mercredi 31 décembre 2014

Mais qu’est-ce qui s’est passé sur ce blog en 2014 ?

Allez hop, une petite rétrospective 2014 aussi, il n’y a pas de raison !

Nombre de billets publiés en 2014 : 365 (y compris celui-ci)

Eh oui, Ce blog est enrichi quotidiennement, qu’il vente ou qu’il pleuve et que l’actualité soit intéressante ou pas. Je vous renvoie vers cet ancien billet pour savoir pourquoi j’ai décidé de tenir un blog quotidien... jusqu’en mai 2017, sauf élection présidentielle anticipée.

Les 10 billets les plus lus en 2014

"L'artiste est-il maître de son oeuvre?" - Vous avez 4 heures
Le corrigé amateur d’un des sujets du bac... visiblement plein de bacheliers ont été intéressés ? On espère pour nos lecteurs qu’ils ont eu leur bac ;)

Révolution au poignet
Le lancement de l’Apple Watch a attiré beaucoup de visiteurs, avec cette phrase « L’Apple watch n’est pas une montre », comme l’iPhone n’était pas un téléphone classique à l’époque de son lancement. Les sujets technologiques attirent toujours du monde, notamment sur Apple et les passions qu’il déclenche.

Dimanche Je Vote
Pourquoi voter aux élections européennes, avec un joli petit arbre de décision très clair pour prouver que ne pas voter c’est contre-productif.

Hollande ? On A(n)dor(r)e
Petit voyage de François dans sa co-principauté et nouvelle du genre « carnet du Figaro »

Ecosse indépendante : oui évidemment
Juste avant le référendum (raté) pour l’indépendance de l’Ecosse. Ce blog serait-il lu en Ecosse ou des sympathisants français se seraient-ils donné le mot ?

Les teutons flingueurs ont frappé fort
Du foot évidemment avec la défaite historique du Brésil à la CDM devant une Allemagne époustouflante, et un pardon pour la France battue avec les honneurs

Le Nil, le plus long fleuve du système solaire
Le premier billet sur la sonde Rosetta et sa comète, avec Philae et Rosetta aux deux bouts du Nil égyptien.

Du temps pour le cerveau cette semaine
Le début de la semaine du cerveau, à la fois scientifique et humoristique, à ne pas confondre avec les billets « Du temps de cerveau pour... » chaque dimanche pour vous changer les idées.

Voltaire(s)
Comment utiliser un nom archi-connu à des foins très diverses et même incompatibles.

iAnniversaire 30
On ne pouvait pas rater sur ce blog les trente ans du Macintosh et nos lecteurs non plus visiblement.



Eclectique et bien à l’image de ce blog. Je regrette juste qu’aucun « Temps de cerveau pour... » ne soit cette année dans te Top 10, mais lorsque j’aurai rassemblé toutes les nouvelles dans un recueil on en reparlera. Oui, c’est déjà une résolution pour 2015 ;)

Bonne soirée et nuit de fin d’année à toutes et à tous.

mardi 30 décembre 2014

Tous nos voeux aux paranos connectés et aux espions-pirates : Internet, SS7 et SnoopSnitch au menu du réveillon

Pas facile d’être parano et connecté en ce moment. L’année 2014 a été riche en révélations et 2015 s’annonce bien chargé. Prévoyez d’augmenter les doses d’anti-stress à défaut de pouvoir vous protéger. Contrairement à d’autres domaines comme la santé, le préservatif n’existe pas en matière de télécommunications. Ou si peu...

On sait depuis longtemps, merci à Snowden entre autres, que l’Internet est un lieu où il est facile de se faire espionner. La plupart des gens considèrent que ça ne vaut pas la peine de se protéger plus que cela, puisqu’il n’y a pas de raison de s’attaquer à eux en particulier et que c’est aux entreprises avec lesquelles ils travaillent de prendre leurs précautions et de les rembourser en cas de problème : les banques ou les magasins de vente en ligne en priorité. Et la plupart des gens ont raison. Un niveau minimal de protection est souvent suffisant, ce qui inclut l’élément humain : ne pas prendre sa date de naissance ou 123456 comme mot de passe, ne pas le laisser traîner et ne pas laisser s’installer n’importe quoi sur son PC (les Mac sont nettement moins atteints).

Les alarmistes de l’Internet ont pourtant raison mais à une autre échelle : les entreprises et leurs secrets, les banques et leurs comptes, les groupements d’influence et les censures ou attaques, les Etats et leurs systèmes sensibles y compris militaires ou sécuritaires. Dans cette arène, les espions, contre-espions et terroristes de tous poils s’en donnent à coeur joie, ce qui crée un marché de l’information secrète et de la « porte dérobée », marché dans lequel les pirates professionnels, organisés ou amateurs se précipitent. On a ainsi appris cette semaine, lors de la réunion du CCC - j’y reviendrai - que la NSA réussissait à casser à peu près toutes les techniques de sécurité existantes sur l’Internet sauf une poignée de techniques très peu utilisées, et qu’elle usait de son lobbying pour empêcher la création de techniques plus sûres. Pour ceux que cela intéresse, les techniques les plus sûres pour la confidentialité des informations sont GnuPG, Tails, OTR, Truecrypt, Tor... Pour ceux que cela intéresse, des détails ici. Pour les autres, continuez à dormir...

Mais il y n’y a pas que l’Internet et toutes ses déclinaisons, il y a aussi le téléphone...

La réunion annuelle du CCC (Chaos Communication Congress) organisée à Hambourg par le CCC (Chaos Computer Club) est le lieu habituel de rencontres sur les sujet de sécurité, vie privée, piratage et autres joyeusetés. Les allemands ont toujours été en avance (sur les français notamment) sur les questions de sécurité. Peut-être est-ce culturel et historique, car le poids en France de l’Etat et de France Télécom a toujours introduit une dimension faites-nous confiance, tout ce qu’on fait est bien et pour le bien public ainsi qu’une notion de centralisation et d’agences étatiques de contrôle, les seules fiables, par rapport à des associations comme le CCC toujours suspectées de promouvoir des choses illégales. D’ailleurs le « parti pirate » n’arrive pas à percer en France alors qu’il est représenté dans les parlements de plusieurs pays.

Or donc, cette année, grosses révélations sur la sécurité (ou non, en l’espèce) des téléphones mobiles. Depuis le début de la téléphonie mobile il existe un réseau à part (le SS7, c’est bien comme nom non ? On dirait du Ian Fleming) qui leur permet de communiquer entre eux pour savoir où est un téléphone, à quelle borne il est raccordé, de quel opérateur il dépend, contrôler les SMS et les instructions qui permettent de router les appels et les messages vers ces terminaux mobiles. C’est un réseau normé et partagé entre tous les opérateurs ce qui permet l’interconnexion à l’étranger par exemple. Le problème est que ce réseau est vieux et que les protocoles utilisés sont pleins de trous comme le faux gruyère. Pour passer au vrai gruyère (sans trous donc) il faudrait sécuriser ce réseau ce que les opérateurs n’ont jamais décidé (ça coûte des pépettes). Et les opérateurs ne sont pas les seuls à utiliser ce réseau puisqu’il est ouvert à des entreprises (pour leurs employés) à des administrations sécuritaires (genre NSA ou le nouveau machin sécuritaire et ultra-puissant créé en France subrepticement par un décret daté du 26 décembre, joli cadeau de Noël, dans le cadre de la loi de programmation militaire : le groupement interministériel de contrôle (GIC), placé sous l’autorité du Premier ministre), à des Etats pratiquant la censure et le pistage politique (Poutine, tu nous lis ?) et donc à des pirates.

Sur ce réseau, comme cela a été démontré au CCC, un expert peut vous pister, voir vos SMS et écouter vos appels dans les deux sens, et même les modifier ou vous en envoyer d’autres. Exit la sécurité des SMS de sécurité justement, si vous êtes jugé comme suffisamment important pour cela.
Pour démontrer la réalité du problème, un outil est disponible gratuitement pour certains téléphones Androïd rootés, SnoopSnitch, et devrait être étendu à d’autres terminaux et aux iPhone (jailbreakés).
C’est un petit outil qui permet de savoir si des commandes bizarres arrivent sur votre téléphone sans que vous ne le sachiez. Ce n’est pas une protection. Pas la peine de télécharger cet outil si vous n’êtes pas spécialisé dans ces domaines, c’est encore trop technique.

On pourrait imaginer plusieurs scénarios, à partir de ces révélations :

- Soit il y a une levée de bouclier contre ce réseau pas assez sécurisé (et des billets de blog comme celui-ci y participent à leur échelle), et les opérateurs t Etats doivent le modifier à terme pour empêcher les pratiques de détournement et d’écoute des appels et des messages.

- Soit on voit apparaitre quelques piratages retentissants de personnalités politiques ou médiatiques exploitant ces failles qui obligent à une réaction forte

- Soit on voit apparaitre des outils grand public pour que chacun puisse savoir, à partir de son propre téléphone, quand il est pisté ou pire : que cela soit son employeur, un service d’écoute ou de censure ou sa femme... Evidemment, en parallèle il y aura des applications tout aussi simples pour écouter les autres ;) ou même envoyer des SMS de bonne année à leur place ;)

Sans être parano, il est toujours rassurant de voir que certaines révélations gênantes (pour les opérateurs et les grandes institutions) sont faites publiquement. La technologie n’est pas par nature contraire à la vie privée, mais ceux qui les implémentent (les ingénieurs et organisations) pensent très souvent à ce qui est le plus utile pour eux qu'aux personnes « observées » ou « suivies ». Quant à ceux qui cherchent à exploiter toutes les failles technologiques, il y en aura toujours - et ce sont souvent des experts formés aux mêmes endroits.


Petit dessin très, très simple pour tout comprendre. M’écrire si vous y arrivez...

Pour ceux qui croient en la vie privée, intéressante étude à lire en anglais ici, par le Pew Research Internet Project : quelle vie privée à l’horizon 2025 ?

lundi 29 décembre 2014

Rétrospective : amusons-nous avec la presse

C’est l’époque des rétrospectives et la presse en est remplie (comme les marronniers qui pourtant ont perdu leurs feuilles et leurs fruits). On en trouve sur tous les sujets. Alors une petite rétrospective de la presse pour faire comme tout le monde ? OK, mais nous on ne va parler que des titres idiots de la presse d’aujourd’hui. Pour les titres idiots de l’année, il faudrait un blog plus conséquent (donc moins inconséquent). Je précise qu’ils s’agit de vrais médias professionnels et sérieux.

Commençons par 20 minutes

INCENDIE DU NORMAN ATLANTIC : Le capitaine du ferry a quitté le navire en dernier
Comme si cette nouvelle en était une. On croyait que cela faisait partie du code déontologique de d’honneur des marins. Mais depuis le naufrage du Concordia, on n’est plus sûr de rien. C’est donc un titre idiot. Ils auraient pu titrer aussi sur « Le soleil s’est levé ce matin »... Sur le fond on notera que cette catastrophe au large de la Grèce est dramatique mais que la non élection d’un président grec met la Grèce dans une posture très délicate avec des élections anticipées à venir rapidement pour trouver un nouveau capitaine.

