, mais des centaines de taxis au même endroit c'est encore plus puissant pour bloquer des villes, où finalement il y a peu de voies pour entrer et sortir et peu de grandes artères. Ca fait de belles images à la télé et sur les réseaux sociaux. Et la perte potentielle d'image pour les touristes est forte.
- parce que les taxis sont très utilisés par les puissants, les riches, les gens de pouvoir, et que le standing de vie de ces VIP est vite atteint. Toucher en priorité la cible des décideurs est le rêve de tous les manifestants. Le paradoxe est que ces mêmes VIP vont donc utiliser plutôt les voitures avec chauffeurs de la concurrence, puisque les taxis sont moins fiables et que de toutes façons c'est leur employeur ou client qui paye.
- parce que lorsque quelqu'un de normal a besoin d'un taxi, en général c'est pour une bonne raison : bagages importants, une vieille personne qui ne peut pas se déplacer autrement, un trajet atypique qu'on ne sait pas faire autrement. Une grève gêne donc ces clients au pire moment pour eux et ils s'en souviendront longtemps. Impact maximum.
- parce que personne ou presque n'utilise les concurrents des taxis, donc personne ne sait comment ça marche.

Les taxis protègent donc leur monopole. Normal. Si vous cherchez des informations sur comment ça se passe ailleurs (qu'en France) ou comment ça se passe avec d'autres systèmes que le taxi, vous aurez du mal à trouver de l'information exacte et validée. Tout le monde dit un peu n'importe quoi, ce qui est une caractéristique des lobbies. est la vérité ?

A mon avis, on est dans un piège abscons (à ne pas - trop - confondre avec un piège à cons), tous les lecteurs du petit traité de manipulation à l'usage des honnêtes gens vous le diront. Le système français du taxi est ancien et a accumulé des couches et des couches de protection, comme un oignon. Il est devenu impossible de le réformer, couche par couche, sans couper l'oignon au couteau. Le système des licences par exemple a connu un cycle vicieux (de cercle vicieux) où le prix d'achat de ces licences a monté en flèche, comme un placement. Beaucoup de chauffeurs considèrent cette licence comme un investissement pour leur retraite et le ticket d'entrée est devenu trop cher pour les petits. Les licences sont aujourd'hui achetées par des investisseurs qui trouvent ce système rentable, puisque le nombre de licences est limité et ne peut augmenter (sinon, hop, une nouvelle grève). C'est comme pour les camions où par exemple des gens comme Line Renaud possèdent plein de licences. C'est ce que les économistes appellent une bulle spéculative. Pour le moment cette bulle continue à croître.

En fait c'est un problème de "qualité de service". Les taxis et autres véhicules avec chauffeur rendent (et vendent) des services à leurs clients. Il y en a plein de différents : la maraude (attraper un taxi au vol dans la rue), les files de taxis aux stations et dans les gares/aéroports, la réservation à l'avance, les véhicules spéciaux (plus de volume, moins de roues), les transports spéciaux (vers l'hôpital payé par la Sécu par exemple), les voyages longs entre villes, les transports de prestige pour VIP... sans compter les locations de véhicules sans chauffeur à la journée ou à l'heure.

Ce qui devrait compter c'est la qualité du service au client, non ? Et pas seulement la qualité des conditions de travail des fournisseurs. Si les deux marchent main dans la main, tout va bien. Si l'un des deux est insatisfait, ça ne va pas. Certains pays ont trouvé des solutions : séparer les services complètement (par exemple on ne peut plus réserver à l'avance des taxis mais seulement d'autres véhicules pour ne pas avoir le beurre et l'argent du beurre), augmenter drastiquement le nombre de taxis pour réduire le flot des autres voitures, avoir des tarifs fixes pour certaines courses plutôt qu'au kilomètre ou à chaque dix secondes (de l'aéroport ou par cercles concentriques).

Mais cela suppose du courage, qui s'effrite en face d'une grève. Courage de modifier les règles et les lois autrement qu'à la marge et pour la couche externe de l'oignon, courage de faire appliquer la loi en mettant sur le terrain suffisamment de contrôleurs, car il y a plein de manières de tricher dans ces sujets. Juste une pour vous faire marrer : C'est en banlieue et les taxis ont décidé que telle borne fixe ne leur convenait pas car trop près des clients potentiels ; ils préfèrent venir de plus loin pour avoir une prise en charge plus chère ; donc ils squattent la station et quand les clients appellent, ils ne décrochent pas ou ils prennent l'adresse mais ne viennent pas ; au bout d'un certain temps les clients locaux savent qu'il ne faut pas appeler cette borne et en appellent une autre ; simple et efficace. Je garantis l'exactitude de cette anecdote, mais cela ne reste qu'un exemple. Pas plus.

Donc,  pour les taxis aujourd'hui, c'est râpé. Pour la circulation à Paris, qu'ils veulent bloquer, on verra ce soir. Heureux les propriétaires de scooters, comme François, qui peuvent se déplacer facilement ;)

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