jeudi 18 octobre 2018

Insoumis, vraiment ?

L'affaire de la perquisition chez Mélenchon, d'autres personnes de La France Insoumise et dans les locaux de LFI est très instructive. Autour des images violentes et de violence, les interprétations vont bon train.
- Chez Mélenchon himself, il a des protestations contre une perquisition politique et une atteinte à sa personne sacrée, histoire de montrer qu'il est un chef, un roc, que dis-je, une péninsule, et qu'il a du caractère. Il reconnaîtra qu'il a été un peu trop sanguin, histoire de parler d'autre chose. C'est cool un responsable sanguin, non ?
- À LFI, il y a à peu près le même discours mais avec quand même des voix divergentes qui ne veulent pas se faire assimiler à des irresponsables contestant la République, ses lois et ses forces de l'ordre ; On notera qu'il manque ici un tuto pour savoir comment résister aux forces de l'ordre, mais cela devrait être réparé bientôt...
- Au RN/FN on est trop heureux de dénoncer un État qui s'en prend à de pauvres partis d'opposition, histoire de faire oublier les procédures contre lui ;
- Dans l'opposition au sens général, on s'en prend à un acharnement politique, personne ne voulant de Mélenchon comme l'adversaire numéro 1 de Macron ;
- Dans la majorité, on dénonce cet irrespect des lois ;
- Dans la police et la justice, habituées à des protestations violentes dans ce genre de perquisition dans tous les secteurs de la société, on demande un vrai respect des lois et on rappelle que ce n'est pas un bon exemple à donner à tous ceux qui font l'objet d'interventions de forces de l'ordre.

Parlons un peu ici du mot Insoumis.


D'abord ses définitions : ici, extensive et universitaire, ou ici, plus politique. Ici pour LFI elle-même sur Wikipédia. Une définition philosophique et déconstruite de ces mots dans ce billet d'avril 2017 d'un blog de Mediapart. Long, mais intéressant. Si, si, on y trouve de belles réflexions sur les mots et les symboles utilisés (𝞥). Mais un mot reste un mot et ce qu'il devient est la conséquence de son appropriation par nous, les gens, directement ou à travers ce qu'on en voit dans les médias.

Ensuite ses synonymes (un dictionnaire universitaire) avec des sens voisins :
déserteur, désobéissant, dissident, dur, factieux, frondeur, guérillero, indépendant, indiscipliné, indocile, indompté, infernal, insubordonné, insurgé, irrégulier, maquisard, mauvais esprit, mutin, objecteur de conscience, partisan, rebelle, récalcitrant, réfractaire, résistant, rétif, révolté, sauvage, séditieux, souverain, terrible, têtu, transfuge.
Je n'ai pas trouvé dans cette liste le mot "indigné" tel qu'utilisé par Stéphane Hessel. Aucun de ces mots ne s'applique évidemment à Mélenchon.

Remarquons que l'on parle ici de la France insoumise. La France comme symbole patriotique. On ne parle d'insoumis que comme de membres de LFI a priori, pas au sens d'insoumis à l'ordre (républicain ou militaire). C'est bien la France qui doit être insoumise et fière de l'être, comme disait Mélenchon dans sa déclaration de candidature à la présidentielle perdue en 2017.

Alors, comment militer pour un parti, même un parti étrange et qui se veut plutôt un mouvement, en se déclarant insoumis et en voulant diriger la France, tout en en contestant l'organisation ? C'est un exercice délicat, pour lequel il faut des tribuns (Mélenchon en est un parfait exemple) des activistes, des relais dans les médias et un programme. Comment respecter l'ordre républicain et se battre contre lui tout en l'insultant ? Les militants et autres résistants ont toujours connu ce dilemme, essentiel pour la politique et la morale. Toutes sortes de comportements ont été causés par ce dilemme. On se souvient des vainqueurs, comme toujours. Lire ce livre pour en savoir plus.

Une équation complexe. L'épisode de cette perquisition montre que cet exercice n'est pas maîtrisé par Mélenchon ou ses principaux lieutenants (mot étrange pour un insoumis, non ?). La personnalisation à outrance est décidément un mal bien français, duquel pas grand monde ne sort vainqueur. En tous cas pas Mélenchon, amha. Mais vous avez certainement une opinion sur le sujet...

PS (si j'ose encore dire) : Et pour ceux qui considèrent (avec raison) qu'il vaudrait mieux parler des idées et du fond que des personnes ou des (micro-)événements, je confirme être d'accord. Image à l'appui !

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