jeudi 4 septembre 2014

OTAN, reprends tes vols

C'est une blague éculée dans le monde diplomatique, s'il faut en croire le film "Quai d'Orsay", que de dire "OTAN, suspends ton vol". D'ailleurs ce demi-vers du lac d'amour de Lamartine a connu bien des avatars. Vous voulez lire quelque dizaines de variantes ? Allez ici, sur ce beau site malheureusement éteint. Le vers original est Ô temps, suspends ton vol, et vous heures propices !

Heures propices ? Quand on est président, toutes les heures sont propices à agir ou à ne rien faire, suivant les circonstances. Ne rien faire c'est agir aussi. Alors que le Sommet de l'OTAN commence aujourd'hui, tous les regards sont tournés vers l'Ukraine. Certains regards étaient tournés vers la France et ses "Mistral" gagnants ou perdants (billet du 14 août), mais François a désamorcé la bombe en décidant hier que la livraison du premier de ces deux bateaux n'était pas possible maintenant (lire, en octobre) car les conditions ne sont pas réunies. Les heures ne sont donc pas propices. Les mauvais esprits, après avoir réclamé pendant des mois l'arrêt de cette livraison, clament maintenant que c'est une décision dictée par les USA et Angela et les anglais (mais pas le Pape cette fois-ci) et que de nombreux ouvriers français vont être au chômage. Pourtant François a simplement dit que la livraison ne se ferait pas maintenant... La vie des hommes politiques est dure, guidés par leurs langues de bois.

Parler un peu d'international et d'OTAN relâchera peut-être la pression médiatique autour de François, en attendant la séquence parlementaire la semaine prochaine, avec le budget 2015 et la confiance au gouvernement. On remarquera qu'il essayait de se faire plus discret, en mettant son premier ministre fringant en première ligne, afin de se préparer au futur duel avec Sarkozy II le retour dans les prochaines semaines. Bataille de coqs à venir. C'est donc raté, grâce au livre de son ex-compagne, mais cela a au moins l'avantage de resserrer les rangs autour de lui dans son camp... C'est toujours bon à prendre.

Du côté Ukraine par contre ça s'envenime doucement. Poutine pratique le menuet moderne : trois pas en avant, un pas en arrière et un mouvement léger de rotation pour encercler sa partenaire dans une spirale convergente infernale. Un cercle vertueux peut devenir un cercle vicieux suivant le sens dans lequel on le parcourt. Dans le cas de Poutine le sens est clair. En proposant par exemple d'établir un Etat indépendant dans le sud-est de l'Ukraine, il prépare la suite : La Crimée, le Sud-est, le Sud, le Sud-Ouest et la Moldavie, puis le Centre-Sud et l'Est. Kiev pourrait peut-être rester européen, genre Berlin, avec un mur autour et un couloir réservé. La population ukrainienne a ses opinions, mais les décideurs pensent penser pour elle. Poutine agite les minorités russophiles et russophiles. Faudra-t-il dire, pour paraphraser le rapport Attali, russophilophones ? Il est savoureux de constater que Poutine par contre refuse de négocier sous le prétexte qu'il n'est pas partie au conflit ;) Comment dit-on "Prendre pour un con" en russe ? Взятые за дурака si j'en crois Google.

La question posée à l'OTAN est donc simple : comment et quand agir ? L'OTAN c'est du militaire et du lourd. On n'est pas dans le domaine de l'économique (représailles et boycotts sur les produits importés ou sur le nombre de stars de foot à Monaco) ou du financier (à la City). Quoique. François pourra en tous cas s'asseoir dignement à cette table, grâce au Mistral. Et grâce à Sarkozy qui avait décidé la réintégration de la France dans le commandement intégré de l'OTAN malgré les réactions négatives de beaucoup de leaders politiques, à l'UMP et ailleurs. Le test ukrainien va être instructif à ce propos car on est vraiment en Europe ce coup-ci, pas en Afrique ou en Asie.

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