Commençons par la peinture sur gouttière qui date a priori du XVII° siècle. On parle ici de livres reliés à l'ancienne et dorés sur tranche. Rien de plus banal dans toute bibliothèque qui se respecte. Regardez le GIF ci-dessous par exemple
En tordant légèrement toutes les pages on aperçoit une peinture, qui a en fait été réalisée sur le bord extrème de chaque page. Quasi invisible à l'oeil nu et pourtant si belle. Cette technique a été utilisée pour des tableaux et des messages secrets évidemment. Certains artistes continuent à la pratiquer. Une vidéo ici :
Le numérique ne peut rien pour ce type de peinture. Il ne pourrait s'agir de de clones sans beauté. Et puisqu'on parle de gouttière, l'argot des relieurs est riche :
Pour d'autres livres plus anciens, le numérique peut tout. Prenez le manuscrit des "Très riches heures du Duc de Berry" par exemple. Un seul exemplaire au monde de ce livre d'heures.
Un livre unique donc, gardé précieusement à Chantilly, dans le château légué à l'Etat par le Duc d'Aumale à la fin du XIX° siècle, avec la condition expresse qu'aucun objet ne serait déplacé. Le manuscrit est invisible de nos jours et seuls des far-similés sont montrés, sauf à quelques grands de ce monde ou à des pistonnés sans culture. J'ai eu la chance de voir l'original et les couleurs sont bluffantes. Aucun écran ne saurait en rendre la qualité et pourtant le numérique est la seule solution pour que ce livre soit vu. Il y a des tonnes de reproductions de mauvaise qualité. Il y a aussi des images de très haute définition qui ont été faites, après des négociations dignes des plus grands diplomates. Mais celles-ci sont très difficiles à obtenir.
Le livre à exemplaire unique est un concept étrange à notre époque, non ?
Les relieurs de livre ont aussi essayé d'imaginer des formes originales et plus ou moins réussies. Pour changer un peu, une version moche, artisanale et parait-il artistique... hum ... on ne s'improvise par artiste relieur.
C'était la mode il y a un certain temps de faire des livres avec des formes originales et artistiques, pas parallélépipédiques. Le roi était en France l'éditeur Robert Morel avec ses livres ronds et bariolés, des livres-objets comme on s'est mis à en faire de plus en plus mais que lui savait faire en artiste.
Qui ne voit pas aujourd'hui un livre en forme de pot de Nutella ou de bouteille de Ketchup, de pizza ou de haricot vert (euh, celui là je ne l'ai pas vu). Livres marketing, à usage unique et impossible à ranger dans une bibliothèque. Au moins avec les O de Morel il suffisait d'enfiler tous ses livres sur une tringle. C'était pratique... Il y a heureusement des livres-objets plus artistiques, comme celui-ci si on est végétarien
On est loin des livres électroniques (que j'adore) qui sont un peu les livres de poche comparés aux belles éditions. On notera seulement l'exemple des housses protectrices pour iPad ou liseuse qui sont en fait des livres anciens reliés et creux. Bizarre rencontre de deux mondes... Chez certains on peut même choisir son titre. Ca me rappelle ces sacs de dame créés à partir de reliures réelles de livres de Jane Austen (réservé aux fans de Jane) : on enlève les pages et on ajoute de quoi fermer le sac. Un livre contient de tout !
Allez, on retourne à nos lectures !
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