ESPACE : Non, la gravité terrestre ne disparaîtra pas le 4 janvier 2015
Les rumeurs urbaines, fausses informations et gags fourmillent sur l’Internet. Cette blague qui circule depuis quelques jours sur les réseaux sociaux a inquiété plusieurs personnes et en faire un article pour la démystifier est plutôt utile, histoire d’expliquer que c’est un vieux (et bon) poisson d’avril d’il y a quelques dizaines d’années. Mais pourquoi titre que la gravité va disparaître ? C’est aller encore plus loin que la rumeur ! Ce n’est pas parce que Pluton va passer derrière Jupiter que vous pourrez frapper plus fort votre patron qui vous emmerde (si vous travaillez le dimanche).

TECHNOLOGIE : Vos empreintes digitales peuvent être piratées avec de simples photos
Mais une empreinte digitale apposée sur un lecteur ou un papier est déjà une « photo » de l’empreinte qui est sur votre doigt. Et avec un appareil photo standard (équipé d’un téléobjectif correct) il est facile de dupliquer plein de choses, y compris des doigts à distance. Ce n’est donc pas une nouvelle et pas de quoi en faire un plat. La seule mesure de sécurité possible pour protéger l’accès à votre coffre-fort est de ne pas y mettre de porte !

Puis Le Figaro

La chemise du réveillon : noire ou blanche ?
Voici une vraie question pour débiles. Intéressant de voir qu’un journal de droite (et donc de bon goût) ne voie la vie qu’en noir et blanc pas en couleurs. Les couleurs sont-elles de gauche ? En tous cas selon le Figaro, la chemise ne peut être que blanche, point final, tant pis pour les autres (ou tant pis pour Le Figaro ?)

Diana, Dickens... 41 millions de testaments disponibles sur Internet
C’est dans la rubrique Culture et si les britanniques viennent de mettre en ligne les testaments enregistrés depuis 1858, il est intéressant de noter que Le Figaro ne résiste pas à la tentation en ne citant que deux noms : Lady Di et le père d’Oliver Twist... dans cet ordre. Oui, vous êtes bien dans la rubrique culture d’un grand quotidien national qui pense, quand même, à ses recettes publicitaires.

Enfin Le Huff Post

Nous sommes 65.241.241 en France
Ca c’est un titre ! Pas d’indication de date et il nait et meurt des gens tout le temps. Les statisticiens auront sursauté et les autres rigolé : Non, 242 je te dis ! Non 240 j’en suis sûr... La science est belle quand les médias la reflètent sans s’occuper de vérité ;)

À LA RECHERCHE DE LA NOUVELLE STAR  : Les 14 révélations politiques de 2014
Entre La nouvelle star et Miss France, ceux qui croient à la confusion des genres média-politique auront du grain à moudre. Les électeurs et les jurés d’un concours sont-ils sur le même plan ? Les talents d’un homme politique se résument-ils au chant ou aux joutes oratoires ? Et surtout qui est dans le jury ?... Sur le fond on notera qu’ils ont retenu douze hommes (en colère ?) et seulement deux femmes (une ministre et une maîtresse d’un président de la république). Pas Valérie ???

Jouez vous aussi à repérer des titres qui ne sont pas là seulement pour vous faire rigoler ou vous inciter à lire (acheter) le journal, mais qui sont authentiquement idiots. Ca fait prendre du recul et comme le dit Corneille dans Polyeucte - Acte I, scène 1 - « Et le désir s’accroit quand l’effet se recule ».

dimanche 28 décembre 2014

Du temps de cerveau pour... une nouvelle fois sans garde

Prosper était né le 25 décembre et c’était bien embêtant. Pendant toute son enfance le mélange entre Noël et son anniversaire l’avait beaucoup perturbé. Il recevait évidemment moins de cadeaux que les autres enfants, du moins le croyait-il. En tous cas il n’en recevait qu’une fois par an et c’était bien embêtant. Ses parents étaient gentils mais en plus ils avaient choisi de l’appeler Prosper ce qui ne lui plaisait pas du tout. Un jour ils lui avaient expliqué qu’ils étaient conscients de la coïncidence entre Noël et sa naissance et que c’est pour cela qu’ils l’avaient appelé ainsi. Car la Saint Prosper est le 25 juin, soit le jour le plus éloigné de Noël dans l’année, ce qui leur permettait de fêter sa fête comme un anniversaire.

Prosper avait mis un peu de temps à comprendre mais avait trouvé ça sympa. Le seul problème était que ses parents, tous deux enseignants, oubliaient régulièrement de lui fêter sa fête, coincés entre les examens, les corrections et le bouclage de la fin d’année scolaire. En plus, à l’école puis au collège et au lycée, Prosper avait toujours eu un franc succès auprès de ses copains... et surtout des filles. Tout le monde se moquait en effet de ce vieux prénom. Et il n’en avait même pas un deuxième.

Prosper n’avait jamais cru au Père Noël, malgré le fait que les cadeaux du 25 décembre étaient emballés avec trois papiers différents : un censé être du père Noël, un pour Noël de la part de ses parents et enfin un pour son anniversaire. Très tôt il avait découvert la réserve de papier cadeau... avec les trois papiers... Mais Prosper était intelligent et pour ne pas détromper ses parents (et accessoirement continuer à avoir plus de cadeaux) il leur laissait penser qu’il croyait encore au Père Noël. Chaque année il écrivait sa liste et la confiait à sa mère pour qu’elle la poste, en essayant de ne pas faire trop de fautes car sa mère était prof de français. Il avait arrêté d’écrire au Père Noël à 8 ans, en tirant un peu sur la corde. Et puis il avait oublié tout ça.

C’est quelques semaines avant le Noël de ses dix-huit ans qu’il lut un article sur le web qui expliquait le fonctionnement des services qui traitaient les lettres adressées au Père Noël. C’était très impressionnant et il y avait une quantité énorme de lettres à traiter par la Poste en un temps record puisque chacune recevait une réponse, dès lors qu’elle avait une adresse de retour. Cela donna une idée à Prosper qui se décida à en envoyer une dernière au Père Noël cette année là.

Voici ce que Prosper écrivit :

Cher Père Noël,
Je ne t’ai pas écrit depuis dix ans et je ne le ferai plus après cette lettre.
Je proteste.
Au fond de moi, je sais bien que tu n’existes pas et pourtant je t’écris car je ne puis croire que tu te résumes à quelques chansons et à un service de la Poste qui lit tes lettres et répond des messages standardisés (quel message vont-ils me renvoyer, à moi ?). J’ai toujours su que tu m’en voulais. Mes parents sont gentils et ont essayé de me faire croire que tu m’apportais des cadeaux mais c’était bien eux qui les achetaient. Tu n’a d'ailleurs jamais répondu à mes lettres, ni toi ni la Poste...
Donc je voudrais, pour ce Noël que tu m’envoies un signe non ambigu de ton existence. Que tu aies trop de choses à faire pour t’être occupé de moi quand j’étais petit, je te le pardonne, tout en protestant. Mais tu devrais choisir : soit arrêter d’exister soit être plus présent. Le compromis ne sert à rien.
Alors pour ce Noël je souhaite la paix dans le monde et la fin de tous les racismes sur la Terre. Si tu es capable de m’apporter cela, je t’en remercie. Sinon, je saurai que personne d’intéressant ne lit ces lettres. Et que tu aies existé ou pas avant cette lettre, je saurai que tu n’existes pas à partir du 25 décembre, mon anniversaire.
Dans l’attente, respectueusement
Prosper

Prosper relut et corrigea plusieurs fois sa lettre, puis il la posta en écrivant sur l’enveloppe « Pour le Père Noël (le vrai pas celui de la Poste) - Confidentiel ». Il la posta dans une boite aux lettres banale de son quartier, et attendit. Et attendit.

C’est le 25 décembre au matin, dans sa chambre d’étudiant, qu’il reçut la réponse. Il était tôt - pour un étudiant surtout après le festin de la veille chez ses parents - c’est à dire exactement midi. Il dut se lever et enfiler un peignoir avant d’aller ouvrir. Il pensa que c’était peut-être un bouquet de la part de ses parents, comme à presque tous ses anniversaires précédents.

Prosper ouvrit la porte et se trouva face à un vieux monsieur barbu et tout en blanc. Mais alors tout ! Les cheveux et la barbe, les vêtements, les chaussures, même la peau. Prosper resserra son peignoir et déglutit

- Prosper ? demanda le vieux monsieur
- Gargggl ? réussit à bredouiller sur un ton interrogatif Prosper
- Ah, c’est bien ça ! dit d’un air satisfait son visiteur tout en se glissant avec souplesse dans la minuscule chambre. Il s’assit sur l’unique chaise, à califourchon et invita Prosper à s’asseoir en face de lui sur le lit. Prosper referma rapidement le lit et s’assit. Ces quelques secondes lui avaient suffi à reprendre un peu ses esprits.
- A qui ai-je l’honneur ? demanda-t-il à son visiteur blanc qui lui répondit du tac au tac
- Mais au Père Noël évidemment, qui d’autre ?

Prosper respira un grand coup.

 (Suite et fin dimanche prochain ;)

samedi 27 décembre 2014

Super TriMan a trois mains

TriMan c'est le nom du nouveau logo qui devrait obligatoirement être apposé sur les produits recyclables à partir du premier janvier. Le voici :

Cet homme à trois flèches n'a qu'un bras et est en noir et blanc. Fin des logos verts que vous avez certainement déjà vus sur des emballages, mais qui voulaient en fait dire autre chose. Il s'agit donc d'une simplification, contrairement à ce que dénoncent certains industriels. A partir de janvier, et dans les mois qui suivent, chaque fois que vous ne verrez pas ce logo sur un emballage de produit, cela voudra presque certainement dire que ce produit ne se recycle pas totalement et "effectivement" comme le dit le décret.

Vous connaissiez les deux logos suivants ? Celui du haut indique un produit déjà recyclé, donc recyclable encore une fois et il est souvent accompagné d'un numéro pour indiquer le type de recyclage. C'est bien mais il ne concerne pas tous les produits recyclables. Celui du bas est présent sur beaucoup d'emballages et plus connu mais il n'indique en fait pas du tout si le produit est recyclable ! C'est encore un de ces pièges classiques utilisés (en toute bonne foi évidemment) par les industriels et distributeurs pour indiquer que l'entreprise responsable du produit paye une taxe aux collectivités locales pour qu'elles mettent en place des systèmes de recyclage. Les produits avec ce logo peuvent donc être très polluants...

TriMan devrait donc apparaître sur vos emballages mais seulement si le produit et son emballage sont recyclables. Certains produits pourront donc avoir les trois logos (si l'entreprise paye la taxe et elles le font presque toutes, si le produit est recyclable (TriMan) et s'il est lui-même déjà recyclé. Mais pour résumer, le seul logo qui compte c'est TriMan. Certains défenseurs de l'environnement se félicitent de ce nouveau logo car il va permettre de mettre fin à beaucoup de marchands d'illusion, et à terme d'augmenter le nombre de produits pouvant l'arborer. Espérons !

