lundi 30 septembre 2019

Le scandale des anonymes ? Qui sont-ils ?

Depuis l'annonce de la mort de Chirac, on n'entend plus que ce mot dans les médias : les anonymes.
Ce mot me révulse par les relents qu'il véhicule.

On a aussi entendu dans les bouches des présentateurs(rarement) d'autre mots pour désigner le peuple : le peuple justement, les gens, les français, les citoyens, les inconnus, la masse, la foule, le public... ou toute combinaison de termes at autres périphrases (foule des anonymes, masse populaire...) Lequel préférez-vous ?

Anonyme ? Une personne banale et sans originalité, comme si la seule originalité était dans le nom qu'on donne à des individus, par rapport à un non-anonyme avec un nom forcément connu (par les médias et les autres VIP et gens connus) ? Il est vrai que sans un nom, un individu n'existe pas face à la loi. Pourtant un nom peut être accolé à quelqu'un à tout moment, à sa naissance, à son mariage, à son entrée dans les réseaux virtuels avec un ou plusieurs pseudos, ou un nom de plume pour un auteur (j'en suis un parfait exemple anonyme), au sdf ou au migrant au coin de chez vous. Et quand on est face à quelqu'un, il n'est plus anonyme, même si on ne connait pas son nom.

Alors si anonyme est celui ou celle dont on ne connait pas le nom, notamment dans une foule, cela veut dire qu'on reste au niveau de la foule, d'un "tas" informe. À partir de combien commence une foule ou un "tas" ? Un n'est pas un tas, deux non plus, mais vingt est certainement un groupe et 100 une foule. Certains individus ne veulent pas avoir de vie publique en-dehors de leur cercle immédiat et le respect de cet anonymat est une liberté fondamentale. C'est encore plus vrai depuis l'Internet et ses nombreux excès. Mais aucun journaliste n'est allé parler à tous ces anonymes dont on nous a rebattu les oreilles en cette fin de semaine.

Ceux qui décident qu'il y a des anonymes, ce sont ceux de l'élite, pour mieux s'en démarquer naturellement. Des gens refoulés des lieux fréquentés par les happy few comme si les physionomistes à l'entrée (médiatique et virtuelle) ne les considéraient que comme des fantômes, ou des nègres (au sens littéraire du terme) qui n'ont pas le droit à la parole, sauf à en tirer un ou une au hasard ou parce qu'ils plaisent aux journalistes présents.

Nous sommes pourtant tous des anonymes en puissance. Et pour certains fiers de l'être.

Sauf à rester coincé comme un pet dans sa bulle de cocktail, nous sommes tous amenés à être des anonymes à certains moments, dès que l'on sort de son environnement et du milieu où l'on est connu. Les vraies stars portent des lunettes noires et se cachent (et tant pis pour leurs désirs éventuels d'anonymat) car l'anonymat est de temps en temps une bénédiction. Celles et ceux qui se croient des stars aimeraient bien ne pas être anonymes, au moins dans un premier temps, alors que tous, nous sommes anonymes la plupart du temps et c'est tant mieux. On se souvient ensuite de certains noms, voire de certaines actions, mais là n'est pas l'important.

Tout va bien quand on choisit soi-même son propre anonymat. Mais quand il vous est imposé (la foule des anonymes) cela tourne au mépris. Les murs de la honte qui ont fleuri après la deuxième guerre mondiale, avec des listes immensément longues de noms de juifs ou autres ont une valeur forte. Les noms ont une valeur forte. L'anonymat est la négation de l'être, le début de l'esclavage (sauf pour 007, my name is Bond, James Bond) car qui est James Bond au-delà de son numéro ? Qui est le numéro 6 du prisonnier ? Un numéro est pourtant une sorte de nom, diminué mais néanmoins un nom-bre.

Les autres mots sont-ils meilleurs ? Au moins, anonyme est non genré. Le peuple est un mot noble (si je puis dire) mais qui a pris un goût de vulgaire, depuis que certains se croient au-dessus, et perçu comme composé essentiellement de classes sociales modestes et sans privilèges (sans entrée VIP réservée). Les gens apparait trop banal, niant presque l'individualité de chacun et s'appliquant plus aux autres qu'à soi-même. Idem pour le public (consommateur de ce que font les autres, l'élite). Les citoyens ou les français limite la foule à une catégorie, puisqu'il y avait des non-français dans la foule. D'autres mots ont été utilisés dans l'Histoire récente, des sans-dents de Hollande aux patriotes de l'extrême droite...

C'est évidemment un simple détail que cette appellation. Mais le diable se cache dans les détails.

Pourquoi ne pas avoir dit simplement... les autres (que moi qui vous parle du haut de ma célébrité éphémère), ou les autres (que ceux que je connais et qui ne m'intéressent pas) ? Vivement la création du club des JA, les journalistes anonymes.


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