jeudi 13 juin 2024

Le poids des mots vides : union, front, rassemblement ou rien

On baigne dans le flou et les manoeuvres de partis, de candidats et de slogans, sans parler des postes à pourvoir dans les rêves de chacun.

Mais il reste un sujet peu abordé dans ce bordel ambiant, celui du nom des partis politiques.  c'est comme un jeu de taquin et de mots permanent, avec des mots-valise de plus en plus vides de sens.

Il ne s'agit pas que d'un débat de linguistes. Quelques exemples :

Front

Avant il y avait le Front National, FN, de Jean-Marie Le Pen et ses acolytes. Maintenant c'est devenu le Rassemblement derrière sa fille qui attend forcément la mort du père fondateur. Le mot rassemblement semblant plus normal, plus normalisé, moins extrême, moins frontal évidemment, donc dédiabolisé. Comme s'il n'y avait plus de combat aussi frontal. Un choix stratégique.

Maintenant il y a le Front populaire (écologique et social en plus pour certains seulement, mais pas LFI). Le même mot qu'en 36 mais rien à voir pour qui s'y connait un peu en histoire, notamment celle des luttes sociales ou de la République. Le même mot que l'ex-FN pour un autre front extrême de lutte. Une bonne idée, sur le papier, mais qu'on ne peut s'empêcher de considérer comme une arnaque. Le front de l'Est contre le front de l'Ouest ? On n'est plus en 1944, même si on vient de fêter le 80e anniversaire du débarquement et la présence du Front de Libération nationale.

Entretemps il y a eu le Front républicain, censé résister à l'extrême-droite, mais qui a disparu depuis de nombreuses années, sans même parler du pataquès des LR et de leurs divisions enfin mises au grand jour.

Un front, c'est un groupe en rébellion ou une association combative. Du positif a priori, sauf lorsque le mot a été rétourné.

Union

Joli mot. Exit l'Union populaire de JL Mélenchon, devenue la NUPES de manière cosmétique. Exit l'UMP (Union pour une majorité présidentielle en 2002 avant le duel Chirac-Le Pen, puis Union pour un mouvement populaire, et devenue Les Républicains en 2015). Tout le monde la recherche, puisque l'Union fait la force. Mais l'Union ferait aussi la France (sic Bardella dont la culture politique se résume à... attendez je cherche... bon, allez, on passe.

L'Union est un vieux mot, moins intéressant aujourd'hui visiblement, sauf pour l'UDI (ça existe encore ?). Désunion ne sonnerait en effet pas très bien pour un parti.

Rassemblement

Très connoté à droite (du RPR au RN) mais aussi très utiles" dans plein de contextes associatifs. On rassemble plutôt que faire front, une ambition plus forte de gouverner plutôt que d'être en rébellion.

Rien

En fait, la mode depuis maintenant longtemps est de ne pas mettre de tels mots dans le nom de son parti : Renaissance, En Marche, Reconquête, Les verts, le parti XYZ, Les Républicains...

En se débarrassant de ces mots valise devenus encombrants, ces partis se disent qu'ils s'enlèvent une épine dans le pied et évitent les comparaisons avec les autres et avec le passé. Mais c'est une illusion évidemment. Ce n'est pas en mettant sa tête dans un trou comme une autruche qu'on affronte les dangers de la vie politique, surtout en ce moment.

Les républicains sont-ils encore républicains s'ils suivent leur président leur ex-président Ciotti ? La renaissance est-elle celle du XIVe siècle ou un renouveau printanier après un hiver rigoureux. Les verts sont-ils encore verts ou EELV risque-t-elle de devenir un fourre-tout comme LBGTQQIA+. Reconquête (qui n'existe plus vraiment) est-il fidèle à son nom ? Etc.

En fait les mots importants ne sont pas là mais ailleurs : dans les adjectifs (populaire de droite ou de gauche, socialiste, communiste, écologiste, républicain, national...). Hum. Ils ne sont pas forcément plus clairs. Reste les slogans. Hum. Hum. Pas toujours compréhensibles ou cohérents avec leurs porteurs.

Résumé

Et si on faisait plus attention aux actions, aux programmes, aux réalités, et aux individus, plutôt qu'aux noms fourre-tout ?







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