dimanche 16 septembre 2012

Du temps de cerveau pour... le Web

Le Web n'a pas d'anniversaire, ou plutôt il en a plein. D'ailleurs le Web se réinvente régulièrement.

Mais au début le Web n'existait pas. L'internet existait déjà évidemment avec plusieurs couches d'histoire depuis les années 60 et surtout 70, mais les systèmes en place étaient très confidentiels et réservés à des experts. Parmi ces lieux peuplés d'experts, il y avait le CERN, dans une zone improbable entre la France et la Suisse. Et dans un des bureaux de ce lieu, il y avait le jeune M. Tim Berners-Lee qui n'était pas content de la manière dont les informations s'échangeaient dans ce grand labyrinthe plein de physiciens et d'informaticiens. Ces gens-là étaient contents avec leurs solutions complexes qu'eux seuls comprenaient pour échanger des données entre des systèmes encore plus complexes.

Alors en mars 1989, il tape sur son Mac un bref rapport (un mémo) à son chef. Ce chef écrit dessus "Vague mais excitant..." et le travail peut commencer.

La conclusion de ce mémo est prophétique :


We should work toward a universal linked information system, in which generality and portability are more important than fancy graphics techniques and complex extra facilities.

The aim would be to allow a place to be found for any information or reference which one felt was important, and a way of finding it afterwards. The result should be sufficiently attractive to use that it the information contained would grow past a critical threshold, so that the usefulness the scheme would in turn encourage its increased use.

Vague ? En fait pendant un an, il va construire cette idée, avec la collaboration d'un français, Robert Cailliau, et en profitant de l'ouverture du CERN à l'internet qui en adopte les protocoles, puis obtenir l'achat de deux machines (des Next, à l'époque Steve Jobs a quitté Apple) et à partir de décembre 1990 il est capable de faire des démonstrations du premier navigateur web au monde et donc de sa première première page (reproduite ici à peu près)




A l'époque d'ailleurs, le navigateur qui discutait avec ce premier serveur permettait également de produire des pages, pas seulement de consulter des pages écrites par d'autres. 
Des mots comme URL, HTTP ou HTML sont nés à ce moment et ont défini ce que nous connaissons aujourd'hui.

L'irruption de l'hypertexte dans l'internet a enfoncé toutes les portes et a commencé à se répandre dans les cercles informés. Un grand nombre de gens ont commencé à travailler un peu partout sur ce type de solution, dans un ordre dispersé, car il n'y avait pas de règle commune. 

Qui se souvient par exemple aujourd'hui, seulement 20 ans après, de Gopher qui était un outil utilisé par les universités pour échanger des données. Malheureusement Gopher était promu par une université américaine qui avait décidé d'en faire un produit commercial. D'autres solutions existaient, mais toutes étaient complexes et réservées aux informaticiens.

Alors, en 1993, le CERN publie une déclaration qui fait l'effet d'une bombe : ses logiciels web et tous ses protocoles sont rendus publics et libres de droits. Chacun peut développer des solutions à partir de cet outil qui devient de facto la norme et personne ne peut s'en réclamer la propriété. 
(cliquer pour voir le texte en grand)

L'année suivante la croissance du web est mesurée à 341634%...

Mais c'est vrai qu'au début le Web n'était pas sexy. Il s'agissait de s'échanger des documents texte ou des graphiques entre physiciens. Pour qu'il se développe il fallait plusieurs avancées, afin que les "décideurs" très importants mais peu compétents, se sentent motivés et y voient un intérêt.

La première photo publiée sur le Web est réputée être celle-ci, prise le 18 juillet 1992, puis mise en ligne sur un des serveurs du CERN :




Oui, oui ! Il s'agit d'un groupe de chanteuses du CERN lui-même. C'est une photo (mal) retouchée sur un Mac et un Photoshop de l'époque.

Depuis, il y en a eu des premières comme la première vidéo sur Youtube en 2005, mais avec l'invention de l'expression Web 2.0 est paradoxe est apparu.

Dès le début le web était conçu pour être collaboratif, chacun publiant et lisant ce que les autres ont publié. Cette idée a été oubliée pendant longtemps et le Web est devenu un outil de diffusion avc peu de retours des lecteurs. La ré-émergence de cette idée collaborative, qui a trouvé un nom vace le Web 2.0 est en fait un retour aux origines, habilement habillée par des experts en marketing. Aujourd'hui les batailles, et elles sont nombreuses sur le Web et sur l'internet qui se confondent de plus en plus, portent sur le rôle de chacun dans cette gigantesque toile d'araignée sans centre et sans araignée.

Il y a tellement de gens qui aimeraient être cette araignée... ou même visibles sur cette gigantesque toile.

Pour les informaticiens qui nagent comme des poissons dans les systèmes et autres logiciels, il ne faut pas qu'ils confondent la nécessaire transparence des protocoles d'échanges et des normes et standards avec le fantasme d'un partage total de tout sans limites, l'information étant plus importante que l'individu qui la crée ou la lit.

Pour les autres, les humains, il ne faut pas qu'ils se contentent d'un rôle de simple consommateur (de publicité ou de contenus orientés) sans vouloir agir, réagir à ce qui se passe, dans la limite de leurs moyens et en ne perdant pas de vue que de cet échange massif sortent des innovations et des solutions possibles, à condition de savoir chercher avec jugeotte et bon sens. 

Un petit exemple récent au hasard... scientifique et poétique...

PS et pour ceux qui ne trouvent rien d'intéressant, une petite image historique, celle de la porte d'une pièce du CERN où des serveurs tombaient généralement en panne... qui dira peut-être quelque chose à certains.






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