Espérons oui, parce que Ségolène Royal, sous la pression des lobbies agro-alimentaires notamment, a décidé que le logo TriMan pourrait être dématerialisé et que l'absence de logo n'était pas condamnable. Dématerialisé cela veut dire que le logo pourra être présent uniquement sur un site web par exemple, et tout le monde sait que quand vous faites vos courses, avant de mettre un produit dans votre caddie vous allez sur le site web du fabricant pour voir si TriMan y est ! Non ? Pas vous ? Ah bon... Cela dit la pression médiatique pourrait obliger les producteurs à mettre le logo sur leurs produits (ce billet de blog est un média, petit et humble, mais on n'érode pas les montagnes qu'avec des tremblements de terre). On pourrait imaginer une application sur votre téléphone mobile avec le scan du code barre et un logo TriMan ou le même barré en rouge suivant que le produit est recyclable ou pas. Un volontaire pour la réaliser avec moi ? Le consommateur pourrait alors décider de ne pas acheter ce produit si TriMan n'est pas là... Utopique ? Un peu, mais juste un peu.

La question qui se pose quand même est pourquoi ce logo ? Pourquoi trois flèches ? Pourquoi ce nom de super-héros ridicule ? Tri comme le verbe trier, ou Tri comme trois flèches indiquant des couleurs de poubelles et donc de circuits de recyclage ? TriMan comme Superman ? Le mystère reste entier et nous attendons avec intérêt un article de Wikipédia sur le sujet. C'est quand même une question vitale. Un logo qui a un nom ! Un héros des temps modernes ! On attend des films, des séries, des jeux vidéo avec TriMan en héros. Il y a de quoi faire une saga genre Star Wars avec Darth Vador dans le rôle du méchant produit non recyclable.

Que la force soit avec TriMan !


 

vendredi 26 décembre 2014

C’est Noël pour les animaux aussi

L’actualité ne se limite pas à l’espèce humaine, qui aura de toutes façons disparu d’ici quelques milliers d’années au plus sur Terre. Les animaux aussi sont importants. Quelques actualités scientifiques incontournables sur eux.

François a un chien, une chienne plus exactement, une labrador noire, offerte pour Noël par une association franco-québécoise pour assurer la continuité de l’Etat puisque tous les présidents depuis Giscard ont eu des labradors à l’Elysée. Même Sarkozy qui avait dû en choisir des nains pour qu’ils ne soient pas plus grands que lui (non, je rigole). Le labrador deviendrai-il un insigne de la plus haute fonction de l’Etat en France. A défaut de première dame, aura-t-on un premier chien (ou une première chienne, mais attention aux plaisanteries misogynes, machos, déplacées et rigolotes) ? En tous cas cette chienne a été baptisée Philae, pas en hommage aux séjours de Mitterand en Egypte à Noël mais à la sonde Rosetta dont on a parlé ici et ici. Après le chameau malien ça le changera (ici puis ici)...

Photo officielle avec drapeau, merci Le Parisien

Article très intéressant à lire sur cette revue (Popular Science). En anglais seulement alors je résume : Comme vous le savez les dinosaures ont laissé des fossiles qui permettent de les reconstituer et de postvoir leurs comportements (postvoir c’est comme prévoir mais en arrière, si vous voyez ce que je veux dire). Mais ils faisaient également caca et pipi et on retrouve des fèces fossilisées (des coprolites). On peut en acheter en ligne sur Etsy et les porter comme des bijoux. Sympa comme cadeau de Noël non ? Ah zut, Noël c’est passé... gardez l’idée pour un anniversaire alors ? Après tout si vous ne lui dites pas ce que c’est comment peut-elle le deviner ?


On trouve aussi des urolites, c’est à dire des traces de pipi dans du sable qui s’est fossilisé. C’est moins facile à porter en boucles d’oreille mais c’est très instructif. Les chercheurs qui ne reculent jamais devant rien pour la beauté de la science et pour pousser le savoir dans ses derniers retranchements espèrent ainsi comprendre comment les dinosaures faisaient-ils pipi ! Faisaient-ils tout en même temps ou séparément (comme les autruches par exemple : l’article cité contient une vidéo d’autruche en train de faire pipi, âmes sensibles s’abstenir). C’est une question clé, essentielle même. Au Nrésil où se trouvent la plupart des sites concernés, les scientifiques appellent même ces fossiles des trésors nationaux. Je vous laisse juge.

Sinon, dans un autre registre, une petite vidéo très belle et très lente :



Il s’agit d’un poisson filmé à -8145 mètres par une station automatique. C’est à dire à peu près l’Himalaya sous l’eau. Une espèce translucide et complètement inconnue. Juste beau à voir. On connait si peu de choses des grands fonds inaccessibles à l’homme à cause d’une pression insupportable pour nous. Ce n’est pas un fossile, mais un poisson vivant actuellement.

Bon allez, c’est promis, on retourne demain à la grandeur et à la décadence humaine ! En attendant bons fruits de mer et bon foie gras, élevés naturellement évidemment.


jeudi 25 décembre 2014

Le jeu de (Franç)l’oie(s) du Gouvernement

Le gouvernement vient de se lancer dans une opération de communication originale et adaptée aux réseaux sociaux. Ici, c’est un blog, donc un média social, donc on en parle. Il s’agit d’un jeu avec des cartes réponses : 24 questions de café du commerce qu’on peut entendre tous les jours à propos de l’action du gouvernement socialiste en place, avec des éléments de réponse pour dire « mais non, mais non, c’est très bien ». Le jeu est ici sous forme interactive et ici en pdf à imprimer en recto verso (pour les riches qui ont de telles imprimantes). Ce « kit de famille » est censé permettre de débattre autour du chapon avec des arguments sans faire voler les ailes et les cuisses à travers la tablée ;)

3 remarques à propos de cette initiative rigolote et qui dénote un changement de ton :

Sur les questions qui y sont et qui n’y sont pas
24 questions ça ne couvre pas tout le spectre des critiques potentielles de l’action du gouvernement.
Prenons ces deux propositions : L’Etat fait tout pour les patrons, l’Etat ne fait rien pour les patrons... La réponse tient dans le mot entreprise qui est censé rassembler tout le monde, des patrons à leurs employés, en passant d’ailleurs par les actionnaires. « Tu confonds patrons et entreprises »... telle est la réponse à la deuxième proposition. On sait que notre premier ministre aime l’entreprise, les Guignols de l’Info nous le rappellent assez souvent. Les deux argumentaires sont intéressants car ils ne se répondent pas l’un à l’autre, habilement, mais essayent de déplacer le débat ailleurs que sur le mot patron qui hérisse tout le monde (sauf les patrons et ceux qui veulent devenir calife à la place du calife).

Quelques questions n’y sont pas : rien sur les autres partis (c’était mieux avant avec l’autre agité, ou ça sera mieux avec l’autre agitée après, par exemple. Rien sur la comparaison avec d’autres pays ou systèmes. Rien sur le PS lui-même. Rien sur le mariage pour tous même si une question porte ce titre ou pour les réformes sociales. Rien sur les régions... On est dans le quotidien économico-social.

Sur un contre-jeu à faire par les opposants
Si les chefs de l’UMP ou du FN n’étaient pas en train de banqueter, on imagine qu’ils devraient préparer un contre jeu, comme si chaque carte avait une troisième face (dans un monde à quatre dimensions pas de souci) avec la réponse de l’opposition : mais si, mais si; l’Etat ne fait rien pour...

Ce contre-jeu n’est pas encore disponible en ce matin de Noël. On espère qu’il arrivera car c’est un moyen simple et efficace de développer sans fin des arguments et contre-arguments. Le gouvernement aurait alors réussi à appliquer l’un des principes de l’art de la guerre de Sun-Tzu qui est d’amener l’ennemi sur un terrain défavorable pour lui. De mémoire de quinquennat c’est la première fois qu’une campagne aussi délurée est conduite par le gouvernement. L’effet Macron ?

Sur un jeu plus sophistiqué que ce loto-bingo

Le bingo ou le loto, c’est bien, mais il y a mieux à faire. Si des graphistes intelligents sont dans la salle, je leur propose de transformer ce jeu en Jeu de l’oie, qu’ils me contactent :

- utiliser des dés avec des € à la place des points
- utiliser comme figurines des membres éminents du gouvernement ou de l’opposition au choix de chacun (ça devient un jeu de rôle)
- ajouter les cases classiques en les adaptant : le puits devient le puits de l’oubli médiatique, les cases Oie deviennent des boosters médiatique, les cases « aller à » deviennent des cases people... et ainsi de suite. On devrait facilement arriver à un jeu de l’oie complet sur cette base, l’idée étant de  lancer à chaque case une bataille d’arguments. Les autres joueurs votent (sans se taper dessus) pour savoir sir le joueur peut rejouer ou pas ;) Sympa, non ? Prévoir des pansements dans la boite.

Sinon les spécialistes de jeu, comme notre cher Martin Vidberg, pourront facilement imaginer des variantes plus sophistiquées avec des règles compliquées (tout est toujours compliqué en politique), une carte du monde avec une grosse France au milieu et des jetons de popularité, afin de se faire élire sur un programme populaire... (quant à le respecter c’est une autre chose et un autre jeu).

mercredi 24 décembre 2014

Camion, camion, pouet, pouet

Petite nouvelle avant le réveillon de ce soir.

Un cartel de camions vient d’être démasqué par la Commission européenne. Depuis 1990 six constructeurs s’entendaient pour ne pas industrialiser dans de bonnes conditions les technologies « vertes » permettant de réduire les émission de CO2. (Article payant original dans le Financial Times)

On connait la liste des industriels visés par cet accord : Daf Trucks, Daimler, Iveco, Scania, Volvo et MAN... qui représentent la quasi totalité du marché. Il y a deux constructeurs allemands, deux suédois, un néerlandais et un italo-américain... Pas de français, car ils sont absents de ce marché depuis longtemps (Renault Trucks est une marque de Volvo). A priori des constructeurs issus de pays vertueux, en tous cas de pays donneurs de leçons en matière d’écologie. Hum... Ambiance morose chez les allemands et les suédois. On attend la réaction d’Angela ?

Ces constructeurs ont donc choisi de ne pas développer de technologies bonnes pour la planète, en positionnant leurs prix comme trop élevés pour leurs acheteurs. Un vrai bon cartel comme on les aime, symbole du capitalisme le plus froid et donneur de leçons par ailleurs. Amende historique attendue, mais évidemment il y aura des recours de la part de ces constructeurs dont certains ont déjà provisionné des amendes record.

A l’heure où l’on parle de changement climatique, les camions représentent un quart des émissions automobiles. On note 36% d’augmentation de ces gaz dans le secteur, alors que les objectifs de réduction sont de 30%. Il y a donc une responsabilité écrasante des acteurs de ce marché. Mais les routiers vont protester et donc l’impact sera très réduit. Après tout, il faut bien vendre des camions, les faire rouler et être rentables, non ? Ne serait-ce que pour transporter tous ces produits consommés en masse.

La Commission européenne mène des enquêtes très professionnelles dans de plus en plus de secteurs. Que ceux qui prétendent qu’elle ne sert à rien, ou qu’elle est trop intrusive, révisent un peu leur jugement.

C’était juste une petite nouvelle pour les consommateurs schizophrènes de nos sociétés modernes. On ne veut pas toujours voir ce qu’il y a derrière la quantité et la diversité des produits que nous consommons. Que cela ne vous empêche pas de réveillonner le mieux possible. Le transport vraiment vert n’est pas pour demain !


mardi 23 décembre 2014

Saint-Pierre et Miquelon, vraiment ?

Oui vraiment. C’est la France après tout, un département d’outre-mer, pardon on dit maintenant une collectivité d’outre-mer. Un petit bout de France à quelques encablures du Canada et de sa Terre-Neuve. Deux communes, deux îles. C’est la première fois qu’un président français y va sans que cela ne soit qu’une escale vers ou à partir du Canada. C’est la première fois qu’un président va à Miquelon, la plus grande des deux îles mais la moins peuplée.

Et à propos de peuplement, il y a peu d’habitants et encore moins de français en situation de voter là-bas, à peu près 5000 ce qui fait de leur députée, Annick Girardin, le député le moins bien élu de France ou à peu près. Rappelons que Madame Girardin, radicale du PRG est secrétaire d'Etat (de la Francophonie) et qu’elle a été réélue récemment, malgré la tendance anti-socialiste dominante - c’est son suppléant qui siège. Rappelons que Madame Girardin est née à Saint-Malo dans la grande lignée des malouins, ces marins qui ont sillonné les mers du globe. De loin, quand on regarde une carte du monde, Saint-Pierre et Miquelon ne sont que des confettis à quelques milles de Terre-Neuve et on a peine à croire qu’il s’agit de la France. C’est depuis la Restauration en 1815 que cet archipel est finalement revendu par les anglais aux français après une histoire révolutionnaire tumultueuse.

Une des batailles importantes que la France a décidé de mener, après des années d’atlantisme pro-canadien qui l’avaient amené à ne pas réagir, est la bataille pour l’extension du domaine maritime autour de Saint-Pierre et Miquelon au grand dam des canadiens. Une démarche officielle est entreprise à l’ONU dans le cadre de la relance internationale de ce processus, dont on avait parlé ici il y a un peu plus d’un an déjà. Les enjeux sont économiques et nombreux, en matière de pêche mais aussi de champs pétroliers ou de nodules sous-marins. C’est la soupe à la grimace avec les canadiens qui s’y opposeront évidemment... mais le droit international est défini par l’ONU en la matière. On n’en est pas à un statut de guerre, comme dans d’autres situations complexes, en mer de Chine par exemple, mais cela n’améliore pas le quotidien des relations. Dans ce cas les positions sont claires : il y avait eu des négociations qui n’ont pas abouti entre les deux pays, puis un arbitrage défavorable à la France en 1992. La commission « géologique » de l’ONU va proposer ou pas de rouvrir le dossier. Ensuite, ce sera diplomatie et justice internationale, un dossier long.

La Francophonie politique est tournée vers l’Afrique, mais avec une nouvelle secrétaire générale de la Francophonie qui est canadienne, avec une ministre française qui est originaire de Saint-Pierre et avec le contentieux autour de Saint-Pierre et Miquelon, le refroidissement climat-politique est vraisemblable. La pauvre Francophonie n’y est pour rien. Avant d’être un terrain d’influence pour les politiques de certains pays - dont la France et le Canada - la Francophonie doit déjà régler ses problèmes internes. Si Madame Girardin avait été nommée - puisqu’il fallait un ou une ministre du PRG - à un autre poste, le débat se serait déplacé ailleurs, mais il est là.

Mais laissons la francophonie pour le moment. L’archipel que visite François aujourd’hui et demain est perçu par beaucoup comme ne faisant pas partie de la France. Il est loin et sa « diaspora » est moins importante ou présente en métropole que d’autres îles comme la Martinique ou la Guadeloupe. C’est pourtant cet archipel qui a été libéré le premier sur ordre du Général de Gaulle, quelques jours après Pearl Harbour, à la fin 1941. Enjeu stratégique et marque de pouvoir dans une logique d’empire colonial qui se resserre petit à petit vers Paris. Aujourd’hui, en décembre 2014, une telle visite s’apparente pour les mauvais esprits à des « vacances » ... Sauf qu’il y a meilleur moment dans l’année pour aller sous ce climat. François aime la pluie (et la neige). L’agenda est en tous cas vide pour Noël et la suite.


lundi 22 décembre 2014

De l'animation

On en parlait samedi, ça bouchonne un peu partout. Et si on se régalait les yeux avec des animations, histoire de déboucher le cerveau et les yeux au moins ?

J’ai découvert un site fascinant avec quelques belles animations explicatives, originellement produites pour la BBC. Allez-y y faire un tour pour voir comment fonctionne un moteur de voiture, un pistolet ou un réacteur d’avion. Moi je préfère évidemment les animations autour de la Tarentule, parfaites pour votre déjeuner. C’est instructif et animé. C’est en anglais aussi.

Animagraffs by Jacob O’Neal

Je vous ai déjà montré quelques animations dans ces deux billets à relire pour vous nettoyer les mirettes après tous ces poils d’araignée : ici sur les peintures animées et ici sur les animations rythmées. Si vous préférez savoir comment une araignée tisse sa toile c’est ici ;)

Sinon, il y a encore et toujours l’auteur de Beauty (lien sur les peintures animées) qui n’aime pas la Tour Eiffel visiblement.


Ici quelques articles sur ArtNet pour voir des artistes du GIF. En bas de l’article des liens vers les premières et deuxièmes parties de l’article.

Mais je ne voudrais pas vous faire perdre votre temps comme lui (extrait de cette belle liste d’artistes)


Il y a tellement de choses à faire aujourd’hui...

dimanche 21 décembre 2014

Du temps de cerveau pour... une nouvelle fois sans toi

Roger attendait ce jour depuis des semaines. C’était le 21 décembre, un dimanche. Un jour célébré un peu partout pour des tas de raisons, entre le début des vacances scolaires, le premier jour de l’hiver, les fêtes celtes du solstice et le jour le plus court de l’année. Mais c’était surtout la journée mondiale de l’orgasme qui avait intéressé Roger.

Roger avait découvert cette journée mondiale en surfant au hasard sur Internet. Quelques vieux hippies avaient lancé cette idée en espérant que l’énergie positive dégagée par tous ces orgasmes viendrait améliorer le monde. Roger n’avait pas d’enfant, ne partait pas en vacances d’hiver, n’avait pas d’origine celte et ne s’intéressait qu’à la nuit la plus longue de l’année et aux orgasmes. Il faut dire que Roger n’était pas très séduisant. Ni beau, ni sportif, ni intelligent ni rigolo, Roger était même plutôt un peu moche avec son crâne dégarni et son nez de travers. Il exerçait un métier sans attraits et n’avait pas de femme dans sa vie. Ni au singulier ni au pluriel.

Alors Roger s’était dit que cette journée allait lui porter bonheur et qu’il allait enfin pouvoir faire l’amour. C’était mathématique. Il avait donc profité des dernières semaines et de ses économies pour s’acheter une belle tenue qui aurait presque pu le rendre attirant s’il n’avait complètement manqué de goût. La chemise noire n’était pas du même noir que son pantalon et ses chaussures en daim n’allaient pas du tout avec ses chaussettes grises. Il avait trouvé une veste noire à rayures et se trouvait plutôt beau. Roger était myope, vous l’aurez compris.

Il avait beaucoup débattu avec lui-même sur la manière d'organiser cette journée. Par où commencer ? Au début il avait pensé commencer le samedi soir à minuit pour profiter des 24 heures, mais il avait compris qu’on parlait de la nuit du samedi soir jusqu’au dimanche matin en fait. Il se dit que ce n’était pas grave et qu’il n’avait qu’à commencer le dimanche matin. Avec un peu de chances il en aurait comme ça pour tout le dimanche et la nuit suivante... C’était juste un petit décalage.

Roger ne connaissait pas de filles. Ou plutôt celles qu’il connaissait le fuyaient comme la peste (il avait mauvaise haleine également) et en plus il n’avait pas leurs téléphones personnels. Il avait donc décidé d’arpenter les rues pour discuter avec les jolies femmes qu’il rencontrerait. Il avait imaginé plusieurs manières de les aborder mais sa préférée tournait à peu près autour de ce (futur) dialogue :

- Bonjour Mademoiselle, vous savez quel jour nous sommes aujourd’hui ? aurait-il demandé
- Bonjour, oui nous sommes dimanche, aurait-elle répondu. Ou alors elle aurait dit le 21 décembre, ou le premier jour de l’hiver, ou le solstice... Mais cela ne changerait rien  car il aurait continué ainsi :
- Aujourd’hui c’est la journée mondiale de l’orgasme
- Ah ? aurait-elle dit d’un air étonné
- Oui, c’est vrai. Voulez-vous prendre un café avec moi ?

Sur cette dernière proposition, il n’était pas encore tout-à-fait sûr de lui. Etait-ce trop ou pas assez ? Un verre plutôt ? un thé ? Une infusion ? Ou alors une proposition plus directe ??? Roger se disait que l’inspiration viendrait sur le moment. Il finissait juste de se raser et il se coupa car il ne faut jamais sourire en se rasant. Roger jura. Parmi les rares qualités de Roger, il faut signaler son répertoire complet de jurons des provinces françaises. Roger avait en effet une bonne mémoire pour ces choses là et le fait de travailler dans un entrepôt avec plein d’étrangers et de provinciaux avait particulièremet enrichi son catalogue.

Roger réussit quand même à être prêt aux alentours de 10 heures. Il se regarda une dernière fois dans la glace, enfila son manteau et s’apprêta à sortir. Il avait oublié qu’il ferait aussi froid et n’avait pas pensé à s’acheter un nouveau manteau. Le sien était passablement élimé. C’était dommage. On ne voyait plus ses beaux habits. Roger hésita et décida de ne pas mettre le manteau. Il serait nettement plus « élégant » en veste !

Il faisait vraiment froid. Roger eut un frisson en bas de chez lui. Il se décida pour aller au café d’à côté, son rade personnel, histoire de prendre des forces avant d’attaquer son occupation de la journée : trouver un orgasme. Roger était un peu alcoolique sur les bords mais il savait tenir sa langue. Il avait décidé depuis le début de ne pas parler de cette journée mondiale aux autres hommes, histoire de diminuer le risque de concurrence. Quand il arriva dans le café, les autres habitués se mirent à siffler et à applaudir la tenue de Roger et il dut y avoir quelques tournées générales. Tous avaient compris que Roger fêtait quelque chose aujourd’hui, mais personne n’avait compris quoi. Ca ne changeait rien aux nombre de tournées générales, c’était bien là le principal.

Vers 13 heures Roger, plus qu’éméché, regarda sa montre. Le café s’était vidé et le patron le salua. Roger sortit. Il faisait froid et une neige mouillée tombait sur sa jolie veste. Roger remonta le col et marcha vingt mètres jusqu’au restau du coin, tenu par le frère du bistrotier. Il y mangea un coq au vin et but quelques pots de rouge. Vers 14 heures, quand Roger sortit du restaurant, la pluie s’était établie. Roger remarqua alors quelques taches de coq au vin sur sa chemise. Heureusement qu’il avait choisi une chemise noire.

Il avait oublié de faire pipi. Zut se dit-il. Comme tout bon parisien mal élevé et vulgaire il se déboutonna et traversa la rue vers son coin favori pour pisser, le petit recoin en face, pas trop près de chez lui. On n’est pas des bêtes quand même se disait-il en traversant, les doigts empêtrés dans sa braguette.

C’est à ce moment que l’autobus l’écrasa. Il ne reprit conscience qu’aux urgences, juste avant de mourir. Une infirmières disait à une autre : « Je sais bien que c’est la journée mondiale de l’orgasme, mais quand même, le faire au milieu de la rue, il y en a qui exagèrent ! »

Décidément, pour Roger, ça avait bien été la journée la plus courte de l’année.


samedi 20 décembre 2014

Embouteillages d’hiver(s) et variés

Oui, c’est traditionnel en France, pour le début des vacances d’hiver (scolaires) il y a divers embouteillages un peu partout.

D’abord vous remarquerez qu’il y a plusieurs vacances possibles en même temps. Agrandissez l’image ci-dessous pour savoir par exemple comment certains informaticiens (qu’on aime, hein, malgré le billet d’hier) vous souhaitent ces fêtes de fin d’année... Il y en a pour tous ou presque (où sont les orthodoxes 13 jours plus tard ?)


Ensuite il y a les embouteillages classiques de voitures polluantes. On mesurera le nombre de centaines de kilomètres cumulés de bouchons. Pas terrible pour la planète, mais qui s’en préoccupe ? Peu de voitures électriques dans les bouchons car elles ne sont pas faites pour ça. Des voitures hybrides quand même. Rappelons qu’à Paris les voitures électriques stationnent gratuitement dans beaucoup d’endroits. Comme les tarifs augmentent tout le temps, c’est appréciable.

Il y aura quelques bouchons de plus à cause de certains routiers mécontents et de taxis fâchés contre UberPop, mais ils seront aléatoires et surtout aux abords des centres commerciaux, histoire de faire de belles images au journal de 20h.

A propos de centres commerciaux, il y aura des grèves (en tous cas des menaces de) dans les entrepôts d’Amazon. Faut-il prévoir des délais ? Le Père Coca-Cola Amazon Drone Xbox PS4 Noël sera-t-il en retard ? C’est le bon moment pour embouteiller les chaînes d’approvisionnement en tous cas. Je ne parle pas des embouteillages dans les magasins, petits et grands pour ce dernier samedi de courses avant Noël.

Il y aura aussi embouteillages dans les services d’urgence des hôpitaux. La grève des généralistes et des médecins libéraux s’accompagne d’une grève des urgentistes. La plupart travailleront quand même avec un bandeau sur le bras, mais les gens tomberont quand même malades et donc les files d’attente vont s’allonger dans les services d’accueil des hôpitaux qui vont servir de trop-plein pour tous ceux qui ne pourront pas aller voir leurs médecins habituels. C’est un embouteillage d’une autre nature, mais cela pèsera fortement sur le moral de ceux qui seront pris dedans.

Ne rigolez pas mais cette semaine a été la plus dure pour les services comptables des entreprises françaises avec le pic annuel de remboursement des notes de frais... Si, si. La journée la plus noire a été vendredi, parait-il... On est peu de choses.

Je passe sur les bouchons à la Tour Eiffel, puisque les vendeurs officiels de souvenir sont en grève. Il reste les vendeurs à la sauvette... Pour satisfaire les touristes. 

Et puis n’oublions pas pour terminer les embouteillages sur les pistes de ski. La fin d’automne est douce et la neige n’est pas au rendez-vous avec la Lune, mais le Soleil si ! Résultats les quelques stations où les pistes sont praticables ont peur d’être engorgées. Avoriaz et son domaine seront donc réservés en priorité aux résidents des communes du domaine et les autres skieurs seront contingentés (12 000 par jour quand même en tout). Ca va râler pour l’achat des forfaits. Prévoir des queues aux caisses, après les queues sur la route. Prévoir également des queues à la polyclinique du coin.

Et si vous en profitiez pour débouteiller quelque chose ? Avec des bulles par exemple...


vendredi 19 décembre 2014

Piratages informatiques : cherchez le maillon faible

L’actualité nous parle de piratages informatiques. Il y en a de toutes sortes.

Certains sont très sophistiqués à base de technologies évoluées, du genre accrocher un dispositif de déviation sur un câble sous-marin, mais là on parle d’espionnage d’Etat, comme la NSA par exemple, avec ce qui a été révélé par Snowden. D’autres sont moins sophistiqués et exploitent des failles dans les systèmes utilisés par les ordinateurs, avec un marché florissant de virus et d’anti-virus qui se combattent dans une escalade sans fin. Certains systèmes sont plus fragiles que d’autres. Windows reste de loin le plus répandu et le plus fragile. Les systèmes Apple sont plus protégés comme les Linux, mais devenant de plus en plus populaires, ils attirent certains pirates mais encore peu car les pirates aiment la quantité : pirater une machine pour voler son contenu, c’est bien, mais se servir de cette machine à l’insu de son propriétaire pour en pirater d’autres et envoyer des messages en masse, c’est mieux. C’est ce qu’on appelle les botnets (et pas les bonnets comme me dit mon correcteur orthographique), les robots internet, comme Google qui est un gros virus en fait mais que tout le monde accepte parce que c’est pratique.

Et puis il y a les pirates qui ne s’attaquent pas aux systèmes informatiques mais à leurs utilisateurs, en leur volant leurs mots de passe sans que ceux-ci s’en rendent compte, parce que la plupart des utilisateurs sont crédules ("ça n’arrivera pas à moi"). C’est de loin la méthode la plus efficace et elle marche même avec les professionnels.

Deux exemples :

Sony évidemment et l’affaire du piratage massif pour pousser à l’interdiction de « The interview », bizarrement traduit en français par « l’interview qui tue » (haha), paradis de la dictature nord-coréenne. Que ce piratage soit l’oeuvre de nord-coréens, de chinois, de groupes internationaux, de mercenaires de l’internet ou d’un employé jaloux n’a pas d’importance. On notera quand même qu’Obama s’insurge contre ce piratage et accuse formellement la Corée du nord parce que le FBI aurait trouvé les auteurs (pourquoi pas la NSA au fait ? Avec tout ce qu’ils écoutent...) et on reconnaitre bien là l’importance de l’industrie culturelle américaine : comment, ils osent s’attaquer à l’un de nos principaux leviers internationaux de pouvoir ???... On notera également que la quantité d’informations volées à Sony permet de découvrir plein de secrets pas très reluisants dans cette industrie tout sauf transparente. On notera surtout que le piratage a été rendu possible parce que Sony utilisait de vieux systèmes Windows pas maintenus, que les serveurs n’étaient pas protégés et que les utilisateurs et les informaticiens se sont fait avoir en donnant aux pirates leurs mots de passe.

L’ICANN ensuite. On en parle de temps en temps sur ce blog. Cette entité au coeur de l’Internet détient la gestion des noms de domaine au centre de tout le réseau Internet et donne le la en matière de technologie internet. Il y a quelques semaines, l’ICANN s’est fait voler les données liées à l’ensemble des noms de domaines de l’internet, y compris les identités complètes de leurs propriétaires et leurs mots de passe. La technique a été la même : piéger des informaticiens qui ont donné leur mot de passe via des pages bidouillées. Pour mémoire, l’ICANN est en charge de l’évolution de l’Internet dans plusieurs domaines et on pouvait penser que ses informaticiens étaient bien briefés. Que nenni. Que non point, comme disait mon prof d’informatique quand j’étais jeune.

La sécurité informatique est un vain mot dans la plupart des secteurs, sauf les plus sensibles... et encore. Il y a donc de grandes chances pour que pour vous, comme pour moi, cette sécurité soit une illusion. Illusion entretenue par beaucoup de services informatiques qui puisent leur légitimité dans la pérennité de cette idée auprès des directions générales dont ils dépendent. La plupart des gens se disent qu’un minimum de sécurité est nécessaire mais pas plus que ça. Dans mon organisation par exemple, les mots de passe de messagerie ne changent jamais, sauf à la demande explicite de l’utilisateur qui ne le fait évidemment pas. Pourquoi y penserait-il ? En plus le mot de passe ne peut en général même pas être changé par l’utilisateur lui-même sur beaucoup de systèmes d’entreprises.

L’élément humain est clairement le maillon faible et ce qui est inquiétant/rassurant avec les deux exemples dans l’actualité, c’est que même parmi les professionnels les plus compétents on trouve toujours des personnes qui se font avoir. A ce propos vous pouvez lire ou relire ce petit livre magnifique sur les Lois fondamentales de la stupidité humaine. Si vous êtes informaticien pas la peine de le lire, vous avez déjà intégré les principes... Non, non, je suis mauvaise langue car une des lois dévoilées dans ce livre c’est que quel que soit le groupe humain considéré, il y a toujours le même pourcentage de gens stupides. Intéressant, non ?

Les pirates (dont certains sont donc stupides mais pas tous) ont encore de beaux jours devant eux ;)

jeudi 18 décembre 2014

Ping-pong diplomatique : Cuba-USA 1-1 après la première manche

Il fut un temps où la diplomatie passait par des initiatives non diplomatiques, comme les matchs de ping-pong entre les USA et la Chine. Aujourd'hui la diplomatie passe par l'économie, les chambres de commerce et les organisations régionales de nature économique. Si vous ajoutez une pincée de pape d'origine américaine (argentine) et son anniversaire très récent, vous avez là un joli cocktail réussi entre les USA et Cuba, ennemis depuis au moins 52 ans. Ce n'est pas encore un "Cuba Libre" car pour cela il faudra attendre des réformes économiques et politiques à Cuba, mais c'est au moins un Mojito, avec ce qu'il faut d'acidulé et d'épicé.

L'annonce surprise et conjointe du rétablissement des relations diplomatiques entre les deux pays a fait l'effet d'une bombe et les réactions s'enchaînent (texte en anglais de la déclaration d'Obama ici) : globalement les américains (du Nord et du Sud en passant par le Centre et la Caraïbe) se réjouissent de cette décision, même si ce n'est qu'un premier pas avant d'autres mesures attendues, comme la levée de l'embargo. Les européens se réjouissent également. Les russes le font du bout des lèvres, eux qui sont justement depuis peu sous embargo (américain ET européen) à cause de l'Ukraine, en essayant de prouver que la notion même d'embargo est contre-productive (elle est en tous cas efficace sur le cours du rouble). Quant aux chinois ils se réjouissent, lire ici un site officiel chinois en espagnol via Google Cuba...

Aux USA, les républicains se fâchent, y compris ceux qui sont des immigrés urbains et menacent de ne "jamais" voter la levée de l'embargo, eux qui contrôlent le Congrès. Les démocrates suivent leur président, qui a dans le domaine de la diplomatie au moins, un réel pouvoir de décision sans avoir besoin de l'avis du Congrès justement. Les lobbies économiques se réjouissent (surtout ceux du monde des télécoms et de l'internet puisque parmi les mesures décidées il y a l'ouverture du marché cubain des télécoms, mais aussi dans le domaine agro-alimentaire). Les immigré cubains trouvent, comme toujours dans ce cas, soit que cela va trop loin en l'absence de réformes internes à Cuba, soit que cela ne va pas assez loin. Obama a marqué un joli coup. Un coup historique qui restera dans les annales, même si l'embargo existe encore et ne sera pas remis en cause avant les prochaines élections - il risque même d'être l'un des enjeux de cette élection sur le plan international : on notera en effet que Jeb Bush, troisième du nom et pas le plus intelligent dit-on, envisagerait de se présenter et il aurait alors évidemment tendance à défendre la ligne dure des Bush qui ont renforcé l'embargo.

A Cuba les réactions vont venir petit à petit, mais la différence se fera avec la disponibilité plus grande (on espère) de produits de base, comme dans tout pays sous-développé, sur le porche de l'émergence. La succession entre Fidel et Raul est en jeu, depuis la poignée de main historique entre ce dernier et Obama à l'enterrement de Mandela l'année dernière. Et le dynamisme de Cuba dans de nombreux domaines intellectuels, scientifiques ou médicaux comme dans la lutte contre Ebola est bien connu.

On notera également cette phrase d'Obama dans sa déclaration : "Todos sonos Americanos". La seule phrase en espagnol dans son texte. "Nous sommes tous des américains", difficilement traduisible en anglais puisque habituellement "american" veut dire aux USA un citoyen des USA justement, alors que partout ailleurs dans les Amériques c'est un terme plus globalisant. Le prochain Sommet inter-américain en avril 2015 devrait d'ailleurs accueillir Cuba pour la première fois.

Les grands mouvements n'ont jamais une cause unique. Il y a des étapes, souvent souterraines (ou vaticanesques en l'occurrence). Il y a des moments cruciaux, des sauts dialectiques comme on disait quand on avait le droit de parler d'idéologie sans être accusé de tous les maux. L'annonce d'hier est un moment crucial, qui sera forcément suivi d'autres moments, plus ou moins rapidement.

Saluons-le !

Belle image, ici en italien... Vive la diversité culturelle et linguistique

mercredi 17 décembre 2014

Tango à Rome, (T)rouble à Moscou, Vote à Athènes, Rien à Paris

C'est mercredi et c'est l'anniversaire du pape. Information sans aucune importance, sauf que cette année, les réseaux sociaux appellent à danser le tango (argentin, le vrai) place Saint-Pierre, avec un foulard blanc aux alentours de midi. Tous espèrent que le temps sera clément et le pape benoit françois. C'est grâce à des nouvelles comme ça qu'on peut mesurer a nécessité d'avoir une presse d'information indépendante... et de bonnes agences de presse comme l'AFP puisque c'est évidemment une dépêche d'agence qui est à l'origine de la plupart de ces articles. En Italie, le pays qui est juste à côté du Vatican, tout va plutôt mieux : la Commission européenne a demandé au pays de revoir son budget pourtant déjà très strict, et la justice a entamé des poursuites contre certains officiels de Rome et de la ville pour cause d'accointances avec la Mafia. En plus les italiens osent proposer la candidature possible de Rome et de plusieurs autres villes italiennes pour les JO de 2024, alors que l'Allemagne a déjà annoncé quelque chose et que la France y pense. On croit rêver. Mieux vaut encore danser le tango (argentin).

C'est mercredi aussi à Moscou et les files d'attente devant les bureaux de change s'allongent puisque le rouble est en chute à peine contrôlée, quasiment libre, par rapport aux autres monnaies, principalement le dollar et l'euro. Certaines chaînes de magasins affichent désormais les prix en devises étrangères alors que c'est interdit, et des magasins en ligne, comme Apple - qui devient un peu la norme en la matière comme Mac Donald's il fut un temps - stoppent leurs livraisons, pour cause d'écart trop grand dans les taux de change. On ne danse pas à Moscou, où la température est quand même nettement plus basse qu'à Rome. Les russes attendent le discours mobilisateur de leur patron-Poutine. Mais celui-ci tarde à parler pour le moment. De toutes façons c'est l'affaire du gouvernement de Medvedev et donc du ministre des finances dont la thèses, il y a 20 ans portait sur "la politique budgétaire de l'État dans les conditions de la transition aux rapports du marché". Il est donc l'homme de la situation et la Banque centrale va pouvoir faire tourner la planche à roubles.

C'est mercredi en Grèce avec une élection présidentielle surveillée de partout en Europe. Enfin, le début d'un processus jusqu'à fin décembre et qui peut aboutir sur des élections législatives anticipées puisque dans ce pays le président est élu par le parlement. La majorité en place n'est pas suffisante sans apports externes et la montée en puissance d'une gauche extrémiste - genre Mélenchon en pire, si, si, ça existe - inquiète les marchés. Les fameux marchés, déjà bien secoués par ailleurs un peu plus au Nord et à l'Est. Ce genre d'élection est toujours un exercice délicat, comme dans tous les régimes parlementaires - genre IV° république en France - ou les présidents du conseil évoluent au gré des alliances entre partis. Le problème est que la Grèce est coincée sur la route étroite d'un redressement financier sans précédent et qu'une volonté politique forte est nécessaire pour tenir le cap, quel qu'il soit. Les jeux d'alliances ne sont pas les meilleurs dans ce type de situation, sauf "union nationale" ce qui n'est a priori pas le scénario grec.

C'est mercredi en France aussi et il ne se passe rien d'important. Ah si, je suis bête. Il y a l'arbre de Noël de l'Elysée et le Conseil des ministres avec à l'ordre du jour une question importante, le "projet de loi autorisant la ratification de l’accord d’association entre l’Union européenne et la Communauté européenne de l’énergie atomique et leurs États membres, d’une part, et la République de Moldavie, d’autre part". Ouf !

mardi 16 décembre 2014

Immigrations, un enjeu politique, un moment choisi

Les dates ne sont jamais anodines.

Le musée de l'immigration (musée national de l'histoire de l'immigration en France, un peu comme Ellis Island aux USA) a été inauguré hier officiellement par le Président de la République. Je veux dire François. L'idée de ce musée date de Chirac - qui a toujours eu un tropisme vers le reste du monde, l'Asie, l'Afrique ou la Francophonie - et d'un certain Raffarin. Puis le musée a été ouvert sous Sarkozy mais celui-ci a toujours refusé de l'inaugurer ou au contraire a voulu le transformer en son contraire ce qui a été refusé par tous les autres. François, en sa qualité de président, de gauche de surcroît, l'a donc officiellement inauguré sept ans après son ouverture au public. Le fait d'avoir choisi comme lieu, à l'époque l'ancien pavillon à la gloire du colonialisme, porte Dorée, qui a tout vu depuis y compris des poissons toujours là depuis 1931, est un symbole trop puissant pour être ignoré, tant les deux aspects sont liés dans de nombreux pays.

François a donc profité de ce moment pour prononcer un discours sur l'immigration. On sent une montée graduelle en puissance sur ces thèmes liés à l'ouverture de la France sur l'Autre et sur le monde. En Afrique ou en Francophonie par exemple, François a prononcé plusieurs discours vantant un modèle somme toute classique à gauche mais qu'on n'entendait plus depuis des lustres. Ce discours est forcément clivant en forçant d'une certaine manière la droite à se droitiser. Remarquez bien que la droite se droitiste naturellement et de plus en plus avec le retour de Sarkozy, entre nominations contestées à la direction de l'UMP, discours de plus en plus musclés sur les thèmes chers au FN, comme l'immigration au hasard, ou comme le vote des étrangers. C'est donc aussi une manœuvre politique qu'a lancée François avec ce discours sur l'immigration, qui tombe bien dans un calendrier agité à droite, et alors même que François remonte dans les sondages (il aurait dépassé les 20% de popularité).

Mais qu'à dit François dans son discours ?

Il en a appelé à l'Histoire, de Braudel et son identité de la France à la diversité de ses cultures, la France étant considérée comme le plus vieux pays d'immigration en Europe. Il a dit que l'histoire de l'immigration c'est l'histoire de la république... alors que Sarkozy dit exactement le contraire par exemple. Il a dénoncé ceux qui attisent les haines et suscitent la peur, en les traitant de démagogues - ça plaira à droite ;). Il a annoncé quelques mesures déjà plus ou moins dans les tuyaux : - création pour tous les étrangers arrivés légalement d'un véritable parcours d'intégration, création de titres de séjour pluriannuel, reconnaissance envers les immigrés de plus de 65 ans que l'on appelle les Chibanis, création des "passeports talents", réforme du droit d'asile, célébration de la laïcité le 9 décembre (jour anniversaire de la loi de 1905)...

Dire que la femme est l'avenir de l'homme l'immigration est l'avenir de la France devrait être naturel. Pour le dire aujourd'hui en France, il faut avoir du courage, même avec des mots pesés avec soin. Reste à savoir si ce discours sera repris (avec des pro et des anti) ou simplement ignoré. N'est pas Sun Tzu qui veut. Pour amener l'ennemi sur son territoire afin de gagner la bataille (électorale) encore faut-il avoir préparé le terrain et déployer de l'intelligence (au sens CIA du terme). C'est en tous cas un moment important que cette inauguration officielle et apaisée.


lundi 15 décembre 2014

Après Lima, la montagne à franchir à Paris sera très haute

La COP 20 vient de s’achever à Lima et le moins qu’on puisse dire c’est que les négociations sur le climat ne sont pas près d’aboutir. Les optimistes espéraient une déclaration finale plus avancée, afin d’aboutir à un accord à Paris fin 2015 pour la COP 21 si chère au coeur de François. Mais le texte final est tiède, plus qu’attendu et surtout moins contraignant.

Ce qui devait caractériser cette conférence annuelle, c’était la formalisation du processus et du formulaire à remplir les Etats pour finaliser leurs engagements avant la Conférence de Paris. Mais comme la formalisation est incomplète et plutôt « molle », la marche sera plus haute à franchir à Paris, ce qui a plusieurs conséquences :

La diplomatie française va devoir s’activer beaucoup plus que prévu sur le dossier, alors même que les experts français sont moins bien représentés au plan global dans ces négociations. La diplomatie française est en train de perdre ses moyens un peu partout dans le monde et il sera difficile d’être sur tous les fronts en 2015. Certains terrains diplomatiques devront donc être mis en veilleuse. Reste à savoir quelles conséquences cela aura. En Afrique par exemple.

Le fossé entre pays développés et pays en développements s’agrandit. Les pays en développement ne sont pas ceux qui ont créé la situation. C’est bien plus d’un siècle de pollutions variées qui a été à la source du réchauffement, ce que plus personne ne conteste, sauf peut-être un ou deux allumés manipulés par des lobbies. Ils ne veulent pas payer l’addition et veulent des compensations, notamment pour les investissements à consacrer à l’adaptation au changement climatique inéluctable maintenant. Les pays émergents, les grands, ont fait front sur le même principe mais avec une force de frappe très organisée... sans les russes qui sont perçus par tous comme trop en dehors de l’épure. D’ailleurs on ne parlait pas à Lima des BRICS (Brésil-Russie-Inde-Chine-Afrique du Sud) mais des BASIC (Brésil, Afrique du Sud, Inde, Chine). Quant aux pays du Nord, développés, ils parlent d’atténuation du réchauffement climatique (autour de la guerre contre les GES les gaz à Effet de Serre). Les USA et maintenant la Chine ont fait un pas dans la bonne direction. Restent quelques mauvais élèves du monde comme le Canada, au hasard, et on pourra lire ici un compte-rendu plus optimiste (carrément irréaliste) dans la presse canadienne...

La diplomatie a son rythme : une préparation longue et « technocrate » pendant des mois, puis une réunion prévue sur deux semaines avec une première semaine où chacun fait le matamore, avant d’entrer dans le vif du sujet et de s’écharper en petit comité la nuit, y compris en débordant de 24 ou 48 heures (30 heures de débordement à Lima, beaucoup plus à Copenhague pour le précédent Sommet important - comme Paris - avec au bout un échec cuisant). Tout ça pour un plan qui doit se mettre en oeuvre à partir de 2020. La machine onusienne est lourde et quand elle se met en marche, c’est bonne dernière. Pourtant Kyoto et son protocole sont loin maintenant (1997). Il est temps d’aller plus loin puisque les résultats sont catastrophiques pour la planète.

Les différentes composantes de la société civile sont évidemment furieuses, mais pas toutes sur les mêmes dossiers, puisque c’est un patchwork très hétérogène. Beaucoup d’ONG se sont rabattues sur des combats plus locaux et réputés plus efficaces pour les populations visées. Le problème du réchauffement climatique est que c’est un phénomène global, même si les micro-climats abondent. Les combats locaux sont illusoires sur un tel dossier. On peut s’attendre déjà à un Sommet agité à Paris en novembre 2015... En France les écolos sont cruellement (pour eux) absents du débat au-delà de déclarations flamboyantes. Ont-ils trop à faire au sein de leurs partis ?

Pour vous remonter le moral, vous pouvez toujours lire des romans qui parlent d’écologie-fiction. Il y en a de plus en plus, et ils ressemblent de moins en moins à de la science-fiction. J’en ai déjà parlé plusieurs fois ici. J’en ajouterai un autre : le cycle Time Riders d’Alex Scarrow, plutôt destiné aux jeunes, mais que les vieux peuvent lire avec fruit. Neuf volumes quand même pour le cycle complet. Une histoire de voyages dans le temps évidemment mais pas seulement : une belle réflexion sur la manière dont l’Homme traite sa planète.

Bizarre comme logo non. Du froid extérieur au chaud interne vers une surface gelée ???
On espère que le logo pour Paris sera mieux...

dimanche 14 décembre 2014

Du temps de cerveau pour... une nouvelle seau à cendres

Jean nettoyait sa cheminée. Le week-end avait été froid et humide et ils avaient fait du feu presque tout le temps. C’était le vrai dernier dimanche d’hiver. Ici en altitude, le temps changeait très vite mais quand il se mettait à faire beau cela durait longtemps et la cheminée pouvait alors rester des mois sans être utilisée.

Ils avaient bien fait de profiter de ce dernier week-end de froid pour venir ici, lui et sa bande de copains. Ca avait été un week-end bien arrosé, tous entassés devant la cheminée. Une vraie occasion pour refaire le monde, parler des filles et boire, à moins que cela ne soit dans un autre ordre... il ne se souvenait plus très bien.

En tous cas ils ne viendrait plus aussi souvent dans sa maison cette année. Il faudrait quelques mois avant qu’il puisse repasser par ici. C’est pourquoi il voulait laisser la maison propre et quand on avait la gueule de bois c’était une activité très saine que de nettoyer une maison. Pas besoin de réfléchir. Tous ses amis étaient repartis. Il ne restait plus que lui.

La cheminée était la dernière partie à nettoyer. Celle qu’il se réservait toujours pour la fin. Il aimait les odeurs qu’elle dégageait après quelques heures de repos. On y décelait les odeurs de plusieurs arbres de la région, du feu froid et des cendres. Il venait de sentir également une autre odeur qu’il n’arrivait pas à identifier. Intrigué, il regarda autour de lui, tout en finissant de remplir le seau à cendres. Rien de spécial à première vue. Il fouilla dans le seau. La cendre était fine et d’un beau gris. Il l’avait spécialement filtrée. Il le faisait à chaque fois. Puis il laissait le seau au milieu du jardin. Le vent faisait le reste. Immanquablement quand il revenait le seau était vide et la cendre envolée. Elle était partie aux alentours, pour participer au printemps et donner des forces à la nature environnante.

Il aimait laisser sa main filer dans le seau. La cendre était soyeuse. Il passa du temps à fouiller dans le seau mais n’y trouva rien que la douceur habituelle. Sa main était devenue grise et il la laisserait ainsi. Il emporterait avec lui un peu de cette cendre, belle et nostalgique. Il regarda la cheminée. Elle était propre et prête à recevoir un autre feu. Il ferma le volet du conduit et se redressa. C’est à ce moment qu’il la vit.

La source de l’odeur était là. Une pomme. Une pomme au trois quarts dévorée. Une pomme avec une odeur puissante de fruit et d’alcool.

Il sourit et prit le trognon dans sa main. La main non cendrée. Il faut la mettre au compost, se dit-il. Il posa les restes de la pomme sur le seau et sortit en tenant l’anse du seau dans sa main propre, puis il sortit, verrouilla la porte d’entrée, cacha la clé sur la poutre et alla poser le seau au milieu du jardin à sa place habituelle, tout ça avec sa bonne main. Enfin il prit le trognon et l’emporta sur le compost, qui avait plus l’air d’un petit terrain vague d’ailleurs. Puis il revint vers le seau et y replongea une dernière fois sa main cendrée. C’était tellement agréable qu’il eut du mal à ôter sa main. Mais il fallait bien quitter la maison, le travail l’attendait.

Lorsque Jean démarra la voiture, il laissa sa main cendrée flotter au-dehors, histoire de semer les cendres le plus loin possible. Il eut un petit sourire, comme à chaque fois, déjà dans l’anticipation de son retour d’ici quelques mois. Il n’avait pas remarqué le pépin de pomme qui était tombé dans le seau de cendres. Et maintenant ce pépin était arrivé au coeur même du seau.

Cet été là Jean ne revint pas dans sa maison. Il avait eu trop de travail, des missions de longue durée à l’étranger et une nouvelle petite amie qui préférait la mer. Il ne revint pas non plus de tout l’hiver suivant. Ce n’est qu’à l’été d’après qu’il revint. Seul. Sa petite amie n’avait pas duré assez longtemps. Et Jean avait hâte de revoir sa maison, son jardin, son seau de cendres et sa cheminée.

En arrivant devant chez lui il gara sa voiture, coupa le moteur et entra dans son jardin. Le seau n’était plus là. A la place, un arbre gigantesque avait poussé. Un arbre au feuillage dense et surchargé de fruits. Des pommes. Des pommes de toutes les couleurs. Des pommes qui étaient visiblement toutes à maturité. Un arbre qui avait l’air centenaire mais qui ne pouvait avoir qu’à peine plus d’une saison. Jean s’approcha. Les racines de l’arbre rayonnaient loin. Il remarqua quelques petits éclats de métal à la base du tronc. C’était son seau. Eclaté et éparpillé, et maintenant intégré à l’arbre.

Jean toucha le tronc du pommier. L’arbre vibrait légèrement. Très lentement, mais avec une force impressionnante. Jean laissa sa main sur l’écorce de l’arbre et celui-ci se mit à vibrer un peu plus rapidement. Une note très grave commença à résonner dans l’air limpide de cette journée d’été. Une note plus basse encore que le La le plus grave d’un piano. Jean leva les yeux. Le feuillage bruissait malgré l’absence de vent. Jean sut que l’arbre continuait à croître. Une pomme était devant ses yeux. Elle était belle et grosse. Jean la cueillit. Elle était rouge avec des reflets gris argenté. Elle lui rappelait à la fois la cendre et cette odeur liée à la dernière fois où il avait rempli le seau.

Jean croqua la pomme. Elle était parfaite, sucrée, juteuse, craquante. Jean s’éloigna de l’arbre. Le pommier vibrait de plus en plus rapidement maintenant et la note devenait légèrement moins grave.

Jean revint pensivement vers la maison, puis il se retourna. D’ici l’arbre emplissait le ciel et les pommes l’habillaient comme un sapin de Noël. Jean prit la clé au-dessus du linteau et ouvrit la porte. Il avait besoin d’un verre d’alcool et d’un bon feu de cheminée. Une fois le feu allumé et la bouteille sur la petite table à côté de son fauteuil il s’installa confortablement. Il était face à la cheminée et à la fenêtre où l’arbre continuait de grandir.

Le lendemain matin, lorsque les pompiers arrivèrent, il était trop tard. La maison avait entièrement brûlé, visiblement à cause d’étincelles qui avaient enflammé l’alcool. Le cadavre de Jean ne fut trouvé nulle part mais le feu avait été tellement intense que personne ne douta de sa mort. Pendant des jours et des jours les cendres de l’incendie se répandirent dans les environs. Puis le terrain resta à l’abandon. Personne ne voulait acheter ce terrain maudit. Et l’arbre continua à grandir. Aujourd’hui l’arbre occupe toute la vallée. Son tronc dépasse les cent mètres de diamètre et son feuillage dépasse la petite montagne qui surplombe la vallée à l’Ouest, du côté du vent dominant. Les pommes produites par l’arbre nourrissent une population de plus en plus grande.

Pourtant personne n’a remarqué ce petit noeud dans l’arbre, à hauteur d’homme. Et personne n’a mis la main dedans. Personne n’a pu sentir au fond de ce tout petit trou la douceur du coeur de l’arbre. Une douceur tiède, plongée dans une cendre douce comme la soie. Et personne n’a donc pu entendre, en plaquant son oreille sur le trou, le chant mélodieux de l’arbre. Une mélodie riche et lente, fredonnée d’une vois de basse. Ceux qui se rappellent Jean auraient pu y reconnaître sa voix. Mais quelle importance ? L’arbre croît et, un jour, il couvrira le monde d’un tapis de pommes multicolores, avec des reflets cendrés. Et Jean continuera à chanter au coeur de l’arbre.

samedi 13 décembre 2014

Maréchal Sarkozy

C’est samedi, c’est ravioli (ah non ça c’est le lundi) c’est Sarkozy !

Sarkozy a donc parlé et dit des choses fortes comme d’hab. On en parle sur LCP ici.

On retiendra plusieurs choses :

D’abord le côté militaire : plus qu’un général en chef, et peut-être plus qu’un maréchal en devenir, Sarkozy se positionne en vrai bonapartiste. Quand il dit « je veux une armée de militants » et que l’UMP doit « occuper tout l’espace entre le PS et le FN », il s’agit bien d’une rhétorique guerrière derrière son panache blanc. Il doit avoir relu l’Art de la guerre de Sun Tzu et vous pouvez le relire également ici. C’est également une manière de mettre en avant son vrai numéro deux, Laurent Wauquiez, au grand dam certainement de NKM. Une armée, un chef d’armée et un état major aux ordres. Ca c’est un parti moderne ! Poutine appréciera.

Avec son lyrisme coutumier, Sarkozy a dit aussi que « l’UMP, ce doit être le métro à 18h00, avec des ouvriers, des professeurs, des ingénieurs, des agriculteurs… ». Une vraie France miniature ? Ah bon ? Et les chômeurs, les étudiants, les immigrés ? Et les bourgeois qui ne prennent évidemment pas le métro, surtout à 18h ? Comme si un parti, quel qu’il soit pouvait être représentatif de l’ensemble de la France. Les sociologues doivent se retourner dans leurs sarcophages universitaires ! Attention faux ami, ne pas confondre avec les blogueurs sarkophages... On entre ici dans la gestion des foules de masse, dans les grands mouvements contrôlables uniquement parce qu’il y a un leader suprême, maximum. On n’est pas loin de la logique du parti dominant, voire quasi unique.

Sur le parti lui-même, le contrôle des fédérations sera renforcé, donc accessoirement le rôle du numéro deux, et en fonction des contrats d’objectifs fixés (par la Direction), « ceux qui les rempliront auront une part plus grande des cotisations »... Bonjour l’ambiance. Ca c’est du management participatif moderne et pas autoritaire pour un sou. L’entreprise UMP va devenir lucrative. La vente des T-shirts, bugs et autres sandales va s’accélérer. Le logo du Qatar sera-t-il également dessus ?

Allez, un peu de Sarkozy bashing au milieu de tout ce Hollande bashing, ça fait du bien, non ? D’autant plus qu’il pleut à Paris et que pour une fois François n’est pas en-dessous... quoique, voici une photo prise par moi ce matin dans un bus à Paris. Est-ce lui ?

vendredi 12 décembre 2014

Comment séduire des présidents d’universités ?

Pas facile quand on est au pouvoir de séduire les présidents d’universités.

On pourrait penser qu’en mettant l’enseignement supérieur et la recherche au coeur de l’innovation et de la stratégie de développement en France, François avait marqué quelques points. Il faut dire que les Assises de l’enseignement supérieur et autres Etats généraux de la recherche avaient fait plein de recommandations dont seulement certaines ont été reprises dans le projet de loi Fioraso (qui a un blog aussi). Il faut dire que Sciences en Marche a réuni pas mal de gens et pas seulement des marcheurs. Il faut dire que les regroupements d’universités, les fameuses nouvelles COMUE (à ne pas confondre avec Commune ou Communiste), se mettent en place mais pas partout.

Par contre; malgré tous ces beaux discours tendant à prouver que des nombreux nouveaux crédits sont affectés à ce secteur, il y a eu des coupes (à peu près équivalentes aux ajouts, on appelle ça des vases communicants ou de la dynamique des fluides), il manquait toujours 70 millions d’euros au compteur. Une bagatelle pour l’Etat, mais ce qui peut permettre à beaucoup d’universités de repasser un peu dans le vert. Pourquoi cette décision ? La Marche venait de revenir à Paris et cette décision leur ôte un gros argument. De plus François dîne ce soir avec la CPU, la Conférence des Présidents d’Universités, un club fermé et assez inefficace mais influent surtout quand il y a des revendications à la clé. Le dîner se passera mieux, mais...

Il y a des élections à la CPU très prochainement pour le triumvirat qui dirige cette Conférence permanente. Et comme par hasard, l’une des candidates à la présidence (venant de Montpellier), proteste contre cette « manoeuvre politique ». Elle-même se lance dans ce même genre de maneovre puisque son concurrent qui est le président actuel de la CPU est plus tiède suite à l’annonce de François. Comme quoi les élections ne touchent pas que les politiques... D’ailleurs à la CPU, les dissensions sont évidemment autour des projets des équipes candidates, mais aussi autour de clivages devenus classiques dans ce milieu : sciences humaines et sociales contre sciences dures ; province contre Paris : Grandes universités d’excellence et universités à ambition régionale ; droite contre gauche... Et maintenant hommes contre femmes ?

Ce qui a peut-être pesé dans cette décision est peut-être ce blog en images, un Tumblr pour ceux qui connaissent : « Ruines d’Université ». Les photos de morceaux d’universités délabrés sont édifiantes. Les images ont bien été reprises par les médias et elles font mauvais genre, y compris lorsqu’on veut attirer des étudiants étranges (et solvables) en France. Vous remarquerez que ce Tumblr parle de ruines de l’Université - avec un grand U et au singulier - c’est à dire bien plus largement que des universités visées par ces photos.

Le problème avec les universitaires c’est qu’ile ne se laissent pas faire et qu’ils savent débattre et déceler les discours dans les discours. Alors ce soir on souhaite bon appétit à François... Au moins la salle à manger sera chauffée.


jeudi 11 décembre 2014

Coder ou ne pas coder, voilà la question...

Aujourd'hui jeudi, beaucoup d'initiatives pour "apprendre à coder". Quézaco ? Décodons ce message.

Coder, cela veut dire "écrire dans un langage codifié et compréhensible par une machine". Il y a de multiples sortes de codage. Au début des ordinateurs, c'était complexe et réservé à des professionnels. Petit à petit, les systèmes de codage sont devenus de plus en plus faciles pour les débutants et les enfants. Aujourd'hui certains sont faciles à utiliser et très puissants. Moi, par exemple, j'aime beaucoup LiveCode dont j'ai parlé ici et ici. Avec un peu de patience, un esprit un peu logique et quelques idées on peut facilement écrire des "bouts de code" satisfaisants et même des applications comme on dit tout-à-fait utiles ou ludiques. Les informaticiens professionnels, eux, restent drapés dans leurs toges immaculées face à ces langages trop grand public, tout en se foutant de la gueule des autres informaticiens. Pour eux, ou pour ceux qui voudraient les comprendre, je vous recommande ce blog dessiné par des informaticiens pour des informaticiens ou des geeks. Hilarant et à lire au premier ou au second degré suivant votre humeur. La chasse au bug est un peu comme celle au dahu : on ne le trouve jamais complètement.

Aujourd'hui, quand vous parlez à votre téléphone (Siri sur un iPhone) par exemple pour lui demander de vous réserver un taxi pour maintenant, et si cela fonctionne, ce n'est pas du codage. C'est simplement que des codeurs professionnels ont, en amont, réussi à écrire des programmes pour décoder votre voix, analyser votre demande, déclencher une commande pour un taxi et à vous afficher le retour. Si ça ne marche pas il y a plusieurs causes : soit les programmeurs n'ont pas (encore) réussi à interpréter votre voix ou à déclencher une chaine complète de commandes ; soit vous avez mal formulé votre question ou vous avez la voix pâteuse et vous n'auriez pas dû danser toute la nuit, autant dormir jusqu'au premier métro Zzzzzzz.

Il y a donc des tentatives au plus haut niveau pour amener les jeunes et les autres à comprendre comment coder et pourquoi le faire. Exemple d'Obama ici, en vrai ou en BD, et d'Hollande ce jeudi.
Finalement coder à quoi ça sert ? Pour les politiques cela a la vertu d'enseigner une bonne pratique, teintée de bon sens et d'esprit logique. Bien formuler une instruction pour obtenir le bon résultat, plutôt que de passer son temps à râler ou à mettre en place des règles, puis des exceptions aux règles sans oublier les exceptions aux exceptions aux règles. C'est un peu un voeu pieux évidemment car le monde n'est pas rationnel. Mais les spécialistes savent bien que le rationnel n'est pas loin en dessous. Un exemple : lorsqu'il y a une cinquantaine d'années un universitaire informaticien a édit un petit programme (Eliza) pour simuler le comportement d'un psychothérapeute et que beaucoup de gens ont cru qu'il s'agissait soit d'un vrai humain soit de la première vraie intelligence artificielle créée, ils ont eu beaucoup de mal à accepter qu'un tel "comportement" soit si vraisemblable alors qu'il avait suffi de très peu de lignes de "code" pour arriver à ce résultat. Une simulation presqu'aussi vraie que nature, alors qu'en fait c'était juste un exercice. La réalité est donc facile à imiter, à coder... dans certains cas.

Un des débats, en France, porte sur l'apprentissage ou non à l'école du codage informatique. Le corps enseignant est divisé, une fois de plus. Lisez cet article et son enquête officielle. Il faut savoir, en tous cas dans les collèges et lycées normaux que l'informatique est mal traitée. Il y a des "heures supplémentaires" pour les professeurs en charge de l'informatique, mais elles sont très peu nombreuses et sont trustées par les profs de maths ou de physique. Les littéraires ne veulent souvent rien entendre et certains obligent encore les élèves à écrire avec un stylo plume. Il y a de plus en plus d'équipements informatiques, par exemple des tableaux blancs numériques branchés sur des ordinateurs pour des présentations et des cours plus "animés". Mais lorsqu'il faut faire venir un collègue pour l'installer, l'allumer, le dépanner ou simplement s'en faire expliquer le fonctionnement, un certain nombre de profs sont réticents ou tout simplement ignorants. Cela changera avec la génération des digital natives, mais ce n'est pas encore le cas. Lire, écrire et calculer sont des apprentissages de base admis par tous. Coder ? un nouvel apprentissage de base ? Ou plutôt ne faudrait-il pas parler de "raisonner logiquement" ?

Quels arguments peut-on donc invoquer pour amener les gens - et les jeunes en particulier - à coder ? Voici une petite liste personnelle, à compléter par vous-même :

- coder, c'est se donner la sensation qu'on peut contrôler les machines, au lieu de les subir en consommateur ou en cible marketing. C'est vrai, même si certains programmes sont bien trop complexes pour les humains normaux. C'est encore vrai même en sachant que certains programmes trop complexes sont écrits en fait par d'autres programmes...
- coder c'est un jeu logique, pour ceux qui aiment résoudre des énigmes de toutes sortes, en suivant des méthodes, en en inventant. Les ordinateurs sont rapides pour certaines choses et cela ne les gêne pas de tester un million de possibilités pour trouve la bonne.
- coder c'est se placer au-dessus de la machine et lui faire faire ce qu'on fut, même si c'est juste tracer un trait. La différence entre coder un trait ou utiliser un programme déjà fait pour dessiner un trait est essentielle : dans le deuxième cas on utilise du code sans se poser de question, comme lorsqu'on conduit une voiture, et dans le premier on sait qu'on peut ouvrir le capot et contrôler un câble débranché. Plein de gens n'ont pas besoin de cela, jusqu'au moment où...
- coder c'est ressentir l'élégance d'une chose bien faite, un peu comme en maths. Un code "bien construit" fait ressentir à son auteur la même satisfaction que celle de l'artisan ou du bricoleur qui a fabriqué un bel objet. On peut fabriquer salement des objets beaux, on peut fabriquer proprement des objets inutiles, mais rien ne vaut la fabrication d'un bel objet de manière élégante. Pareil pour le codage.
- coder, c'est comme une nouvelle langue. Un apprentissage utile pour s'enrichir de la diversité du monde. On parle souvent de diversité culturelle ou de diversité linguistique. On devrait également parler de la diversité informatique, loin des oukases des ayatollahs autour de certaines solutions (cf. le débat idéologique sur les logiciels ouverts, ou libres par exemple).
- coder, c'est produire un résultat et il y a un côté magique, une fois que c'est fait pout ceux qui ne savent pas le faire et qui découvrent simplement le résultat. Un peu comme un prestidigitateur qui réalise un tour de cartes bluffant, avec le sourire de celui qui sait.
- coder c'est une compétence utilisable un peu partout (pas partout évidemment). S'en priver c'est s'affaiblir par rapport à ceux qui savent ou sauront le faire. Les français sont réputés bons dans le domaine, peut-être parce que nous sommes un peuple cartésien et qu'un programme c'est un ensemble de difficultés réparties en blocs et coupées en plus petits ensembles. Le monde n'est pas cartésien, mais heureusement de multiples systèmes de développement permettent aujourd'hui d'être utilisés avec des formes de logiques différentes : procédurale, objet, systémique, floue...
- coder c'est un nouveau territoire pour les curieux. Pour mieux comprendre comment marche le monde numérique et pour s'y sentir moins perdu. Et pour être capable de discuter avec ceux qui l'ont compris, histoire de ne pas rompre le contact avec ces nouvelles générations qui tapent plus vite que vous sur un clavier ;)


Alors oui, pourquoi n'essayeriez-vous pas de vous y mettre aussi ?